Film2 :
Lien Youtube : https://youtu.be/7w6PqJHu7NU
Version sous-titrée en anglais : https://vimeo.com/702361218
Ce documentaire – d’un genre hybride entre animalier et épistolaire – est le récit d’un voyage effectué en 2022 à la rencontre des éléphants et à travers les grands espaces africains au cœur desquels résonne la voix de Romain Gary : « Quand vous n’en pouvez plus, faites comme moi : pensez à des troupeaux d’éléphants en liberté en train de courir à travers l’Afrique, des centaines et des centaines de bêtes magnifiques auxquelles rien ne résiste (…) La liberté quoi ! » Dans cette Afrique, parfois fantomatique, il arrive au voyage de se confondre avec un parcours initiatique. Botswana, Kenya. Zambie, Zimbabwe racontent alors le désir d’une plus grande conscience écologique. Depuis 2017 nous avons effectué – à l’occasion de colloques internationaux, de rencontres universitaires, de festivals, de réunions culturelles ou de vacances – huit voyages en Afrique. Nous nous apprêtions, pour ce documentaire à partir au Kenya pour un neuvième départ en Afrique. C’est peu dire que le continent africain ne cesse de nous attirer à lui à travers tant de ses pays : au Rwanda nous sommes partis, dans le cadre d’un programme de préservation animale, sur la piste des Gorilles ; en Tanzanie nous avons rencontré Martin Mhando, directeur du Zanzibar International Film Festival, en Afrique du Sud nous avons présenté un séminaire à l’université du Cap. Au Bénin – où nous trouvions pour présenter notre film Candomblé, l’héritage africain (2018) – nous avons réalisé un court métrage sélectionné au Festival Après Varan mention Sur les Traces de Jean Rouch, sélectionné au 37e Festival Vues d’Afrique. Au cours de tous ces voyages nous avons accumulé des centaines de photos et de nombreuses heures de rushes.
Nous avons voulu mêler des images que nous avions tourné en Afrique Australe à celles rapportées du Kenya pour réaliser un documentaire prenant la forme d’une longue lettre écrite à l’auteur des Racines du Ciel.
Les racines du ciel de Romain Gary et la reprise de la chasse en Afrique
En avril 2021 le Zimbabwe a annoncé la vente de cinq cents permis de chasse pour tuer des éléphants. Avant ce pays, le Botswana avait, lui aussi, autorisé une reprise de la chasse en vendant deux-cent quatre-vingt-sept permis de tuer. Une nouvelle manne financière pour ces pays. En lisant les articles évoquant ces tristes nouvelles nous remarquions que les arguments avancés étaient les mêmes que ceux dénoncés par Romain Gary dans Les racines du ciel : la population d’éléphants se multiplierait et mettrait les populations humaines en danger. Pourtant force est de constater que leur territoire ne cesse de se rétrécir et que leurs rôles dans l’écosystème est majeur. Est-il encore nécessaire aujourd’hui de rappeler que les éléphants sont présents dans la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature des animaux en danger d’extinction ?
Le malaise ressenti à la lecture des articles nous donna envie de relire Romain Gary et de voir dans son texte un appel brulant lancé au présent. Nos différentes recherches sur Internet concernant les programmes de protection des éléphants nous a conduit à découvrir le Sheldrick Wildlife Trust et ses campagnes de parrainages et d’offres d’adoption d’éléphanteaux sauvés de la mort à la suite de la perte de leurs mères, victimes de braconnages et de conflits divers.
L’adoption de Kinyei, un éléphanteau
Le 12 avril 2021, nous avons alors adopté un éléphanteau de deux ans, Kinyei dont la mère avait été abattue. Au moment de son sauvetage Kinyei errait dans le bush – cet arrière-pays de la savane - non loin d’un groupe de lions. L’adoption nous permettait de suivre de près son développement par mails et vidéos. Recevoir chaque mois des nouvelles de notre éléphanteau, le sentir joyeux dans la nursery de Nairobi avec ses autres petits camarades, nous réjouissait au plus haut point ! En contact avec Ithumba Camp – camp en lien avec l’unité dans laquelle les éléphants plus grands se trouvaient avant un nouveau départ pour la vie sauvage – nous nous sommes décidés à partir à la rencontre de Kinyei, des autres éléphanteaux et des éléphants d’Ithumba Camp. L’agence française Étendues Sauvages dont la philosophie basée sur la passion et le respect de la nature, était une des agences (peu nombreuses) à proposer un voyage au Kenya comprenant des nuits à Ithumba Camp. Le contact fut pris. Et, intéressés par notre projet de film, l’agence devient un de nos partenaires et soutien financier du documentaire. Les Fonds Fédératifs, l’Université Catholique de Lille ainsi que l’événement culturelle Lille3000 s’associeraient également à l’existence, la production ou la diffusion du film. Notre amour pour les éléphants a déterminé le désir de film. Grâce à ce voyage avec Étendues Sauvages et le Sheldrick Wildlife Trust nous savions que nous pourrions les approcher et les regarder vivre. Il ne s’agirait pas d’un safari photo où on s’amuse à compter les animaux – les fameux Big Fives – que l’on a aperçu de sa jeep au toit ouvrant. Il s’agissait pour nous d’autre chose. Tout autre chose. Nous voulions nous mettre dans la peau de Morel et de Minna, les personnages de Romain Gary et nous livrer à notre besoin d’être avec éléphants, de dire notre affection pour eux et de faire quelque chose de concret pour leur sauvegarde. Dans le cadre du projet de film nous voulions inviter ceux qui regarderaient nos images à être à nos côtés, les associer également à la contemplation de la nature. La nature, cet objet qui occupe nos esprits de façon récurrente dernièrement. Pourtant l’objet n’est pas nouveau : depuis les années soixante-dix3 les liens entre éthique et environnement produisent de nombreuses considérations scientifiques et citoyennes. À travers le documentaire, nous souhaitions mettre en exergue les « valeurs » de la nature4 et notamment l’idée que les animaux ont une valeur ontologique et de ce fait nous ne pouvons chercher sans cesse à les dominer et à les soumettre à notre service. Regardons-les. Regardons-les dans cette nature qui est leur écosystème et respectons-les. Toute vie est fragile. En son début, le documentaire contient une vague allusion à une inquiétude qui me traverse depuis maintenant quelques années : « maintenant que mon temps me semble compté ». Peut-être faut-il avoir une aigue conscience de sa propre finitude pour trouver dans l’éblouissement de toute vitalité – quel que soit sa forme – matière à se réjouir.