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L'Ethnographie

La Fête populaire des Rats d’Arras : Du défilé de reconstitution historique et des géants processionnels, au théâtre satirique et banquet gargantuesque

Broadcaster of a satirical street theater festival, where artists and audiences reclaim the history of the city of Arras and its heritage

Amandine Mercier

Janvier 2023

DOI : https://dx.doi.org/10.56698/ethnographie.1315

Résumés

De 1987 à 1995, la Fête des Rats d’Arras représente un événement culturel majeur à la fois pour les Arrageois, les collectivités territoriales et les tissus associatifs locaux et participe à la revitalisation de la mémoire patrimoniale. S’il s’agit initialement d’un défilé de reconstitution historique, ponctué d’une parade des géants et de banquets, la Fête des Rats s’inscrit progressivement dans des axes de réflexions politiques, où l’espace public est envisagé tant comme un espace de rassemblement festif que comme celui d’une résistance. Cette dimension nouvelle se manifestera notamment par le déploiement d’un festival de théâtre de rue satirique, où artistes et publics se réapproprient l’Histoire de la ville d’Arras et son patrimoine.

From 1987 to 1995, the Festival of the Rats of Arras was a major cultural event for residents of Arras, municipality and local associations and participated in the revitalization of heritage memory. If it was initially a historical parade, punctuated by a parade of giants and banquets, the Festival of the Rats became part of the axes of political reflection, where the public space is indicated as much as a festive gathering space than that of a resistance. This new dimension is manifested in particular by the

Texte intégral

1La question du patrimoine est sans conteste corrélée aux enjeux des politiques culturelles du territoire, qui s’incarnent dans des actions contestataires portées par des associations locales. D’abord défilé de reconstitution historique, puis festival de théâtre de rue satirique, ponctué de banquets gargantuesques, la Fête des Rats d’Arras interroge, par la multiplicité de ses incarnations, l’espace public qui devient un espace de rassemblement festif et d’occupation politique de résistance à la ruine, voire à la perte du patrimoine culturel immatériel local, et au pouvoir qui détermine les orientations des politiques culturelles du territoire. Par réappropriations créatives de ce qui constitue le patrimoine arrageois, c’est-à-dire à la fois par la reconnaissance d’un patrimoine « à soi » — dont le concept est défendu par Alban Bensa1 et Daniel Fabre2 —, l’affirmation d’un patrimoine porté par les émotions et dont la population est incarnation3, la légitimation des cultures populaires et l’annihilation de l’opposition hégémonique avec celles savantes — principes questionnés par Pierre Bourdieu4 et Robert Muchembled5 — et enfin la « fictionnalisation du monde6 » selon Marc Augé, la population contribue tant au revivalisme mémoriel qu’à une critique sociale et politique. Cette étude de cas répondra aux problématiques suivantes : comment l’écriture ou la réécriture de l’Histoire d’Arras engage-t-elle une dynamique à la fois revitalisante de la mémoire patrimoniale ? Comment les tissus associatifs locaux s’emparent-ils de ces pratiques festives pour constituer une critique des politiques culturelles territoriales ?

L’histoire d’A Rats

2La Fête des Rats ravive les mémoires individuelles et collectives liées aux patrimoines culturels immatériels, en premier lieu car sa poïétique obéit à la retranscription de l’Histoire de la ville d’Arras7. Les racines du titre de cet événement, ses déploiements, formes et enjeux, témoignent ainsi de traces historiques remontant au Ier siècle avant J.-C.8. Sous les Atrébates, peuple celte de la Gaule Belge, «  Arras  » se nomme «  Nemetacum  » et est un oppidum de l’Atrébatie, correspondant actuellement à l’Artois. Au XIIe siècle apparaît l’appellation «  Arras  », par contractions successives du nom d’«  Atrébates  », lui-même réduit à «  Atrades  », puis «  Atradis  », ensuite «  Aras  » et enfin «  Arras  », tel qu’orthographié aujourd’hui. Nonobstant les rumeurs véhiculées, l’origine du nom de la ville d’Arras n’est donc aucunement liée à la présence en nombre des rongeurs, que sont les rats, sur le territoire artésien. Toutefois, la corrélation entre le nom de la ville et l’animal est tacite, bien que plus tardive. En effet, le «  s  » d’Arras étant autrefois une lettre muette, la prononciation n’était pas «  Arras  » (prononciation API : \a.ʁɑːs\), mais «  Arra  » (prononciation API : \a.ʁɑ\), devenue progressivement «  A Rats  » dans le langage populaire et l’imaginaire collectif. C’est pourquoi, dès le XIVe siècle, des rats sont représentés aux côtés du lion, symbole officiel de la commune d’Arras, sur les sceaux de la ville. Dès 1331, les rats apparaissent également dans les attributs de l’Évêché d’Arras. Progressivement dans le dialecte local, «  les rats  » deviennent une métaphore pour parler des Arrageois, c’est-à-dire les habitants de la ville d’Arras.

3Bien qu’en 1526, le Traité de Madrid subordonne la ville d’Arras aux Pays-Bas espagnols, les guerres entre François Ier et Charles Quint, qui se disputent l’Artois, continuent jusqu’en 1547, c’est-à-dire jusqu’au décès de François Ier. En 1579, l’Union d’Arras confirme sa loyauté au roi d’Espagne. Par conséquent, dès le XVIe siècle, l’atelier monétaire de Philippe II d’Espagne choisit de faire figurer des rats sur sa monnaie. Dès lors, l’image du rat s’échange par les transactions, se diffuse et s’ancre dans les esprits. Alors, l’imaginaire lié au rat d’Arras, devient imagerie, puis symbole obéissant à un processus de patrimonialisation, si bien qu’aujourd’hui encore, des rats sont représentés dans toute la ville d’Arras, comme cela est le cas sur le toit de la cathédrale Notre-Dame de l’Assomption et de Saint-Vaast, dans les moulures de la façade de l’hôtel de ville et du Beffroi, sur les clous de la Place des Héros, sur les blasons de la ville ou encore dans de nombreuses enseignes commerçantes de la commune. Subséquemment, la fête populaire d’Arras, créée pour le peuple arrageois et progressivement par lui, rend hommage à ce symbole fort de l’histoire de la ville et de ses habitants, en s’intitulant Fête des Rats. À cela s’ajoute une réappropriation anecdotique historique et sarcastique, datant de 1640, que mettra en lumière la première Fête des Rats.

La Fête des Rats (1987-1992) : à bon chat bon rat

4Alors que les troupes de Louis XIII pénètrent dans la cité artésienne, toujours espagnole, pour l’assiéger, ils découvrent une inscription dédaigneuse, laissée par les hispaniques, sur la porte de Baudimont de la ville d’Arras, et réintroduisant le bestiaire historique, à savoir : «  Quand les François prendront Arras, les souris mangeront les chats  ». «  Ratón  » signifiant «  souris  » en espagnol, son usage caractérise les Hispaniques et leur peuple, comprenant à cette époque les Arrageois soit les ratons, alors que les chats désignent les Français. Outragés, ces derniers répondent par la provocation lors du siège de la ville en effaçant la lettre «  p  » pour que soit désormais inscrit : «  Quand les François rendront Arras, les souris mangeront les chats  ». Depuis cette date, la commune d’Arras est restée française. Or, la toute première Fête des Rats d’Arras a été créée pour rendre hommage à ce siège victorieux des Français, en mettant en scène cet événement historique et donnant matière à l’expression populaire : «  à bon chat bon rat  », puisqu’il se dit que les Français auraient trouvé un adversaire à leur hauteur en affrontant les Espagnols.

5Ainsi, en 1987, sous l’impulsion de Jean-Marie Prestaux — président de l’Union commerciale d’Arras, vice-président de la chambre de commerce et d’industrie et du syndicat national des associations de commerçants, puis premier adjoint au maire d’Arras Jean-Marie Vanlerenberghe en 1995, candidat à la députation sous étiquette RPR-UDF en 1997 dans la première circonscription, puis en 2012 dans la deuxième circonscription, directeur de l’office du tourisme d’Arras pendant dix ans et vice-président de la Communauté urbaine d’Arras — la Jeune Chambre économique déploie l’idée d’organiser un événement culturel et annuel qui retracerait la frise historique de la ville d’Arras à partir de sa «  reconquête  » par les troupes françaises. Dans un souci de protéger le patrimoine arrageois et de défendre l’imaginaire qui s’est progressivement construit à partir de lui, la Fête des Rats propose à ses prémices un défilé costumé de reconstitution historique. Cette manifestation se place dès lors au croisement de deux formes précédemment plébiscitées et ayant périclités, à savoir les défilés carnavalesques d’Arras et Les Fêtes de Jeanne d’Arc.

6Ces dernières sont de grands défilés historiques contingentés par le grand Évêché et par les associations catholiques d’Arras, entre les deux guerres et l’après-guerre, et ensuite relayés par un défilé carnavalesque. Il ne s’agit toutefois pas d’un carnaval, tradition qui appartient davantage aux Flandres. En Artois, la population n’est composée ni de dockers ni de marins-pêcheurs à qui les armateurs offraient une grande fête — appelée la Foye, qui deviendra le carnaval dans les Hauts-de-France — avant de partir pour six mois de pêche aux harengs en Islande. Les arrageois ne sont pas un peuple de carnaval et préfèrent davantage se mettre au pas de leur porte pour regarder le défilé de reconstitution historique et déambulatoire sur une journée à la Pentecôte, au cours duquel les adultes costumés et les enfants déguisés marchent aux côtés des Géants.

7Ainsi, les premières Fêtes des Rats renouent avec la tradition des géants, élément majeur du patrimoine vivant du Nord de la France, et plus particulièrement du patrimoine agricole et de la richesse de la vie commerciale arrageoise, puisque Jacqueline et Colas, prénoms des deux premiers géants d’Arras, sont des incarnations du métier de maraîcher et de paysanne, tous deux venus d’Achicourt (ville voisine d’Arras) pour vendre leurs récoltes sur la place des Héros d’Arras. Victimes des bombardements des deux guerres — tout comme leurs trois enfants : Robert, Tiot Jean et Tiot Jacques — Jacqueline et Colas sont détruits puis reconstruits en 1981.

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[Fig. 1] Géants Jacqueline et Colas à la Place de l’Ancien Rivage. © Médiathèque d’Arras.

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[Fig. 2] Géants Jacqueline et Colas à la Place du Théâtre © Médiathèque d’Arras.

8En 1955, ils sont rejoints par Come l’Atrébate, héros de Nemetacum et géant malheureusement perdu aujourd’hui, puis en 1995, par leur fils Dédé. Les membres de la plus ancienne association locale, à savoir celle des joutes nautiques d’Arras, reconnues comme patrimoine culturel immatériel par le ministère de la Culture, en sont les gardiens et les accompagnent pendant leurs processions, à la fois lors des manifestations festives et représentations rituelles, les fêtes populaires et les cortèges laïcs. Ainsi, pendant les Fêtes des Rats, entourés de fanfares et d’un cortège d’Arrageois costumés, les géants participent à la mise en scène des histoires de la ville d’Arras dans les rues de celle-ci et en soulignent la dimension traditionnelle et populaire.

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[Fig. 3] Géant Come l’Atrébate à l’Abbaye Saint-Vaast © Médiathèque d’Arras

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[Fig. 4] Géants Jacqueline, Colas, Dédé et Bidasse à la Place des Héros © DEHAY Thierry

Politique-esthétique et revivalisme mémoriel de la Fête des Rats

9L’esthétique des premières Fêtes des Rats s’inspire de la fresque d’Hoffbauer qui orne, sur cinquante mètres de long, la salle des fêtes de l’hôtel de ville du Beffroi d’Arras, depuis 1932, et retrace des scènes de la vie des Arrageois au XVe siècle. Apparaissant dès lors comme support exclusif d’abord de ce que Roland Barthes qualifie d’« inventaire des signes de la communauté »9 et ensuite de ce que Frédéric Maguet identifie comme « image des communautés dans l’espace public »10, cette fresque prend vie en s’animant dans l’espace public et en étant incarnée par la population arrageoise. Celle-ci procède progressivement à une réappropriation individuelle et collective du passé, en garantissant la visibilité du patrimoine culturel immatériel, par des mises en scène de l’histoire et des démonstrations artistiques et populaires publiques, occasionnant de facto un rassemblement de la population autour de ce qui les (ré)unit. De ce fait, si pour les collectivités territoriales et la Jeune Chambre économique, il s’agit de privilégier un revivalisme11 mémoriel (en particulier par le biais du tissu associatif local de reconstitutions historiques, de démonstrations de joutes et de cavaleries, de fanfares et chorales, et de lâchers de pigeons), la population s’approprie cette manifestation et la «  débride » en en transformant la portée et le statut (notamment en y apportant une dimension carnavalesque et festive, par le biais de bals dansants, de banquets et animations déguisées, de retraite aux flambeaux, de rencontres autour de jeux anciens et traditionnels, d’échoppes et marchés artisanaux). Ainsi, la conception et gestion de la Fête des rats changent de structuration politique et donc esthétique — tous deux étant intimement liés comme le considère Jacques Rancière et cela bien qu’il faille dissocier l’« esthétique de la politique » et la « politique de l’esthétique »12 — et alternent entre défilé de reconstitution historique et fêtes populaires, dès 1988 sur les Places du tertre.

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[Fig. 5] Défilé de reconstitution historique © Médiathèque d’Arras

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[Fig. 6] Défilé de reconstitution historique © Médiathèque d’Arras

10Ce basculement s’explique également dans le fait que la Fête des Rats réponde aux politiques culturelles initiées par Jack Lang et s’inscrive dans une forme de démocratisation culturelle. Par ailleurs, la volonté des collectivités territoriales est de créer une importante manifestation culturelle et patrimoniale, capable de concurrencer les autres grands événements de la région, comme les Fêtes de Gayant à Douai ou le Réveil de Cassel, et d’y drainer toute la population locale et régionale. Or, sans coordination d’une personne capable de concevoir une mise en scène harmonieuse, en réponse à la fois au projet culturel et politique13 de la ville et aux aspirations de sa population, la Fête des Rats perd en lisibilité, pertinence et reconnaissance. N’obéissant plus à un principe de concordance et d’unité, elle ressemble davantage à un événement composite, où plusieurs animations disparates sont mises bout à bout, sans cohérence ni cohésion. Si jusqu’à présent, les communautés patrimoniales associatives et les troupes culturelles locales accompagnaient ce déploiement et en assuraient la pérennité, elles se désengagent progressivement et les publics sont de moins en moins nombreux.

11C’est pourquoi, Catherine Génisson, conseillère municipale puis adjointe chargée des affaires culturelles de la ville d’Arras octroie à Max Gaillard, nouvellement nommé Directeur du Théâtre d’Arras, la responsabilité d’organiser la Fête des Rats de la saison 1991. Celui-ci demande au metteur en scène Didier Fusillier de penser et coordonner un spectacle déambulatoire, impliquant tant des comédiens professionnels que des figurants arrageois, et mettant en valeur le patrimoine de la ville. Est alors créé le spectacle Terra Terra, joué devant et dans le Beffroi de la ville et incorporant le patrimoine dans des techniques participatives des arts de rue. Si le public adhère à cette forme, les collectivités locales déplorent le budget conséquent demandé par Didier Fusillier pour sa réalisation. De ce fait, ce partenariat ne sera plus réitéré. L’amorce d’un renouveau dans la manière de créer, concevoir et de participer (à) la Fête des Rats est néanmoins engagée et inspirera son déploiement futur, qui sera entièrement pris en charge par la compagnie du Scénographe, ses membres et bénévoles. Un tournant esthétique et politique s’envisage dès lors qu’il est corrélé à l’arrivée de nouveaux acteurs, que sont les membres du tissu associatif local, dans la dynamique d’héritage, et d’une réappropriation créative du territoire, de son espace et son patrimoine culturel immatériel, par ses habitants et artistes.

La Fête des Rats (1992-1995) : La compagnie du Scénographe comme un rat dans la paille

12En 1990, Luc Brévart, diplômé des Beaux-Arts à Lille et du Fine-Art Institute de Chicago, anciennement directeur et créateur du Quai de la Batterie et dont la famille est arrageoise depuis 1736, réunit un collectif d’artistes scénographes, plasticiens, comédiens, musiciens et circassiens et crée la compagnie du Scénographe. Partenaire des Ateliers de la Halle, elle se consacre aux techniques de l’estampe et leur apprentissage, et à la production de livres d’artistes. Elle se spécialise en scénographies d’extérieur, en théâtre de rue et performances et axe ses travaux sur la création de machineries et de décors monumentaux, sur la conception de costumes d’époque, sur la réalisation vidéo, sur le son et la pyrotechnie. Cela explique pourquoi, à partir de 1992, la Fête des Rats sera le lieu de rencontre entre toutes ces disciplines.

13Dès 1988, Luc Brévart et ses camarades se placent au cœur de l’impulsion créatrice et fédératrice de la Fête des Rats en proposant de petites formes de rue théâtralisées, car, dit-il : «  J’aimais faire la fête comme tout bon flamand qui se respecte. J’aimais me déguiser. J’aimais la folie de la fête. De fil en aiguille, j’ai donc participé aux fêtes des rats14  ». Cette même année, le collectif de Luc Brévart participe à cet événement en tenant un stand de mises en scène photographiques d’antan. Costumés dans l’esprit des années 1900, parés d’anciens appareils photographiques de cette époque et au volant d’une voiture de collection, les membres du collectif arpentent les places de la ville d’Arras et invitent les passants à se costumer, se mettre en scène et se prendre en photographie avec un flash à magnésium. Le désir de Luc Brévart est de pouvoir capturer, autrement, d’immenses images et scènes de vie selon un spectre large et neuf, tout comme devait le faire le scénographe : appareil photographique géant pensé à cet effet mais jamais physiquement construit. Par cette forme interactive, de rue et de réappropriation historique par l’espace public, le public traverse ainsi des imaginaires individuels et collectifs, dans lesquels il est acteur et par lesquels il porte un autre regard sur la ville d’Arras et son patrimoine.

14Si lors de cette saison, Luc Brévart et ses proches n’avaient pas d’entité constitutive et associative et se définissaient alors comme des bateleurs de rue jouant avec les passants, l’année suivante, ils participent à la mise en scène et à la création scénographique de la reconstitution historique du bicentenaire de la Révolution. En 1990, il crée la compagnie du Scénographe et s’engage davantage dans les Fêtes des Rats en réinventant, à chaque saison de nouvelles scènes, décors et costumes et en accentuant la dimension interactive de ces propositions théâtrales. Celles-ci déploient une telle ferveur que dès 1992, Catherine Génisson et Max Gaillard confient à la compagnie l’organisation et la coordination de la Fête des Rats, ce qu’elle fera jusqu’à la dernière saison de l’existence de cette fête.

15La compagnie du Scénographe y propose un cycle rabelaisien sur trois années. Les 7 et 8 juin 1992, elle crée et représente d’abord Le Conte du Saint Élixir, écrit par Luc Brévart en s’inspirant entre autres de la quête du Graal, des romans de Renard, des écrits de Chrétien de Troyes, de Rutebeuf et de ceux Rabelais. Les 22 et 23 mai de l’année suivante, la compagnie met en scène la suite de ce conte avec Le Très Grand Voyage de Porcival. Enfin, du 21 au 23 mai 1994, elle organise le 500e anniversaire de Rabelais, événement dont la devise est la suivante : «  Les Arrageois font la fête pour les Arrageois  », et qui résume le cœur de la démarche et des enjeux renouvelés de la Fête des Rats.

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[Fig. 7] Plaquette de présentation de Le Conte du Saint Élixir © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1992

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[Fig. 8] Plaquette de présentation de Le Très Grand Voyage de Porcival, © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1993

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[Fig. 9] Plaquette de présentation 500e anniversaire de Rabelais © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1994

16Pour chacune des éditions, la compagnie du Scénographe métamorphose la ville d’Arras qui prend alors des allures de tableaux de Bruegel et invite le public à se réapproprier l’espace public par les manifestations culturelles et patrimoniales. Dans la cour du Beffroi, sur la place de la Vacquerie, aux abords de l’hôtel de Guînes, sur les parkings de l’Abbaye Saint-Vaast, dans les rues de la ville, elle y propose des déambulations, performances de jonglerie et pyrotechnie, et des spectacles « médiévalo-rabelaisiens » ainsi qualifiés par Luc Brévart et s’apparentant au théâtre de tréteaux, durant lesquels une animalerie, composée d’ânes, de cochons, de poules, de moutons et renards, se mêle à la foule de spectateurs.

17Chaque Fête des Rats se clôture sur une soirée festive et un banquet dansé et gargantuesque, où sont servis moutons et porcelets rôtis, tripailles et boudins, saucisses et pâtés de viande, pois cassés, fèves et haricots, énormes pains de céréales et gâteaux de pommes. La valorisation du patrimoine agricole, défendu par les premières Fêtes des Rats, se poursuit par l’organisation de ces « ripailles » dont les produits de consommation sont tous issus de l’agriculture locale. De plus, la dynamique du banquet permet de renouer à la fois avec le caractère populaire de ces manifestations et avec l’esprit médiéval des reconstitutions historiques des premières Fêtes des Rats. En effet, au Moyen-Âge, cette pratique était régulière pour célébrer collectivement des événements marquants de la vie de la cité, comme l’avènement d’un souverain, la naissance d’un prince, la victoire sur l’ennemi, ou tout simplement la fin des moissons ou l’an nouveau. Par ailleurs, plus que le festin, c’est le partage de la table qui compte dans la Fête des Rats et la convivialité du moment. Luc Brévart renoue ainsi avec une certaine gastronomie politique, entendue dans son sens étymologique. Le tissu associatif local, représenté par la compagnie arrageoise du Scénographe, s’engage dès lors dans une dynamique de revitalisation de la mémoire patrimoniale via la réécriture de l’Histoire d’Arras mise en scène par le rassemblement festif des banquets. Toutefois, l’enjeu premier ne réside plus en ce postulat, mais tend à faire de l’espace public, un espace rebelle de résistance en usant d’une forme de théâtre satirique, et ouvrant ainsi la possibilité d’une critique des politiques culturelles territoriales.

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[Fig. 10] Photographie des banquets © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1992

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[Fig. 11] Photographie des banquets © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1992

Théâtre satirique et espace public de la Fête des Gras

18Les « fabriques » du patrimoine encouragent tant la dimension créative, que celle subversive et politique, et se manifestent par l’interdisciplinarité, la friction de différents genres artistiques et la relation au public. Ainsi, l’esthétique du rire et du théâtre de tréteaux, l’ironie mordante, le texte satirique, le corps grotesque, la voix critique et le dispositif participatif, prônés par la compagnie du Scénographe, s’exposent dans les rues et lieux touristiques de la ville d’Arras et contribuent à rendre l’espace public propice à la satire politique.

19Les nouvelles Fêtes des Rats conduisent ainsi le public dans un univers proche de celui des Monthy Python et de Mel Brooks, outre celui rabelaisien. Costumés, munis d’un Graal (qui n’est autre qu’un bock à bière), d’une écuelle et d’une cuillère en bois, les spectateurs sont invités à déambuler dans la ville d’Arras et à suivre l’« épopée » du personnage de Porcival en quête du Saint-Elixir, d’après la fable du texte dramatique écrit par Luc Brévart, durant trois années successives dont chacune se clôture par un banquet.

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[Fig. 12] Photographie de Porcival et les Moines gras © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1992

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[Fig. 13] Photographie de Porcival sortant des latrines © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1992

20Dans le premier cycle rabelaisien imaginé par la compagnie du Scénographe, la fée Stella, nom emprunté à la marque de bière, révèle au protagoniste principal Porcival, nouvellement élu par les cieux, sa mission : partir à la recherche du monastère des Patristes et ramener le secret de production du Saint-Elixir (c’est-à-dire de la bière) pour rapporter la joie de vivre dans la cité. Après maintes péripéties, Porcival retrouve le père Maximilien de Renversebière, découvre le Saint-Elixir et le partage avec le peuple à son retour. Le Saint-Elixir ayant tendance à faire enfler la panse des mortels, le seigneur Elon Boitout (qui n’est autre que le nom travesti et satirique de Léon Fatous, Maire d’Arras de l’époque) décrète que sa consommation sera exclusivement réservée aux festivités ayant lieu à chaque Platdecôte (et non-Pentecôte), c’est-à-dire à la Fête des Gras (nom grivois de La Fête des Rats dans la fable jouée). La réalité se mêle ainsi à la fiction du Saint-Elixir et cette dernière permet de proposer une satire de la vie locale, d’en parodier la politique, voire d’inverser l’organigramme hiérarchique des responsables territoriaux, en usant de la caricature nominale. Comme se questionne Mikel Dufrenne, « peut-être l’esthétisation de la politique prendrait-elle alors un sens plus précis : la réhabilitation du jeu, qui fait jouer jusqu’à craquer les institutions, ne signifierait pas l’exaltation de l’intensité, mais une certaine exigence utopique de justice15 ». Ainsi Léon Fatous, Maire de la commune d’Arras, devient «  Elon Boitout  » dans la fable théâtrale  ; Robespierre, figure emblématique de la Révolution française et de la ville d’Arras, est remplacé par «  Renversebière  »  ; Catherine Génisson, Conseillère municipale puis adjointe chargée des affaires culturelles de la ville d’Arras, s’illustre parodiquement en «  Taquine des Nichons  »  ; Max Gaillard, Directeur du Théâtre d’Arras, devient «  Mac Braillard  »  ; Annick Monté, conservatrice du Musée des Beaux-Arts, se nomme «  Panier Caustère  » dans la pièce  ; enfin Jean-Marie Vanlerenberghe, Maire de la commune d’Arras à partir de 1995, puis sénateur UDF et vice-président de la commission des Affaires sociales, se voit épingler le nom de «  Valeureux Bègue  ». Par cette ruse dramatique et langagière patronymique, la compagnie du Scénographe renoue ainsi avec les traditions premières carnavalesques, en tournant en dérision l’image des personnalités politiques locales et du pouvoir dont elles disposent. Le dramaturge Luc Brévart ravive ainsi « l’indestructible vitalité dans la langue16 » défendue par Mikhaïl Bakhtine dans L'Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen-Age et sous la Renaissance et, par usage de ce que ce dernier nomme les « grossièretés17 », il assure la création d’un « grand corps populaire de l'espèce18 » et réaffirme « qu'en réalité le principe de la fête populaire et du carnaval est indestructible19 ».

21Toutefois, même si satire il y a, les élus municipaux font toujours figure d’autorité en imposant l’année suivante une contrainte thématique de la Fête des Rats. L’arrivée du Train à Grande Vitesse à Arras, coïncidant à une semaine près avec les dates de la Fête des Rats, ils y voient l’opportunité d’y célébrer cet événement, en y associant les seize communes du territoire concernées par cette nouvelle mobilité. De ce fait, cette année-là, les festivités prennent une ampleur exceptionnelle et se rassemblent sous cette thématique commune : celle du TGV. Luc Brévart choisit d’user d’une stratégie du détour en contournant la règle thématique imposée, plus précisément en prenant le contre-pied des initiales proposées, puisque Porcival part cette saison pour le TGV certes, mais c’est-à-dire pour Le Très Grand Voyage. De même, la compagnie du Scénographe participe au défilé de chars futuristes, initialement créés à partir de chars à voile, mais avec un char à moines. Une dizaine de moines corpulents, suants, puants et braillards, comparables aux personnages gargantuesques et pantagruéliques de Rabelais, sont ainsi tirés par le seigneur local, à savoir Elon Boitout, accompagné de ses conquêtes féminines. Bien que d’une ampleur et renommée moindre, la parade des chars allégoriques de la Fête des Rats en 1993 s’apparente ainsi à celles des carnavals de Viareggio ou Nice20, célèbres pour leurs caricatures gigantesques de personnages politiques, et crée autant de polémiques que de subversions. Le lendemain du défilé, le public est invité à la Grande Messe commémorative du TGVeum qui s’apparente à un blueso gospolo grégorien médiéval glorifiant et retraçant l’aventure de Porcival.

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[Fig. 14] Photographie de la scénographie du TGV de Porcival derrière le Beffroi © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1993

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[Fig. 15] Photographie du char à moines © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1993

22L’année 1994 marque le 500e anniversaire de Rabelais et la fin du cycle rabelaisien pendant la Fête des Rats. Pour cette occasion, la compagnie du Scénographe présente la comédie musicale Non, Monsieur Rabelais n’est pas mort !, sur La Grand’Place d’Arras. Ce spectacle rassemble des chœurs de faux moines et nones, dans l’esprit des Carmina Burana, et représente l’affrontement de Stella et Bacchus, devant un public forcé de prendre parti pour l’un ou l’autre de ces personnages en vue de l’épilogue du lendemain soir. Du buveur de vin ou du buveur de bière qui triomphera ? Seul le public en est juge. Bien que le vote sollicité par la compagnie du Scénographe pour départager Stella et Bacchus ne soit que fictionnel, le public est invité à renouveler une forme de citoyenneté en étant appelé à faire vivre le débat démocratique. Plus qu’une représentation théâtrale, il s’agit d’un engagement culturel renouant avec son essence politique, sous couvert d’une ironie grinçante, puisque tout cela se déroule sous les yeux d’un géant géantissime représentant un Gargantua assis sur scène, entre-jambes visibles, desquelles sortent les interprètes en poussant la braguette.

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[Fig. 16] Photographie des comédiens devant Gargantua © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1994

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[Fig. 17] Photographie des comédiens devant Gargantua © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1994

23En 1995, la compagnie du Scénographe choisit de fêter le 100e anniversaire du cinéma en construisant un gâteau de 25 m de diamètre et de 10 m de hauteur. Durant toute l’année, des bénévoles arrageois, réunissant des habitants, des membres d’associations locales et divers corps de métiers, mutualisent leurs savoir-faire pour créer ensemble la scénographie du gâteau d’anniversaire. Entre glanage, bricolage et artisanat, ils remplacent la chantilly par de la mousse carbonique, les cerises par des ballons et les bougies par des néons lumineux, et construisent ensemble ce gâteau sur trois niveaux, représentant trois décors différents, qui serviront ensuite d’espaces de tournages d’extraits de dix films. Ainsi, le processus de création de cette saison de la Fête des Rats répond à une dynamique collaborative et participative, dans laquelle chaque personne s’implique par la praxis. Le spectateur futur est, avant même d’occuper ce statut, considéré comme acteur de la représentation future, puisqu’il s’est engagé dans sa conduite concrète.

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[Fig. 18] Photographie du sommet du gâteau d’anniversaire scénographique devant le Beffroi © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1995

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[Fig. 19] Photographie en vue aérienne de l’espace scénique, Place des Héros © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1995

24La Fête des Rats s’illustre ainsi comme un festival d’arts de rue, s’inscrivant dans le cadre des politiques de développement patrimonial et de démocratisation culturelle du territoire de l’Artois, en garantissant une relation interactive entre artiste, population et acteurs locaux. Pour cette dernière saison, quinze artistes (4 comédiens, 4 artificiers, 3 comédiens-techniciens et 3 réalisateurs, dont le québécois Mocel Villani), sont enfermés ensemble dans le gâteau d’anniversaire, scénographie géantissime située sur la Grand’Place, et, pendant cent heures, expérimentent un laboratoire créatif en jouant et tournant sur les différents niveaux du gâteau et en direct pour le public des scènes de Méliès, Chaplin, les premiers films fantastiques : Dracula, Docteur Jekyll, Frankenstein, Pagnol, Hôtel du Nord, Fric-Frac, la partie de cartes de Marius, etc. Malheureusement, cette dernière représentation de la compagnie n’a pas eu le succès escompté, en particulier car la météo peu clémente a rendu le jeu et la réception difficile et le public a boudé cette nouvelle forme.

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[Fig. 20] Photographie des comédiens en tournage © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1995

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[Fig. 21] Photographie des comédiens en tournage © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1995

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[Fig. 22] Photographie des comédiens en tournage © Régis DERISBOURG, Cie du Scénographe, 1995

25Pour conclure, alors que «  la fête avait atteint une renommée régionale, équivalente à celle des fêtes de Gayant aujourd’hui21  » confie Luc Brévart, en réunissant chaque année des milliers de spectateurs, les élections municipales de 1995, conduisant au changement du parti au pouvoir, ont mis fin à ces festivités, et par conséquent à La Fête des Rats. Le socialiste Léon Fatoux, Maire sortant, laisse sa place à Jean-Marie Vanlerenberghe dont le souhait est d’affirmer une nouvelle identité en faisant notamment fi des événements passés. En outre, comme l’explique Chiara Bortolotto : « La production du patrimoine n’est pas conçue simplement comme une production de connaissance mais aussi comme l’expression d’un pouvoir. En choisissant de transmettre certains éléments culturels au détriment d’autres, les interventions patrimoniales, souvent considérées comme éminemment techniques ou scientifiques, conditionnent les représentations identitaires des groupes sociaux et font apparaître leur dimension sociale et politique »22. Bien qu’en 1999, se crée l’« Association pour la fête des rats  », dont l’objet est de «  recréer et perpétuer une fête populaire liée au patrimoine arrageois  », la Fête des Rats n’aura plus jamais lieu. Comme le résumé bien Dorothy Noyes, « devant cette délégation de la fête aux professionnels, le peuple se retire, c’est-à-dire la communauté dont dépend par définition une fête populaire »23. Depuis, ni les carnavals d’Arras, ni les sorties des Géants, ni même la fête, pourtant très populaire, de l’Andouillette n’ont pu reproduire la ferveur festive et mémorielle de la Fête des Rats, ni garantir un événement culturel, artistique et patrimonial de cette qualité et rassembler les habitants, les artisans et les acteurs locaux en un lieu de convivialité, rencontre et partage, où la parole et les imaginaires sont libérés en l’espace public. Ce à quoi, dix ans plus tard, Luc Brévart répondra ironiquement : «  Ça ne veut pas dire grand-chose, surtout 20 ans après. Les attentes et le contexte ne sont pas les mêmes. La législation a changé aussi. Après, c’était mon métier, c’était donc mieux avant, parce que je le faisais. Le contraire serait me dénigrer »24 . Il n’en reste pas moins vrai que le caractère populaire, subversif, social et politique de la Fête des Rats d’Arras s’est progressivement confirmé, bien que tue initialement. Or, comme le remarque Jacques Rancière dans Politique et esthétique : « C’est l’affirmation qui met de la politique là où la politique est niée »25. Alors, le théâtre satirique et le banquet gargantuesque, consistant « à reconfigurer le partage du sensible qui définit le commun d'une communauté, à y introduire des sujets et objets nouveaux, à rendre visible ce qui ne l'était pas et à faire entendre comme parleurs ceux qui n'étaient perçus que comme animaux bruyants »26, sont à la fois porteurs et producteurs d’esthétique et de politique.

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Notes

2 FABRE Daniel, « L’ordinaire, le familier, l’intime… Le patrimoine loin du monument », Cl. Voisenat et Chr. Hottin (dir.), Le Tournant patrimonial. Paris, édition de la Maison des Sciences de l’Homme, 2016.

3 Daniel Fabre précise qu’il ne s’agit plus d’attester que « le patrimoine, c’est à nous », mais plutôt que « le patrimoine, c’est nous ». FABRE Daniel, « Le patrimoine porté par l’émotion », in Émotions patrimoniales, Paris, édition de la Maison des Sciences de l’Homme, 2013, p.17.

4 BOURDIEU Pierre, La Distinction. Critique sociale du jugement de goût, Paris, éditions Minuit, 1979.

5 MUCHEMBLED Robert, Culture populaire et culture des élites dans la France moderne (XVe-XVIIIe siècles), Paris, éditions Flammarion, 1978.

6 AUGE Marc, L’impossible voyage. Le tourisme et ses images, Paris, éditions Payot & Rivages, coll. Rivages poches/Petite Bibliothèque, 1997, p.165.

7 DEHAY Thierry, VASSEUR Delphine, La Grande Reconstruction, Arras, la ville nouvelle à l'époque Art déco, Arras, éditions Degeorge, 2018.

8 BOUGARD Pierre, NOLIBOS Alain, Le Pas-de-Calais de la Préhistoire à nos jours, Saint-Jean-d'Angély, éditions Bordessoules, coll. « L'Histoire par les documents », 1988.

9 BARTHES Roland, Mythologies, Paris, éditions du Seuil, 1957 ; rééd. augmentée, 2010.

10 MAGUET Fréderic, « L’image des communautés dans l’espace public », in BORTOLOTTO Chiara (éd.), Le patrimoine culturel immatériel, enjeux d’une nouvelle catégorie, Paris, éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, 2011, p.48.

11 L’emploi de « revivalisme » est ici emprunté à François Gasnault, conservateur général du patrimoine et historien, chercheur à l’Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain, dans son article : « Mouvement revivaliste et patrimoine culturel immatériel : appropriation ou évitement ? », In Situ [En ligne], n.33, 2017.

12 RANCIERE Jacques, Le partage du sensible : Esthétique et politique, Paris, éditions La Fabrique, 2000.

13 NOYES Dorothy questionne la relation entre le régime politique et le régime culturel dans « La fête ou le fétiche, le geste ou la gestion. Du patrimoine culturel immatériel comme effet pervers de la démocratisation », in BORTOLOTTO Chiara (éd.), Le patrimoine culturel immatériel, enjeux d’une nouvelle catégorie, op. cit., p.125.

14 Entretien personnel réalisé en 2019.

15 DUFRENNE Mikel, « Une esthétique libidinale ? », in Esthétique et Philosophie, t. II, Paris, éditions Klincksieck, 1976, p.84.

16 BAKHTINE Mikhaïl Mikhaïlovitch, L'Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen-Age et sous la Renaissance, Paris, éditions Gallimard, 1970, p.153.

17 Ibid., p.37.

18 Ibid., p.96.

19 Ibid., p.43.

20 Cf GAUTHARD Nathalie, « Les avatars de carnaval », Fêtes, mascarades, carnavals. Circulations, transformations et contemporanéité, (Nathalie Gauthard dir.), éditions L’Entretemps, coll. « Les Anthropophages », 2014.

21 Entretien personnel réalisé en 2019.

22 BORTOLOTTO Chiara, « Introduction », in Le Patrimoine culturel immatériel. Enjeux d’une nouvelle catégorie, op. cit., §28.

23 NOYES Dorothy, « La fête ou le fétiche, le geste ou la gestion. Du patrimoine culturel immatériel comme effet pervers de la démocratisation », in BORTOLOTTO Chiara (éd.), Le patrimoine culturel immatériel, enjeux d’une nouvelle catégorie, op. cit., p.140.

24 Entretien personnel réalisé en 2019.

25 RANCIERE Jacques, « Politique et esthétique. Entretien réalisé par Jean-Marc Lachaud le 30 novembre 2005 », Actuel Marx, 2006, n° 39, p.193.

26 RANCIERE Jacques, Malaise dans l'esthétique, Paris, éditions Galilée, 2004, p.38.

Pour citer cet article

Amandine Mercier, « La Fête populaire des Rats d’Arras : Du défilé de reconstitution historique et des géants processionnels, au théâtre satirique et banquet gargantuesque », L'ethnographie, 8 | 2023, mis en ligne le 15 janvier 2023, consulté le 27 avril 2024. URL : https://revues.mshparisnord.fr/ethnographie/index.php?id=1315

Amandine Mercier

Amandine Mercier est Maîtresse de conférences en Arts de la scène et du spectacle vivant, de l’Université d’Artois-Pôle Arras. Elle est membre de l’équipe «  Praxis et Esthétique des Arts  », Laboratoire Textes et Cultures (EA 4028). Le premier volet de ses recherches s’attache aux dialogues des arts et aux orientations majeures d'une scène considérée comme lieu de fabrique des origines en tant qu’espace de l’ob-scène. Le deuxième volet de ses recherches porte sur les politiques culturelles alternatives d’innovation culturelle et sociale.