La texture en informatique musicale symbolique
Florence LevéDOI : https://dx.doi.org/10.56698/rfim.841
Résumés
Résumé
Si la texture est très présente dans l’analyse de musiques contemporaines et la conception sonore, elle est encore peu utilisée en analyse musicale computationnelle, d’autant plus dans un cadre symbolique. Cet article, synthétisant ma présentation faite lors des JIM 2023, se concentre sur la texture symbolique, que l’on peut encore appeler texture compositionnelle. Il s’appuie sur divers travaux réalisés depuis 2014 avec plusieurs collaborateurs sur la modélisation de la texture dans le cas des quatuors à cordes, de la musique symphonique et de la musique pour piano.
Abstract
If texture plays a prominent role in the analysis of contemporary music and sound design, its utilization remains limited within computational music analysis, particularly within a symbolic framework. This article, synthesizing my presentation at the JIM 2023 conference, focuses on symbolic texture, alternatively referred to as compositional texture. It draws upon various studies conducted since 2014 in collaboration with multiple partners, addressing the modeling of texture in string quartets, symphonic music, and piano compositions.
Index
Index de mots-clés : texture, musique symbolique, analyse musicale computationnelle.Index by keyword : texture, symbolic music, computational music analysis.
Texte intégral
1. Notion de texture symbolique (ou texture compositionnelle)
1.1 Définitions
1Le terme texture se retrouve sous des sens différents selon les contextes et les objets du quotidien auxquels il se réfère (Figure 1). Il peut s’agir des « modes d’entrecroisement de fils de tissage », de la « constitution générale d’un matériau solide » ou encore de l’« arrangement, [de la] disposition des parties d’un ouvrage » (dictionnaire Larousse en ligne). En informatique, notamment en traitement d’images, on l’associe à la « représentation graphique d’une matière, d’une surface », il peut alors s’agir d’une série de texels répétés de façon régulière sur un échantillon. Dans le domaine audio, la texture évoque tout ce qui se rapporte à la façon dont le son est organisé, ou encore au timbre (on parle parfois de grain sonore, y associant sa rugosité ou son épaisseur).
Figure 1. Texture d’un tissu, d’une image, d’un son.
2Le principe de texture est étroitement lié au timbre et au registre. Ces dimensions apparaissent particulièrement lorsque l'on considère la texture orchestrale (Piston, 1955), la constitution des différentes strates musicales visant à créer un effet sonore particulier.
3Nous ne traitons pas ici de la texture sonore mais de la texture symbolique, ou encore texture compositionnelle. Elle se concentre sur les caractéristiques d’organisation du contenu musical que l’on retrouve spécifiquement dans la partition ; on met alors de côté les aspects purement acoustiques, qu’ils soient instrumentaux ou liés à l’interprétation du morceau.
4Pour mieux se représenter intuitivement la dimension texturale d’une pièce de musique, on peut prendre l’exemple des thèmes et variations. Dans cette forme classique, mélodie et harmonie sont globalement préservés entre chaque variation du thème, mais de nombreux paramètres de la texture symboliques sont modifiés d’une variation à l’autre.
Figure 2. Extraits des 12 Variations sur le thème de « Ah vous dirai-je maman » par W. A. Mozart.
5La Figure 2 présente trois extraits des variations sur « Ah vous dirai-je, maman » de W. A. Mozart (K265). Lorsque l’on écoute1 la variation V, on reconnaît bien la mélodie du thème principal, même si le rythme est différent. Dans la variation VI, le rythme est plus rapide pour l’accompagnement à la main gauche (augmentant la densité horizontale), on a maintenant des accords à la main droite au lieu d’une mélodie simple (augmentant la densité verticale). Mais dans tous ces extraits, on reconnaît pourtant qu’il s’agit d’« Ah vous dirai-je maman ». La mélodie et l’harmonie n’ont pas changé : seule la texture change.
6En musicologie, la description de la dimension texturale pour la musique classique occidentale est assez récente. Alors que l’étude de l’harmonie s’est développée à la suite du traité de Rameau (Rameau, 1722), il faudra attendre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle pour trouver des textes de compositeurs y faisant référence, dans des termes analogues à l’analyse des peintures d’art dont (Perraudeau, 2019) donne de nombreux exemples.
7Dans les années 1920, elle est mentionnée comme un élément essentiel à l’étude de la forme dans les compositions non tonales et l’on commence à décrire la texture d’œuvres moins contemporaines.
“Contemporary music is predominantly a development of texture, and as the last great period in music when texture occupied this paramount place was that which is associated with Bach, it will provide an essential element of perspective if the two products are compared and contrasted. It is significant that modernity in this sense has synchronised with a growing appreciation of Bach.” (Dyson, 1923) p. 108
8Les premières définitions sont assez générales (Mickey, 1980)2. (Dyson, 1923) parle de l’organisation mais également d’aspects sonores (splashes of sounds), et il est difficile de la découpler de l’harmonie, de la mélodie et du rythme. On y note également un intérêt pour des figures stylistiques :
“The arpeggios again are akin to Bartok, […] And the chords that are afterwards wrapped round these two ideas are very near Bartok.” (Dyson, 1923) p. 312
9La définition proposée dans le Harvard Dictionary of Music en 1960 met en avant « Les relations horizontales (lignes mélodiques) et verticales (accords) des matières musicales, comparables à l'entrelacement de la chaîne et de la trame du tissu. »”3
10Le terme texture n'a été introduit qu'en 1980 dans le New Grove Dictionary of Music and Musicians (Dunsby, 1989), faisant référence à l'aspect vertical de la structure musicale [...] en ce qui concerne la manière dont les parties ou les voix individuelles sont assemblées4.
11Dans (Silva, 2018) l’auteur étudie un grand nombre de définitions de textures de la littérature pour tenter d’en proposer une définition unifiée, rendant compte des similitudes et différences de positionnement des auteurs. Il en ressort que la plupart des travaux s’intéressent à trois caractéristiques majeures : l’aspect bidimensionnel d’une œuvre, c’est-à-dire ses dimensions verticale et horizontale (notée C1 dans le Tableau 1), un certain nombre de paramètres variables d’un auteur à l’autre5 (C2), et le fait que la texture résulte de pièces, voix, composants, couches ou termes de sens similaire (C3).
Tableau 1. Comparaison des caractéristiques de la texture musicale dans la littérature, issu de (Silva, 2018).
1.2 Types de textures
12En se référant à l’organisation globale des parties instrumentales ou vocales, certaines compositions peuvent être classées en type de texture communs. Bien que leur nombre varie selon les auteurs, on trouve de façon courante cinq grandes catégories texturales pour décrire des œuvres : monophonie, polyphonie, homophonie, hétérophonie et antiphonie (Figure 3).
13La monophonie est le type de texture le plus simple en musique, lorsqu’il y a une seule ligne mélodique : soit chantée par une seule voix, soit produite par plusieurs voix à l’unisson (monodie) ou plusieurs instruments jouant à l’unisson. Il peut y avoir une partie rythmique en plus (sans mélodie chantable, sans harmonie ni contrepoint).
14La polyphonie correspond à deux ou plusieurs lignes mélodiques bougeant de façon indépendante, ou en imitation les unes par rapport aux autres, comme dans une fugue. L’attention de l’auditeur peut passer d’une voix à une autre sans que l’une d’entre elles ne s’impose comme seule voix principale.
15L’homophonie, par abus de langage, est parfois utilisée comme synonyme d’homorythmie, où les sons ou les syllabes sont joués ou articulés en même temps, comme dans le chant grégorien ou un choral par exemple. Mais par opposition à la polyphonie, elle désigne une musique où une mélodie principale se dégage, accompagnée par une harmonie se déplaçant en même temps que la mélodie. C’est le cas de la plupart des musiques pop actuelles.
16L’hétérophonie se définit comme l’écriture superposée (ou le jeu simultané) d’une ligne mélodique et de ses différentes variations, le plus souvent rythmiques ou ornementales. Les exemples sont assez rares dans la musique classique occidentale, mais on la retrouve couramment dans le style dixieland, par exemple.
17Enfin l’antiphonie désigne un jeu de questions/réponses entre plusieurs voix ou instruments.
Figure 3. Principales catégories de texture.
18Cependant cette description usuelle des textures est globale et ne capture pas les transformations internes, les évolutions qu’il peut y avoir au sein d'une même pièce (Moreira, 2019). De plus elle ne rend pas compte de tous les aspects de la texture. Il est nécessaire de comprendre plus en profondeur comment sont constituées ces textures si l’on souhaite, par exemple, permettre une automatisation de leur analyse.
1.3 Constitution de la texture
Figure 4. Différentes approches pour décrire la texture.
19Plusieurs approches ont été proposées pour décrire la constitution de la texture (Figure 4).
20Dans son traité d’orchestration, (Piston, 1955) propose sept classes de textures orchestrales : unisson, mélodie et accompagnement, mélodie secondaire, hiérarchisation des parties, contrepoint, accords et texture complexe (qui résulte de leur combinaison). (Nordgren, 1960) est l’une des premières études proposant une approche quantitative de la texture. Il caractérise la texture orchestrale selon l’organisation verticale des instruments et la décrit à l’aide de 8 descripteurs : nombre d’instruments, ambitus, registre, espacement inter-instruments, quantité et registre des doublements d’instruments.
21(Huron, 1989) distingue trois sens courants pour décrire la texture : la Densité, la Diversité, et l’Activité sonore globale. Il considère quatre types de diversité texturale : la diversité des hauteurs de notes, la diversité rythmique, le mouvement des hauteurs (c’est-à-dire la diversité contrapuntique), et enfin la diversité timbrale. Il propose également un espace textural (voir Figure 5) qui met en relation les synchronisations de débuts de notes (« Onset synchrony »), donnant une indication de la densité (peu/beaucoup de notes) et les mouvements semblables (« Semblant motion »), pouvant être positivement corrélés (mouvements parallèles ou similaires) ou négativement corrélés (mouvements obliques ou contraires), donnant une idée de la diversité.
Figure 5. Espace textural issu de (Huron, 1989). Dans cet espace, chaque quartier correspond à une tendance texturale. L’hétérophonie par exemple correspond au cadrant en bas à droite : les notes sont peu synchronisées, les voix prennent des directions similaires.
22Cet espace lui permet de capturer les grandes catégories de textures : monophonie, homophonie, polyphonie and hétérophonie. Il montre également la corrélation entre ces catégories et plusieurs genres musicaux.
23Dans le cas de la musique pour piano du début du XIXe siècle, (Hérold, 2011) dissocie les facteurs texturaux du timbre, comme par exemple la densité rythmique ou harmonique (distribution horizontale ou verticale), de ses facteurs pianistiques, plus spécifiques aux caractéristiques de l'instrument (comme les registres, les modes de jeu ou les doublures).
24Enfin, une approche compositionnelle basée sur la texture peut être trouvée dans (Moreira, 2019). Les configurations texturales sont ainsi décrites formellement dans le cas d'une texture stratifiée (« layered ») en empilant des parties texturales distinctes. Différents niveaux d'abstraction et de complexité sont utilisés, des partitions ordonnées ou non des parties texturales à des catégorisations plus globales dans des combinaisons d'éléments de blocs et de lignes.
25Il argumente le fait que la stratégie compositionnelle implique souvent un schéma préalable à la composition.
26C’est de ces approches que découle notre définition de la texture : nous décrivons la texture compositionnelle comme la façon dont les différents éléments (notes, voix, couches…) sont organisés dans une partition musicale.
27Les travaux décrits dans la suite de cet article synthétisent des modélisations informatiques de la texture compositionnelle dans des contextes différents (voix séparées ou non séparées), qui ont fait l’objet de précédentes publications.
2. Modélisation informatique de la texture compositionnelle
28Nous avons cherché à modéliser la texture (selon la définition précédente) pour qu’elle soit calculable par une machine, afin de l’exploiter notamment pour l’analyse automatique de partitions et la génération musicale symbolique. La nécessité première est de traiter la polyphonie, qui n’est pas toujours gérée de la même façon dans les partitions encodées. En effet, selon le type de musique, le format de fichier, l’instrumentation, les différentes voix peuvent être matérialisées ou non, encodées séparément ou fusionnées, ce qui n’entraîne pas les mêmes difficultés et modifie la façon dont nous devons traiter les données. Commençons par le cas le plus simple, celui des quatuors à cordes avec voix séparées, qui est aussi le premier auquel nous nous sommes confrontés.
2.1 Texture dans le quatuor à cordes classique
29Le quatuor à cordes se caractérise par une homogénéité sonore et un équilibre entre les timbres : les sons émis par les deux violons, l'alto et le violoncelle se fondent pour former une seule entité musicale. Cependant, chaque instrument joue un rôle distinct, susceptible de varier au fil de la pièce.
Figure 6. Haydn, quatuor op. 33/2, I, mes.17-22.
30Dans l’extrait Figure 6 du quatuor Op. 33 n° 2 de Haydn, la mélodie portée par le premier violon dans les mesures 17 à 20 est partagée avec le second violon mesures 21 et 22.
31L'accompagnement revêt également diverses formes, comme une note tenue (mesures 17 et 18) ou des notes répétées au violoncelle (mesures 21 et 22). L’usage de l’homorythmie est très présent, en particulier sur les voix intermédiaires, formant plus précisément un mouvement parallèle mesures 17, 18, et 20. On note également l’usage de l’imitation aux mesures 19 et 20.
32Nous cherchons donc à exprimer la manière dont la musique est disposée dans de tels flux, qu’on va appeler des couches, qui peuvent être une mélodie, un accompagnement ou d'autres choses.
33Pour cela nous nous sommes inspirés de travaux précédents sur les quatuors à cordes, notamment ceux de (Trimmer, 1981), qui a livré une analyse complète d’un corpus de quatuors classiques de Haydn et Mozart sur la base de sept catégories de textures, dont chacune est associée à un marqueur graphique spécifique permettant l’annotation systématique des partitions.
34Plus récemment (Duane, 2012) a proposé de caractériser la texture dans les quatuors à cordes en la liant à la perception des flux musicaux par un auditeur. Pour cela il s’est basé sur la synchronicité, la modulation synchronisée des hauteurs et les intervalles harmoniques proposés par (Bregman, 1990) et (Dewitt & Crowder, 1987). Il a caractérisé le rôle de ces flux texturaux selon trois catégories : les lignes principales, secondaires et d’accompagnement.
35Nous avons tenté d’affiner les possibilités descriptives de la texture sans la limiter à une gamme de textures prédéfinies. Pour cela nous avons cherché une typologie permettant d’annoter facilement les partitions, qui soit à la fois intuitive et lisible pour un humain, mais interprétable par la machine (facilement « parsable ») et suffisamment précise pour prendre en compte une grande variété de textures.
2.1.1 Typologie et protocole d’annotation
36Dans (Giraud et al., 2014) nous avons ainsi proposé une typologie simple à deux niveaux pour décrire les textures. Pour chaque flux de notes pouvant être groupé perceptuellement (chaque « couche »), le premier niveau indique le rôle de couche (est-ce une mélodie, un accompagnement ?), le second niveau décrit qualitativement les voix impliquées (nommées ici Soprano (S), Alto (A), Ténor (T) et Basse (B) de façon générique, représentant respectivement le violon 1, violon 2, alto, et violoncelle) ainsi que leur particularité d’écriture (notes tenues, notes répétées) et les relations entre ces voix (homorythmie, mouvement parallèle, imitation).
Figure 7. Haydn, quatuor op. 33/2, I, mes.17-22. Perception des différentes couches et annotation de la texture. Les symboles p et r indiquent respectivement un mouvement parallèle et des notes répétées. Le symbole / permet de séparer les couches de mélodie et d’accompagnement (il est possible d’en avoir plusieurs dans une même annotation), qui peuvent elles-mêmes contenir plusieurs couches séparées par des virgules.
37Pour annoter la texture, le texte musical est divisé en autant de segments que nécessaire, mais l’étendue minimale de ceux-ci est fixée à une mesure afin d’éviter une fragmentation trop forte des pièces étudiées. Ce choix peut conduire à une légère perte de précision, en particulier dans le cas des mesures “composées”, qui peuvent être scindées pour ce qui concerne la texture. À l’inverse, une texture peut rester inchangée pendant plusieurs mesures consécutives.
38Chaque segment donne lieu à une qualification notée selon un protocole fixe :
391. Au premier niveau (qualification des strates/couches), trois catégories principales sont utilisées : mélodie, accompagnement, imitation. Deux catégories secondaires ont été ajoutées : les entrées par accumulation sans imitation, et le silence aux quatre parties (void).
40On admet la possibilité de reconnaître une mélodie secondaire.
412. Au deuxième niveau (caractérisation de chaque strate/couche), nous avons utilisé plusieurs descripteurs : homorythmie, notes répétées, syncopes et notes tenues. La catégorie “imitation” peut revenir à ce niveau comme descripteur au sein d’une strate d’accompagnement. La catégorie « homorythmie », peut être affinée par un descripteur complémentaire selon les cas (parallélisme, unisson, octave), car il s’agit de dispositions significatives. Ce descripteur remplace dans ce cas le descripteur générique “h”.
42Dans un souci de normalisation de la notation, les voix sont toujours considérées de la plus aiguë à la plus grave (SATB).
2.1.2 Implémentation des descripteurs et visualisation
43Nous avons conçu et implémenté des algorithmes permettant de différencier les différentes strates et de les qualifier, calculant automatiquement homorythmies, mouvements parallèles, notes tenues, répétitions. Pour chacun d’eux, nous avons dû faire des choix de paramétrisation et définir des seuils à partir desquels nous considérons la détection comme significative, la valeur du seuil permettant d’obtenir plus de spécificité ou de sensitivité : en ce qui concerne les répétitions, par exemple, nous avons choisi de considérer les cas durant au moins deux temps avec au moins trois notes. Les mouvements parallèles sont d’abord recherchés au sein d’un seul instrument (pour permettre de détecter les doubles cordes), puis en prenant les instruments deux à deux. L’imitation pose quelques problèmes de seuil et de complexité. Il faut pouvoir tester les imitations sur une demi-mesure, une mesure, deux mesures ou peut-être plus. Sur l’exemple de la Figure 8 l’imitation est très courte, sur trois notes dont la dernière n’a pas la même durée, alors que le violon 1 joue le même motif en parallèle avec la basse.
Figure 8. Visualisation des textures détectées par l’ordinateur (Giraud et al., 2014).
44La visualisation directe des résultats des descripteurs sur la partition permet de valider les seuils choisis et de les ajuster si nécessaire, et nous pouvons également visualiser sur un même graphique l’ensemble des caractéristiques détectées, ce qui donne une vue d’ensemble de la texture de la pièce (Figure 8). Ici on voit les répétitions, les mouvements parallèles, les notes tenues, ainsi que des informations supplémentaires sur les soli, les notes extrêmes et les registres.
2.1.3 Analyse d’un corpus
45La séparation mélodie/accompagnement est un problème complexe à traiter. Il est possible de l’aborder par une séparation préalable en voix ou en flux ou par des méthodes récentes utilisant l’apprentissage machine (Rafailidis et al., 2008, 2009 ; Simonetta et al., 2019 ; Lu & Su, 2018). Partant de l’intuition que la texture est un élément important de la détermination d’une mélodie ou d’un accompagnement et que celle-ci pourrait peut-être se déduire de caractéristiques texturales calculées, nous avons étudié la corrélation entre éléments texturaux, mélodie et accompagnement sur un corpus de quatuors à cordes classiques (Soum-Fontez et al., 2021). Le corpus était constitué de douze mouvements de quatuors à cordes de Haydn et Mozart, composés autour de la même période6, étendant le corpus proposé dans (Giraud et al., 2014). Ils étaient tous en 4/4, totalisant 1362 mesures, au format .krn. La mélodie et l’accompagnement ont été annotés individuellement sur chaque instrument (il était possible d’annoter « autre »), donnant un total de 4791 mesures d’annotations.
Figure 9. Proportions de mélodie dans les mesures par instrument et proportion de mélodie au premier violon sur le corpus(Soum-Fontez et al., 2021).
46On peut noter dans la Figure 9 que bien que le premier violon joue majoritairement des lignes mélodiques, les autres instruments en jouent également une proportion non négligeable.
47En étudiant la corrélation entre la présence des caractéristiques texturales implémentées et la mélodie ou l’accompagnement, nous avons constaté par exemple que l'imitation et les syncopes sont significativement associées à la mélodie, tandis que les notes répétées sont significativement associées à l'accompagnement. L'homorythmie et ses sous-ensembles de mouvements parallèles se retrouvent dans les deux rôles, mais les mouvements parallèles sont davantage utilisés pour la mélodie (Figure 10).
48Confirmant l’intuition, les caractéristiques sur la hauteur (la plus haute, la moyenne et la plus basse) sont très significatives pour distinguer les parties mélodiques et d'accompagnement. Fait intéressant, d'autres caractéristiques jouent un rôle important, comme le nombre de notes -- la mélodie ayant tendance à avoir plus de notes -- ou le nombre d’intervalles -- la mélodie ayant tendance à utiliser des intervalles conjoints (données non fournies ici, se référer à (Soum-Fontez et al., 2021) pour plus de détails).
Figure 10. Caractéristiques texturales présentes dans les couches de mélodie et d’accompagnement du corpus (Soum-Fontez et al., 2021).
2.2 La musique symphonique
49S’inspirant de la typologie réalisée sur le quatuor à cordes, nous avons abordé la même question pour la musique orchestrale. Nous avons globalement conservé les mêmes principes d’annotation, cependant il y a des difficultés supplémentaires à prendre en compte. Contrairement aux quatuors à cordes, les instruments d’un ensemble orchestral ne sont pas toujours les mêmes, et ne sont pas forcément regroupés au sein des mêmes sous-groupes. Il faut également considérer des effets orchestraux supplémentaires.
50La typologie réalisée dans (Le et al., 2022) conserve le principe des couches et de leur qualification, en précisant quels instruments sont concernés par chaque couche, et quelles sont les relations des instruments au sein d’une même couche : homorythmie, mouvement parallèle, unisson (voir l’exemple Figure 11). En ce qui concerne les rôles texturaux, outre la mélodie qui est toujours présente, les types d’accompagnement liés aux effets orchestraux souhaités ont été davantage mis en valeur. En effet, un accompagnement peut-être harmonique, utilisant des notes tenues ou des homorythmies, ou il peut être de nature plus rythmique, selon les termes de (Bruce Benward, Marilyn Saker, 2008), par l’usage de notes répétées, d’oscillations, d’arpèges ou de gammes. Il peut également s’agir d’une fusion de ces catégories (rôle mixte) liant rythme et harmonie (dans le cas de certains jeux d’accords par exemple) ou liant mélodie et rythme (par exemple dans le cas d’hétérophonies telles qu’une mélodie secondaire « brodant » en même temps que la mélodie principale).
51Les auteurs ont annoté un corpus de 24 mouvements de symphonies de Mozart, Hadyn et Beethoven selon cette typologie (voir Figure 12).
52Bien sûr, comme dans tout processus d’annotation, il peut y avoir des différences de perception selon les annotateurs, cependant les différents annotateurs du corpus se sont accordés sur le fait que les catégories proposées permettaient d’annoter les morceaux du corpus, avec un taux de similarité d’annotation de l’ordre de 80 %. Les statistiques dans la Figure 12 indiquent le nombre de mesures, le nombre de couches annotées et leur longueur moyenne, ainsi que le nombre moyen d’instruments impliqués par couche.
Figure 11. Extrait de l’Allegro con brio de la cinquième symphonie de Beethoven, mesures 323-330, et annotations de textures dans (Le et al., 2022). Le symbole / sépare les différentes couches, avec leur rôle, leur mode d’écriture textural quand il est nécessaire (ici gamme, notes répétées, accords épars) et les instruments impliqués. La présentation des mesures n’est pas nécessairement linéaire et dépend de la disposition des couches, cependant les couches sont de préférence présentées de la plus aiguë à la plus grave.
Figure 12. Premiers mouvements de symphonies de Mozart, Haydn et Beethoven annotés dans le corpus (Le et al., 2022)
Figure 13. Distribution des instruments par rôle et par compositeur (M : Mozart, H : Haydn, B : Beethoven) dans les morceaux du corpus (Le et al., 2022). Dans chaque famille, les instruments dont le registre est le plus élevé sont représentés avec des nuances plus claires. Les rôles considérés sont la mélodie (mel), l’accompagnement rythmique (rhythm), l’accompagnement harmonique (harm), la mélodie secondaire (decmel : decorative melody) et les accords épars (sparse), None est indiqué lorsque le rôle n’est pas précisé.
53L’annotation du corpus permet d’étudier des questions intéressantes comme la répartition des instruments selon les rôles texturaux, la comparaison de l’usage des instruments selon les compositeurs, ou l’usage de certains types de textures selon la section des mouvements.
54La Figure 13 représente la distribution des instruments par rôle et par compositeur dans le corpus annoté. Chaque zone représente le nombre de mesures dans lesquelles un instrument joue le rôle correspondant. Tous les rôles sont normalisés sur le nombre total de mesures de chaque compositeur (M : Mozart, H : Haydn, B : Beethoven).
55Les résultats confirment la connaissance commune que les instruments et leurs familles jouent des rôles différents. La mélodie est majoritairement consacrée aux cordes (73 % chez Mozart (M), 66 % chez Haydn (H) 53 % chez Beethoven (B)) – en particulier, comme prévu, aux premiers violons (Vln1). On peut noter que les instruments graves jouent également un rôle important dans la mélodie : les seconds violons (Vln2), l'alto (Vla), les violoncelles (Vc) et les contrebasses (Cb) représentent 63 % des mélodies jouées par les cordes. La plupart du temps, ils jouent la mélodie soit à l'unisson soit en harmonie à plusieurs voix avec le premier violon, mais aussi, dans 9 % des cas, ils jouent la mélodie sans le premier violon. En revanche, le rôle harmonique (harm) est majoritairement tenu par les bois (46 %) et les cuivres (24 %), notamment par le cor.
2.3 La musique pour piano
56Pour un instrument naturellement polyphonique comme le piano, utiliser la même modélisation de la texture que dans les cas précédents pose une difficulté supplémentaire : les différentes voix ne sont pas séparées par nature, et lorsque l’on peut séparer la polyphonie en des voix distinctes, une ligne mélodique peut donner l’impression de former plusieurs voix (Figure 14). Il serait possible d’utiliser en pré-traitement des algorithmes comme celui de (Chew & Wu, 2005) pour séparer les voix et ensuite utiliser la même typologie que dans le cas des quatuors à cordes par exemple.
Figure 14. Exemple de musique polyphonique au piano.
57Cependant on peut également tenter de modéliser la texture directement à partir de la partition polyphonique. C’est cette solution qui a été choisie dans la thèse de Louis Couturier. Il a ainsi proposé une typologie à la mesure prenant en compte (Figure 15) : la densité verticale (totale et par « couche », comme pour les strates dans les quatuors à cordes), la diversité (nombre de couches texturales présentes), la fonction musicale, et des attributs d’écriture mettant en relief les relations entre les voix ou les caractéristiques d’une couche (il peut par exemple s’agir d’un motif particulier comme une gamme, ou d’un parallélisme entre des voix).
Figure 15. Critères à considérer pour l’annotation de la texture pianistique (thèse de Louis Couturier)
58(Bruce Benward, Marilyn Saker, 2008) identifient sept fonctions musicales différentes pour qualifier les éléments constitutifs d’une texture (« primary elements of texture ») : mélodie primaire, mélodie secondaire, mélodie de support parallèle ; support statique ; support harmonique, support rythmique et support à la fois rythmique et harmonique. Nous avons proposé une réduction à trois sous-fonctions (ou rôles) à combiner : mélodique, harmonique et rythmique (Couturier et al., 2022b). Cela rejoint la modélisation que nous avons proposée pour la musique orchestrale.
59Ainsi, pour annoter la texture, la procédure est la suivante : 1) d’abord identifier les différentes couches, puis 2) indiquer la densité verticale de chacune d’elles, 3) proposer une densité verticale globale, 4) identifier le ou les rôle(s) de chaque couche, 5) préciser les relations qui peuvent exister entre les voix au sein des couches ou globalement (mouvements parallèles, homorythmie…), et enfin 6) indiquer s’il existe des figures caractéristiques (répétitions, motifs récurrents…) dans l’écriture. La Figure 16 présente l’annotation d’une mesure selon cette procédure, et la Figure 17 la visualisation sur la plateforme Dezrann7 de quatre mesures de la sonate K.179 de Mozart.
Figure 16. Exemple d’annotation de texture sur une mesure de piano. L’annotation 3h [MH2p / S1r] est obtenue de la façon suivante : 1) il y a deux couches, ici identifiées à la main droite et à la main gauche (le découpage pourrait être différent et indépendant des mains). 2) La couche supérieure est de densité 2 (toujours deux notes jouées simultanément), la couche inférieure de densité 1. 3) La densité globale est 3 (il y a toujours trois notes jouées simultanément). 4) La couche supérieure a une fonction harmonique et mélodique (MH), la couche inférieure a une fonction statique (S). 5) Les deux couches sont en homorythmie (h). 6) La couche supérieure est écrite en mouvement parallèle (p), la couche inférieure par des notes répétées (r).
60La grammaire associée à l’écriture des annotations (Figure 18) est simple et suffisante pour décrire la texture d’une sonate pour piano de Mozart. Elle pourrait être étendue avec des figures caractéristiques d’autres périodes ou genres musicaux. Elle autorise le développement de labels lorsqu’une couche peut être décomposée en sous-couches perceptibles. Le cas de la Basse d’Alberti, très présente dans le corpus, ne nous a pas semblé nécessiter d’attribut spécifique : elle est annotée la plupart du temps HS1 (S1/M1), signifiant que globalement il s’agit d’une couche harmonique et statique de densité 1, les notes étant jouées une par une, mais si on l’observe plus finement on peut séparer la note répétée supportant cette basse (S1) de la note changeante qui peut avoir un rôle plus mélodique sur le long terme (M1). Cette proposition est liée au corpus qui ne contient pas d’autres figures pouvant être annotées de cette façon et rien n’empêche d’étendre les « attributs » si nécessaire.
Figure 17. Exemple d’annotations de texture dans la plateforme web Dezrann. Mesures 7 à 10 du premier mouvement de la sonate K.279 de W.A. Mozart.
Figure 18. Grammaire sous forme de Backus-Naur décrivant les annotations de texture pianistique (Couturier et al., 2022b)
61Dans (Couturier et al., 2022a), neuf mouvements de sonates pour piano de Mozart on été annotés selon cette syntaxe (trois mouvements de chaque sonate K.279, K.280 et K.283), à raison d’une annotation de texture par mesure. Une analyse des annotations du corpus permet d’identifier les principaux types de texture présents dans le corpus. La représente la répartition des annotations de textures en fonction de leur densité verticale (nombre de voix ou de notes simultanées) et de leur diversité (nombre de couches texturales). Dans la Figure 19, la monophonie se situe en bas à gauche : une seule voix pour une seule idée musicale. En ajoutant de nouvelles voix, on augmente la densité verticale de la texture.
Figure 19. Répartition des textures dans un corpus de neuf mouvements de sonates pour piano de W.A. Mozart, tiré de (Couturier et al., 2022b)
62On constate que la disposition en deux couches est significativement présente, représentant plus de la moitié des textures présentes. Lorsque chaque voix constitue une nouvelle couche musicale distincte, on reste sur l'axe de la polyphonie ‘stricte’, en diagonale sur la figure. Si certaines de ces voix se regroupent pour former une couche texturale plus dense (par homorythmie par exemple), on a alors de l’homophonie – le cas le plus typique étant constitué d’une mélodie et de son accompagnement.
2.4 Texture et fonctions musicales dans les tablatures de guitare
63Bien sûr les analyses de corpus précédentes supposent d’avoir une annotation des pièces, d’où l’intérêt de développer des outils, basés sur des descripteurs ou de la prédiction, permettant d’automatiser cette tâche, comme nous l’avons proposé dans le cas des quatuors à cordes.
64C’est ce qui a été proposé dans (Régnier et al., 2021) sur un corpus d’un tout autre répertoire, des tablatures pour guitare de musique pop. Dans cet article, les auteurs proposent d’identifier deux textures : les sections rythmiques ou non rythmiques dans un corpus de tablatures pour guitare. La classification par un modèle d’apprentissage (Long Short Time Memory) a donné de bons résultats sur un corpus d’environ 100 morceaux, soit 7000 mesures annotées manuellement. Les auteurs ont utilisé plusieurs descripteurs, comme par exemple le nombre de notes ou la valeur moyenne de la fret utilisée pour jouer, qui s’est avérée particulièrement corrélée au type de jeu (voir Figure 20).
Figure 20. Descripteurs utilisés pour la classification de la guitare rythmique.
65De tels travaux peuvent avoir des applications très utiles, comme par exemple de pouvoir séparer automatiquement des sous-corpus, par exemple pour l’entraînement de modèles génératifs. Il est donc nécessaire d’améliorer la compréhension de la texture dans divers répertoires et de trouver des méthodes génériques permettant de la découvrir automatiquement grâce à des descripteurs adaptés.
3. Lien entre la texture et la forme musicale
66La nécessité de prendre en compte la texture comme élément déterminant de la forme musicale est une idée déjà ancienne (Alden, 1954)8. Charles Rosen formule d’une façon radicale l’importance de la prise en compte de la texture dans le style classique, et en particulier dans la forme sonate, allant jusqu'à définir la forme sonate comme une “méthode d’agencement de nombreuses textures fortement contrastantes” (Rosen, 1980)9. Berry considère la texture comme ayant une fonction structurelle en musique (Berry, 1976) et plusieurs travaux ont évalué son impact sur la perception de la structure (Levy, 1982 ; Duane, 2012). Les analyse de corpus mentionnées plus haut nous donnent l’opportunité de rapprocher l’évolution des textures de la forme.
67Sur les quatuors à cordes de Haydn, lorsque l’on met en relation l’analyse fine des textures avec l’analyse de la forme, on constate non seulement que les grandes articulations formelles sont accompagnées de changements de texture, mais que la corrélation se vérifie aussi dans les niveaux inférieurs de la forme (Levé et al., 2017).
68Si l’on prend l’exemple du 1er mouvement de l’op. 33/2 (Figure 21), on voit que chacune des sections et des sous-sections est liée à un changement de texture fine (sans forcément de contraste extrême).
Figure 21. Analyse du lien entre forme et texture réalisée par Marc Rigaudière dans (Levé et al., 2017) pour le premier mouvement de l’op. 33/2 de Haydn. Dans ce mouvement, seule la troisième sous-section de la transition survient avec une texture inchangée (mesure 17). L’étude de la partition montre qu’à cet endroit il n’y a pas de changement des couches texturales mais une progression vers des segments de plus en plus courts et un passage des blanches aux noires dans les voix intermédiaires (deuxième violon et alto).
69Le même travail sur le développement montre la présence caractéristique de l’imitation, dont l'intérêt est maintenu par de nombreux changements de disposition.
70L’une des difficultés préalables à l’étude du lien entre texture et forme est de proposer des distances entre textures permettant de les comparer, car il est rare qu’elles soient exactement semblables. Dans (Couturier et al., 2023), plusieurs distances sont proposées et évaluées sur le jeu de données TAVERN, qui contient 27 thèmes et variations pour piano de Mozart et de Beethoven (Devaney et al., 2015). Le choix de ce jeu de données est basé sur l’hypothèse que la texture entre une mesure d’une phrase d’une variation et une mesure de la même phrase sera plus similaire que celle d’une mesure d’une autre phrase, et a fortiori d’une autre variation.
71La Figure 22 représente les similarités et dissimilarités de texture dans le thème et variation K.455 de W. A. Mozart et met en avant de façon frappante le lien entre texture et forme. On identifie des blocs de variations semblables consécutives, comme (1,2,3) ou (5,6,7) ; la structure interne des variations peut révéler des segments contrastés, comme par exemple dans la quatrième variation ; la variation 9 est très contrastée du fait de l'alternance entre texture en accords et lignes mélodiques rapides ; l'avant-dernière phrase revient à la texture originelle du thème.
Figure 22. Dissimilarité des textures dans les phrases des dix variations en sol sur « Unsere dummer Pöbel meint » de W.A. Mozart (K. 455), en utilisant une distance basée sur les densités verticales et horizontales (Couturier et al., 2023). Les extraits les plus similaires sont représentés en bleu foncé, tandis que le vert clair indique une dissimilarité plus élevée.
Conclusion
72Ces travaux sur la texture musicale ouvrent la voie à d’autres recherches pouvant impacter l’analyse et la génération de musique symbolique. Il serait nécessaire d’étudier comment les différentes approches proposées peuvent être combinées, car elles permettent d’aborder l’analyse de la musique à différentes échelles : d’une part, les descripteurs à grain fin, relativement faciles à implémenter, permettent d’étudier les similarités de matériau ; d’autre part la structuration en couches ayant des rôles similaires ou différents propose une lecture à plus grande échelle de la structuration des œuvres. Le développement de descripteurs robuste pourra permettre l’étude de plus grands corpus de données, notamment pour étudier plus en profondeur les liens entre texture et forme, et mettre en avant des similitudes entre périodes ou compositeurs. Les travaux décrits se sont essentiellement concentrés sur la musique de la période classique dans un premier temps, dans un souci de cohérence. Il est nécessaire d’élargir la période des œuvres étudiées, afin de confirmer que les concepts sont transposables, ce qui pourrait simplement nécessiter un élargissement du vocabulaire des figures texturales et des relations entre les couches par exemple. Enfin il serait particulièrement intéressant de rapprocher ces travaux de ceux réalisés sur la musique non tonale, non abordés ici, et de la texture sonore, particulièrement étudiée dans le cadre de la musique contemporaine.
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Notes
1 https://s9.imslp.org/files/imglnks/usimg/0/06/IMSLP72959-PMLP55775-Mozart_variations_AhVousDiraisJeMaman_Ligoratti.mp3
2 “An analysis of texture in selected piano etudes of Chopin and Scriabine: “In the mind of some authors, for example Ivor Keys and George Dyson, texture consists of all characteristics of music combined in a vague, holistic manner. […] In his Guidelines for Style Analysis, Jan LaRue places ‘texture’ under the general heading of ‘sound’.” (Mickey, 1980) p. 2 et 3.
3 “Much like woven fabric, music consists of horizontal ("woof') and vertical ("warp") elements. The former are the successive sounds forming melodies, the latter the simultaneous sounds forming harmonies. It is these elements that make up the texture”. Willi Apel, The Harvard Dictionary of Music 2nd ed. 1969.
4 “Texture. A term used when referring to the sound aspects of a musical structure. This may apply either to the vertical aspects of a work or passage, for example the way in which individual parts or voices are put together, or to attributes such as tone colour or rhythm, or to characteristics of performance such as articulation and dynamic level”. New Grove Dictionary of Music and Musicians.
5 Par exemple la hauteur, la densité, le rythme, la dynamique, le timbre…
6 Op17 : 1771, Op33 : 1781, Op50 : 1787, Mozart K155-160 : 1772, Mozart K387 : 1782
8 “Texture has a profound bearing not only upon the style of music but even its form”. Alden, “Styles of musical texture”, 1954, p.5.
9 “Like fugue, sonata defines a certain kind of texture—or, better, a method of ordering many widely contrasting textures […] (p. 14) Charles Rosen, Sonata Forms (1980), New York : Norton, revised edition, 1988.