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L'Ethnographie

Des corps aux esprits

Une passerelle fragile

Nathalie Luca

Octobre 2020

DOI : https://dx.doi.org/10.56698/ethnographie.533

Résumés

« Corps », « nouvelles religions », « dérives sectaires », voilà les trois termes qui forment le titre de ce dossier. Peut-on les accepter tels quels ? Nécessitent-ils quelques explications ? Peut-on les rejeter ? Cet article commence par une explicitation de ces notions afin d’entrer ensuite dans le vif du sujet sans risquer les malentendus fréquents que suscite une thématique délicate sur laquelle les points de vue sont nombreux et contradictoires. Les expressions « nouvelles religions » et « dérives sectaires » sont analysées dans une approche de sociologie des religions tandis que les « corps » sont appréhendés dans une perspective plus anthropologique, comme le medium des dieux. Le cœur du propos se centrera ensuite sur l’analyse d’une dérive sexuelle d’un mouvement messianique sud-coréen.

“Body”, “new religions”, “sectarian aberration” are the three notions of the title of this special issue…

Texte intégral

Le choix des mots1

Nouvelles religions ou nouveaux mouvements religieux ?

1On utilise plutôt indifféremment les termes « nouveaux mouvements religieux » et « nouvelles religions », les rendant synonymes, dans l’intention bien souvent de les différencier du terme péjoratif et accusateur de « secte ». Pour ma part, je considère l’expression « nouvelles religions » inadéquate à définir la transformation du champ religieux que l’on observe depuis les années 1960 environ. L’expression « nouveaux mouvements religieux » (NMR) me semble heuristiquement plus féconde, précisément parce qu’elle permet de mieux comprendre son lien structurel, dans les pays occidentaux, avec les sectes. Pour l’expliquer, un court détour par le paradigme de la sécularisation s’impose, car la particularité des NMR est précisément d’en être le produit. Ce processus a libéré les sphères d’activité de leur dépendance aux valeurs religieuses et permis leur autonomisation. Elles se sont alors développées en définissant des normes et des valeurs spécifiques, mais qui se sont parfois révélées insuffisantes à donner sens aux découvertes, aux difficultés ou aux échecs qu’elles expérimentaient (échecs thérapeutiques ou éducatifs, découvertes scientifiques, crises politiques, par exemple). Devant cette impasse, certains spécialistes (économistes, médecins, scientifiques, éducateurs, hommes politiques, etc.) ont cherché des explications à l’extérieur des valeurs propres à leur domaine d’activité, les puisant dans les corpus de croyance nombreux et très hétérogènes que la mondialisation a parallèlement mis à leur disposition et les ramenant à l’intérieur d’espaces qui s’en pensaient débarrassés. Le terme de « mouvement » se comprend ainsi comme « un changement de position par rapport à un système de référence »2 : il y a eu un déplacement du scientifique, de l’économique, du thérapeutique, de l’idéologique vers le religieux. Ce sens est nouveau : il part du séculier pour aller vers le religieux et non l’inverse. À cette étape de la formation des NMR, il serait plus précis de parler de nouveau mouvement (politique, économique, scientifique, éducatif, thérapeutique, etc.) vers le religieux. Car ce mouvement peut très bien s’arrêter à l’emprunt de quelques éléments de croyance pour nourrir la pratique. C’est le cas pour certaines thérapies, psychothérapies, écoles privées qui, sans sortir pour autant du cadre de leur domaine d’activité, s’inspirent néanmoins de contenus de croyance qui leur sont étrangers. Ce ne sont pas pour autant des NMR. Les nouveaux mouvements vers le religieux deviennent des NMR lorsque ces contenus ne servent plus uniquement à combler les pertes de sens détectées dans leur sphère d’activité d’origine, mais sont utilisés de surcroît pour tisser à frais nouveaux, entre l’ensemble des sphères d’activité, un lien reposant sur une vision englobante d’un monde qu’ils cherchent à remettre en ordre. Leur mode de fonctionnement rétablit de la sorte la mainmise du religieux sur l’ensemble des sphères d’activité et entre en conflit avec les sociétés occidentales modernes et sécularisées.

2Ainsi, on peut dire que les NMR sont un produit paradoxal de la sécularisation. Ils participent à l’émiettement de la société, chaque citoyen étant libre d’adhérer à l’un des multiples systèmes de normes, de valeurs et de croyances qui se développent alors en concurrence les uns par rapport aux autres et affaiblissent, par leur diversité même, le lien social à partir duquel se construit une nation.

Une définition dialectique de la secte

3Ces NMR ne suscitent pourtant pas les mêmes réactions dans tous les pays où ils s’installent. En un lieu, ils s’intègrent sans trop de difficultés, dans d’autres, ils sont considérés comme menaçants. Il arrive également qu’un groupe soit critiqué en différents endroits, mais pour des raisons diverses. L’idée de dangerosité est en partie culturellement construite, ce qui oblige à appréhender la secte de façon dialectique. Max Weber et Ernst Troeltsch avaient ainsi relevé les éléments de tension qui liaient et opposaient la secte à l’Église. Dans nos sociétés sécularisées, le référent devient la nation. L’État séculier doit « guider les errances du religieux et désigner les formes acceptables de l’expression identitaire »3, cela, « afin d’éviter les débordements des passions et prévenir les cauchemars de l’anarchie » ou « la dérégulation interne que la volatile allégeance liée au phénomène sectaire [risque d’] entraîner4 ». Il cherche à réguler toute forme d’expression religieuse qui entrerait en conflit avec les éléments essentiels par lesquels se définit la société dont il est le garant et qui forment les frontières symboliques de chaque nation. Largement fluctuantes et jamais arrêtées définitivement, elles sont néanmoins composées de normes et de valeurs spécifiques, partagées par l’ensemble des concitoyens et censées unir la population nationale au sein d’une communauté de citoyens. Dans cette perspective, les sectes sont des organisations qui comportent des traits religieux, philosophiques, idéologiques, spirituels, éducatifs ou thérapeutiques qui entrent en conflit avec les frontières symboliques de la nation : l’État réagit lorsqu’il craint que ces organisations se développent en rupture avec le pacte citoyen qu’il a pour devoir de défendre. Il redoute que la défense de certaines valeurs communautaires n’amène les adeptes à ne plus se voir comme « les membres d’une communauté politique jouissant des prérogatives et assumant les responsabilités attachées à cette appartenance »5. L’adhésion à un NMR est considérée comme inacceptable dès lors qu’elle hypothèque l’appartenance à la communauté citoyenne. Cette définition dialectique de la secte doit pourtant être complétée par une autre plus systémique et structurelle inspirée par le système de communication défini par Claude Lévi-Strauss.

Un système de communication verrouillé ou concurrent

4Pour Claude Lévi-Strauss, toute société se construit sur un système de communication qui lui permet d’entretenir des relations, essentielles à son développement, avec d’autres groupes sur trois niveaux : celui des alliances matrimoniales, celui des activités économiques et celui du langage. Sans ces relations, elle s’isole et s’appauvrit : « L’exclusive fatalité, l’unique tare qui puisse affliger un groupe humain et l’empêcher de réaliser pleinement sa nature, c’est d’être seul »6. Plus le système de communication est ouvert, plus la société progresse. Lorsqu’une communauté se coupe simultanément de liens extérieurs sur ces trois niveaux, elle se referme entièrement sur elle-même. Les communautés aux dérives mortifères ont en commun cet isolement radical. On le détecte en observant avec qui le mariage est autorisé – niveau des échanges matrimoniaux ; entre quels producteurs et quels consommateurs s’échangent les biens et les services – niveau des activités économiques ; avec qui le langage, enfin, permet de communiquer. La majorité des groupes socialement controversés ne coupent qu’un, voire deux étages de leur système de communication. Rares sont ceux qui rompent avec toute forme d’échange.

5Les échanges matrimoniaux sont sans aucun doute le niveau le plus communément fermé dans l’ensemble des groupes communautaires alternatifs. Ceux-ci ont en commun d’être relativement récents et de se construire en opposition à la société, aussi, la condition première de l’alliance est-elle de partager les mêmes croyances. Cela n’a rien d’exceptionnel, mais lorsque le niveau des échanges matrimoniaux est fermé dans un petit groupe qui refuse le mariage ou ne l’autorise qu’entre quelques fidèles, on peut craindre à la fois des dérives sexuelles et une difficulté à se développer sur plusieurs générations.

6Le second niveau, les échanges économiques, est un autre facteur d’isolement. Certains mouvements créent leur propre moyen de survie, sans qu’il leur soit nécessaire d’acheter ou de vendre quoi que ce soit avec l’extérieur. Les fidèles se retrouvent à la fois producteurs et consommateurs de biens qui, ne circulant plus, participent à leur propre enfermement et à celui de leur communauté. Si de surcroît leur argent est fortement prélevé, ou objet d’un complet renoncement, ils se privent alors des biens classiques d’échange avec la société dominante et se mettent dans l’incapacité de pouvoir s’y réintégrer un jour.

7Le langage, enfin, est le paramètre le plus délicat du système de communication. Il touche l’enseignement de la croyance. Il devient enfermant lorsque l’usage courant des mots est remplacé par un usage métaphorique exclusif qui crée un fossé entre son sens premier, connu de tous et son sens second, connu des seuls initiés. La communication avec l’extérieur est alors fortement perturbée. Le langage ne permet plus l’échange qu’entre membres du groupe et participe à son enfermement. La symbolique de la communauté et les métaphores utilisées pour lui donner corps constituent alors une part non négligeable des possibilités de dérives.

8Il arrive cependant également que sans être fermé sur aucun de ces trois niveaux, le système de communication d’un organisme se heurte à celui de la société dans laquelle il réside. Il en est ainsi lorsque, par exemple, concernant le niveau des échanges matrimoniaux, le stock dans lequel l’adepte choisit, ou se voit attribuer, son époux ou son épouse et la façon dont se fait ce choix ou cette attribution répondent à des normes incompatibles avec celles pratiquées par l’environnement familial ou social du converti. L’adepte adopte les mœurs maritales d’une autre culture, ce qui n’est pas sans susciter de l’incompréhension. Concernant le niveau des échanges économiques, il existe beaucoup de communautés religieuses qui ne remettent en cause ni le système capitaliste ni la notion d’enrichissement. Ce que le converti achète vient cependant heurter les valeurs de sa société. En France notamment, il est difficile d’accepter que des services spirituels soient payants. Enfin, concernant le troisième niveau, l’adepte peut adopter un langage, des attitudes, des manières qu’il emprunte à la société qu’il idéalise et le rendent étrange au regard de sa famille ou de son environnement social. Un complet basculement dans le système de communication d’une société idéalisée culturellement très différente de la nôtre ne se fait pas sans créer d’importantes tensions. Les fidèles donnent l’impression d’être devenus des étrangers dans leur propre pays, d’où l’impression que leur groupe est un cheval de Troie.

Habitus et techniques du corps

9Ces dernières remarques nous amènent à recentrer notre attention sur les attitudes, et par conséquent sur le dressage du corps. Toute croyance nécessite l’incorporation de gestes techniques dont la simple observation permet de déduire la nature de ce en quoi l’individu croit. Ainsi Marcel Mauss présentait déjà en 1934 les techniques du corps comme « les façons dont les hommes, société par société, d’une façon traditionnelle, savent se servir de leur corps », postulant que tout geste technique nécessite un enseignement et que la modification d’un des paramètres de cet enseignement entraîne la transformation du geste. S’appuyant sur l’observation de la marche, il remarque par exemple que la manière de marcher des Français s’est transformée sans qu’ils ne s’en rendent nécessairement compte avec l’avènement du cinéma qui leur permit de découvrir « les modes de marche américaine ». Ce travail d’observation des corps en mouvement (ou au repos) l’a conduit à développer le concept d’habitus par lequel il spécifie les « “habitudes” [qui] varient non pas simplement avec les individus et leurs imitations, [mais] surtout avec les sociétés, les éducations, les convenances et les modes, les prestiges », habitus qu’il repère tout aussi bien dans les activités ordinaires et quotidiennes que dans les activités rituelles7. Michel de Certeau ira dans le même sens, lorsqu’il décrit la gestuelle des corps en prière dans le catholicisme :

[L’orant] cherche à tâtons, de ses mains jointes ou levées, le Dieu insaisissable qui s’absente des premiers rendez-vous. Il passe lentement de geste en geste et avance dans la prière comme le pèlerin qui multiplie et répète les différentes postures de la marche. L’ouvrier spécialiste réitère bien souvent les mouvements qu’a stylisé une tâche bien précise et qui, nécessaire chacun, pourtant successifs, ne définissent pas seulement un travail mais sont l’homme au travail. De même l’orant refait le cycle, jamais clos, des attitudes dans lesquelles, tour à tour, il s’engage et se repose, comme s’il pesait de tout son corps à chaque pas de cette déambulation processionnelle. […] La prière n’est ni extérieure, ni non plus identifiable à l’un [de ces pas]. Elle est leur succession : un discours de gestes8.

10Selon les dieux ou les esprits auxquels nous croyons, le corps bouge différemment, il imprime et exprime leur présence ; il dit à l’observateur qui ils sont et quelles relations le croyant entretient avec eux. Comme l’exprime encore de Certeau, le rendez-vous entre l’homme et ses dieux « se situe toujours sur les terres de l’homme, au croisement de son corps et de son âme9 » et c’est également dans le corps qu’une co-présence entre l’homme et l’esprit se manifeste. Il est le medium le plus direct de cette relation, il l’incarne, la présentifie. Dans cette perspective, les dieux auxquels nous croyons sont nécessairement agissants. Nos comportements diffèrent en fonction de ce qu’ils sont : êtres transcendants, immanents, querelleurs, jaloux, possessifs, protecteurs, etc. Voir un corps en prière permet de connaître le dieu avec lequel le croyant noue une relation.

Autopsie d’une dérive sexuelle10

11Pour ma part, j’ai plus particulièrement observé les effets de la centralité du corps comme medium de la relation du fidèle à la surnature dans un mouvement messianique sud-coréen, l’Église de la Providence, né dans les années 1980 d’une scission avec l’Église de l’Unification (surnommée « la secte Moon »). J’ai vécu à Séoul pendant deux ans, entre 1990 et 1992, puis j’y ai effectué des séjours réguliers jusque dans les années 2000. J’y retourne désormais tous les deux à trois ans, ayant diversifié mes terrains. Pendant mon premier séjour, alors que je travaillais sur des mouvements pentecôtistes dans le cadre de ma thèse de doctorat, j’ai été approchée par des adeptes de l’Église de la Providence. Ils m’invitaient à venir étudier leur groupe. Celui-ci entrait tout à fait dans la catégorie des communautés chrétiennes qui m’intéressaient. Les adeptes étaient de surcroît jeunes et sympathiques, et je dois dire qu’ils m’ont séduite, sans parvenir néanmoins à me convertir. C’était pourtant bien là leur but. J’ai compris plus tard qu’ils espéraient, parce que je parlais coréen, que je devienne leur missionnaire en Europe. Cela n’a pas marché, mais leur espoir m’a ouvert bien des portes, y compris celle de la maison du messie. J’ai suivi d’octobre 1991 à avril 1992 toutes les activités de cette communauté sans jamais me départir de ma position d’ethnographe qu’ils semblaient tous accepter, convaincus qu’ils étaient qu’à un moment ou un autre je comprendrais et croirais. Je suis ensuite rentrée en France, ce qui m’a permis de prendre une nécessaire distance, puis j’y suis retournée et j’ai pu découvrir encore d’autres facettes, recevoir d’autres confidences d’adeptes qui avaient un grand besoin d’une oreille attentive et étrangère. Tout s’est malheureusement mal terminé parce que j’ai aidé ces adeptes à sortir du groupe. On a essayé de voler mon passeport, on a réussi à mettre un virus dans mon ordinateur, mais sans doute était-ce là le prix d’une vraie ethnographie approfondie d’un groupe comme celui-ci, dont j’ignorais tout au départ. Il m’a fallu du temps pour comprendre que le fondateur était considéré comme le messie, et du temps encore pour saisir les dérives auxquelles conduisaient cette croyance. Il m’a ensuite fallu beaucoup de recul et plus de maturité sans doute aussi pour venir à bout de l’analyse que je propose aujourd’hui. C’est en appréhendant le rôle du corps dans la mise en relation du fidèle avec son dieu que j’ai analysé le cheminement par lequel une adepte en venait à accepter d’avoir des relations sexuelles non désirées avec celui qu’elle considérait être le Messie. Et si je peux affirmer que ces relations étaient non désirées, c’est que la confiance que j’ai pu instaurer avec ces adeptes pendant de longs mois leur a permis de se confier à moi, confidences sans lesquelles aucune compréhension n’aurait été possible. Ce n’est bien sûr ici qu’un exemple, mais le processus est très largement généralisable aux cas de dérives impliquant des formes variées de mises en danger de soi.

La révélation

12Il est important de préciser que les dérives dont il est question ici sont entièrement liées au désir de croire des adeptes. À un moment donné de leur histoire, ils ont vécu, au plus profond d’eux-mêmes, une révélation : soudainement, ils ont eu la conviction que le pasteur à la tête de l’église qu’ils fréquentaient était le Messie. Personne ne le leur a appris. Personne ne leur a présenté l’homme en question comme étant le Messie, car alors, ils ne l’auraient bien évidemment pas cru, se seraient moqués du crédule et on ne les aurait pas revus. Cependant, les réflexions entendues, l’observation des attitudes des fidèles face à cet homme, l’apprentissage progressif du contenu doctrinal, les témoignages ont fini par leur faire prendre conscience, de façon inattendue, dans un moment d’émotion d’une extrême intensité, que cet homme était le Messie. Tous ceux qui ont vécu cette troublante expérience la datent avec précision car ils se sont mis à pleurer, ils étaient bouleversés. Il faut en effet imaginer le choc que cela peut être de prendre conscience qu’un homme, apparemment banal, au charisme plutôt limité, sans beauté particulière, à la voix nasillarde, au dialecte incompréhensible, que cet homme-là est le Messie. Une telle expérience change d’un coup le sens de la vie du nouveau converti : il est un élu. Il a la chance absolument exceptionnelle d’être appelé à participer à la refonte du monde, à l’avènement d’un nouveau millénaire plus juste et heureux. Il n’en revient pas lui-même. C’est une sensation plus forte encore qu’un coup de foudre, une joie incommensurable qui l’envahit alors : le sens de son existence en sort transformé, grandi. Il est appelé à vivre, ici et maintenant, ceux que d’autres ont attendu pendant deux millénaires : le retour du Christ. C’est extraordinaire. Empli de ces sentiments bouleversants, il plane et il est possible de reconnaître immédiatement la transformation qui s’opère en lui tant la révélation illumine son visage. Il rayonne. Il est heureux. Comment un tel choc a-t-il pu se produire ?

Le rituel footballistique

13Sans entrer dans le détail de la doctrine, on peut indiquer qu’elle prend appui sur la division de la Corée, symbole de la guerre froide, pour signifier que le combat que les chrétiens redoutent à la fin des temps a commencé et qu’il culmine sur la péninsule. De fait, il est expliqué que la réunification des deux Corée signera la fin du règne de Satan et l’avènement d’une ère nouvelle. Cette insistance fait de la Corée un lieu stratégique pour le retour du Christ. Sans imaginer encore que ce temps soit arrivé, le néophyte est au moins sensibilisé sur le fait qu’il est peut-être au bon endroit pour l’attendre.

14Le culte dominical renforce encore ce sentiment. Il n’a rien à voir avec un culte ordinaire : il se déroule sur les stades de football des universités sud-coréennes, dure une journée entière durant laquelle le fondateur du mouvement, Jōng Myōng-Sōk, dit JMS, soit « Jesus Morning Star » (encore simple pasteur au regard des néophytes) joue au football, sans pause, sans déjeuner, de 10h. environ jusqu’à 16h., puis se lance dans une diatribe qui peut également durer une bonne heure. C’est une performance que l’on peut considérer comme exceptionnelle, surtout lorsque les autres joueurs se relaient pour leur part tout au long de la journée.

15Ce rituel footballistique n’est pas seulement une illustration concrète des préceptes de l’Église, à savoir la division du monde des hommes et du monde des esprits en deux parties dont l’une, communiste et mécréante, est dirigée par Satan et l’autre, libérale et chrétienne, protégée par Jésus. JMS gagne chaque match, et marque ainsi des points en faveur de la victoire du bien sur le mal. Le public, qui représente le monde des esprits, l’encourage pour qu’il ne flanche pas et qu’il empêche le diable de prendre le dessus. La victoire est toujours acquise de justesse car le combat est difficile. C’est ici tout un langage initiatique qui se met en place et transforme le sens même d’un match de football de sorte qu’il demeure inaccessible aux néophytes (fermeture imperceptible du troisième niveau du système de communication). Comme un jeu classique, les matchs ont pour mission d’enseigner aux néophytes les gestes et les attitudes qu’ils devront acquérir dans leur vie ordinaire. En cela, ce qui se passe sur les gradins est essentiel. On y découvre comment s’habiller, comment se comporter avec les autres, comment séduire ceux qui ne connaissent pas le mouvement (le stade est ouvert à tous et certains spectateurs assistent aux matchs sans savoir qu’il s’agit d’un culte). On observe également des attitudes et des exclamations d’adeptes qui peuvent surprendre et interroger : l’un se met à pleurer, l’autre s’agenouille devant JMS. Un troisième se réjouit d’avoir touché le ballon car cela lui assure de réussir ses examens. Un autre encore se débrouille pour s’approcher du Messie, persuadé que l’énergie de ce dernier lui ôtera son mal de tête.

16Parce que c’est un rituel, les fidèles attendent qu’il se passe quelque chose d’extraordinaire dépassant le cadre du match. Tout au long de la journée, des remarques formulées par JMS lui-même ou par les adeptes les plus avertis transforment le jeu en rituel aussi efficacement que l’hostie devient le corps du Christ lors de la célébration de l’eucharistie. Des exclamations ponctuent ainsi les matchs :

17« Regardez, c’est Jésus qui parle ! », peut-on entendre, par exemple, alors que JMS prend la parole, exclamation faisant comprendre qu’il s’exprime en co-présence avec le Christ, adoptant un style de langage et des attitudes qui ne sont pas les siennes mais que l’on reconnaît comme étant celles du Christ. Ainsi, le corps de JMS sert-il de medium à Jésus qui s’adresse dès lors directement aux fidèles.

18« Le temps se couvre ! On a mis Dieu en colère ! » est une autre remarque qui montre la puissance de ce qui se joue sur le terrain de football : la responsabilité de chacun est d’assurer la victoire du bien sur le mal. Lorsque JMS manque un but ou que l’équipe adverse en marque un, cela signifie que toutes les conditions n’ont pas été réunies par le public, insuffisamment concentré sur cette tâche. Un Dieu culpabilisateur se manifeste alors directement, grondant à travers les nuages, la pluie, l’orage, pour rappeler aux adeptes la gravité du combat qui se déroule sur le terrain.

19Une dispute éclate : « C’est Satan qui essaie de nous déstabiliser ! » peut-on alors entendre, rappelant au public qu’en situation de guerre, l’ennemi s’attaque aux failles de la défense. Il faut donc redoubler de vigilance.

20La notion de « cadre fictionnel », proposée par Gregory Bateson11, peut être mobilisée ici pour mieux comprendre comment ces matchs de football, qui se déroulent dans un lieu public, ouvert à tous, parviennent non seulement à inculquer des manières d’être et de faire dans la vie quotidienne, c’est-à-dire un nouvel habitus (fonction ordinaire du jeu), mais encore à performer des actions rituelles. Pour Bateson, le jeu a valeur de réalité dans l’imaginaire. Tout joueur est conscient qu’il existe un écart entre ce qu’il fait dans ce cadre et la vie à l’extérieur. Ainsi par exemple, même si la poupée prend vie pour la petite fille prise par le jeu, elle n’ignore pas qu’il s’agit d’un objet inanimé. En revanche, la co-présence entre JMS et Jésus rendue visible dans le cadre fictionnel du terrain de football inculque une connaissance sur la nature de JMS qui ne s’efface pas hors de ce cadre. Chacun à son rythme, selon la régularité de sa participation aux cultes, est amené à s’interroger sur le statut de JMS, voire à comprendre son rôle de médiateur entre la nature et la surnature. Par ailleurs, quand la petite fille joue à la poupée, elle imite le rôle de sa maman et ne fait pas autre chose que cela. En revanche, les matchs de football ne sont pas une simple reproduction métaphorique de la guerre froide. Pour les convertis, ils sont cette guerre : il se joue pendant ces matchs, dans le monde spirituel, une bataille contre le mal à laquelle ils participent. Ce n’est pas une simple métaphore, ce n’est pas imaginaire, ce n’est pas fictionnel. C’est vrai, mais dans une autre dimension où les fidèles évoluent en même temps : ils jouent au football ou encouragent des équipes à y jouer (cadre fictionnel) et en même temps, ils font la guerre contre le mal et remportent des victoires (cadre rituel performatif). Ils apprennent les attitudes et un nouveau mode d’exister à partir d’une nouvelle perception du monde qu’ils mettront en application dans la vie ordinaire (cadre fictionnel), et en même temps, ils mènent une guerre spirituelle contre le mal (cadre rituel performatif). À partir de ce cadre fictionnel, l’adepte se retrouve simultanément à deux niveaux interdépendants : celui de la surnature et celui du quotidien, tout en simulant une action, celle de jouer au football. Pour Bateson, ce type de confusion relève des pathologies des relations propres au schizophrène qui interprète en effet les actions métaphoriques réalisées dans le cadre fictionnel (jouer au football pour métaphoriser la guerre froide) « avec l’intensité qui normalement caractérise l’interprétation d’une vérité littérale.12 »

21Ces longues heures de culte permettent aux initiés de repérer de nouveaux convertis (ceux qui se sont mis à pleurer ou se sont agenouillés devant JMS). Ils les entourent avec attention non seulement parce qu’ils les savent perturbés et comme rendus ivres par le choc de la révélation qu’ils viennent d’avoir, mais aussi parce qu’ils sont heureux de se remémorer avec eux le moment de leur propre conversion. Leur croyance en sort renforcée car ils vérifient, grâce à l’expression rayonnante de ces nouveaux initiés, qu’il se passe bien quelque chose d’exceptionnel durant le culte. Car après l’expérience extraordinaire de la prise de conscience que JMS est le Messie, le plus dur est de ne pas cesser d’y croire. L’expérience émotionnelle s’estompe tout comme les effets d’un coup de foudre, et d’incessants efforts sont ensuite nécessaires pour que la délicieuse sensation de planer qui a suivi le choc initial demeure, pour que le doute ne la pervertisse pas. Tout le rituel prépare l’adepte à affronter la vie ordinaire armé de ses nouvelles connaissances : il sait les attitudes à adopter, il connaît les dangers sataniques qui le guettent. Il sait devoir être vigilant. Il reste en relation étroite avec les autres fidèles pour ne pas donner prise au diable. Pourtant, le doute ne cesse de le tracasser. Ainsi l’acte de croire n’est-il qu’incessantes variations. La volonté que les adeptes déploient afin de rester accrochés à l’éphémère certitude pendant laquelle ils ont vu le Messie en JMS est en soi un comportement excessif, radical, et l’effort que cela leur demande est d’autant plus important que la croyance cohabite avec l’observable : JMS est là, devant leurs yeux. Ils remarquent ses défauts, ses incohérences parfois. Il n’est pas parfait, loin s’en faut, et pourtant, il leur faut continuer de croire qu’il est le Messie parce que cette croyance, aussi folle puisse-t-elle paraître, leur a apporté le moment le plus intense de leur vie. C’est pour préserver cette intensité que le croyant est prêt à se mettre en danger, à commettre des actes qu’il sait ne pas être raisonnables. Le concept de manipulation n’est pas adéquat pour décrire ce qui le conduit à s’enfoncer plus loin, trop loin, jusqu’à perdre pied. D’abord parce qu’il suppose des manipulateurs et des manipulés, ce qui n’est pas l’exacte réalité : les convertis sont tous de bonne foi. Ce moment intensif, ils l’ont vécu dans leur corps, ils peuvent le décrire, le dater. C’est un souvenir qui se répercute inlassablement dans le présent. Il crée un effet de groupe, un effet de corps, d’entraide, de soutien, d’encouragement réciproque pour rester dans cette performance du croire. Dans cette perspective, on (se) ment de bonne foi. On (se) convainc que c’est vrai.

Le pas de trop

22Le culte footballistique a donc permis à certains néophytes d’éprouver dans leur chair la conversion. Ils ont pris conscience de la cohabitation de Jésus dans le corps de JMS. Ils ont découvert que ce corps est un medium qui donne accès à une réalité spirituelle inatteignable hors de lui. Ils sont dans un état second, sans avoir eu besoin de drogue ou d’alcool. Cette jouissance est cependant de courte durée. Après le culte, ils retournent à leur vie quotidienne dont l’adhésion au groupe ne les prive pas (il n’y a en effet aucune fermeture au niveau des activités économiques, bien au contraire, ils doivent se faire remarquer pour leur excellence et viser les meilleurs postes). Ils sont alors sensibles à toutes les petites dissonances cognitives qui ne manquent pas de leur venir à l’esprit. Comment rester sûr ? Comment obtenir la preuve irréfutable que JMS est le Messie, qu’une guerre spirituelle est en cours, à laquelle ils participent sans véritable conscience, comment croire en ce monde spirituel étonnant qui leur est décrit sans y avoir directement accès ? Et si c’était atteignable ? Si un moyen existait d’y croire vraiment, d’en être sûr ? C’est cet état d’esprit, cette insupportable oscillation de la croyance qui conduisent déjà l’initié à désirer toucher le Messie, ou s’il ne le peut, au moins le ballon, pendant les cultes. Cette dimension physique de la relation, et les petits miracles dont on veut croire qu’elle permet la réalisation, fait partie des outils que l’adepte se crée pour demeurer dans cette performance croyante. Alors, lorsqu’une jeune initiée est invitée à entrer dans la chambre du Messie, comment pourrait-elle résister ? La force-t-on ? Non, bien sûr. Elle est venue jusqu’à son domicile parce qu’elle espérait sans y croire ce moment d’intimité. S’il suffit de toucher le ballon que JMS a foulé du pied pour que se réalisent quelques petits miracles, que peut-on espérer d’un face à face privé avec lui ? Comment passer à côté de l’exceptionnelle opportunité d’être définitivement éclairée sur la nature de cet homme, de voyager avec lui dans le monde des esprits ? Cela ne se refuse pas. Si elle part maintenant, cela signifie évidemment qu’elle n’y croit pas. Et puis, elle a tellement attendu qu’il apparaisse. Voilà des heures qu’elle est là, avec les autres ; des heures qu’elle entend des histoires éblouissantes, étonnantes, incroyables. Elle a tellement envie d’y croire. Que ne ferait-elle pas pour y croire tout à fait ? Enfin, il apparaît, discute avec le groupe soudainement ragaillardi, tout sourire, tout ému de sa présence. Et voici qu’il lui propose, à elle, de le suivre ! Elle est intimidée bien sûr, touchée, surprise. La voilà qui entre dans sa chambre. Elle est face à cet homme petit, plutôt laid, sans charme, sans charisme, à la voix nasillarde qui lui demande de se déshabiller. Elle hésite, mais au point où elle en est, autant aller jusqu’au bout. En un moment tout est fait. Rien ne s’est passé. Même pas un petit plaisir exprimé par l’un ou l’autre de ces partenaires d’un instant. Rien. Aucune sensation. C’est fini. Elle se rhabille, sort, décomposée. Ce n’est pas le Messie. Pourtant, elle est soudainement entourée par un essaim d’initiés qui s’exclament : qu’elle est belle, rayonnante ! Mais que s’est-t-il passé ? Et voilà de nouveau le doute qui l’assaille. Si elle n’avait pas compris ?

23Cet acte sexuel se construit selon la même logique que les rituels footballistiques. Dans le cadre fictionnel que représente la chambre du Messie, à partir de l’action simulée qu’est la relation sexuelle, il est censé se passer autre chose. Si l’on sait que les joueurs ne jouent pas vraiment au football mais font autre chose, c’est parce que l’équipe de JMS gagne toujours. Si l’initiée sait qu’elle ne fait pas l’amour avec JMS mais qu’il se passe autre chose, c’est parce qu’il n’y a pas de jouissance exprimée. Durant les matchs de football simulés, les initiés sont censés participer en réalité à l’avancée du bien dans le combat contre le mal. Durant les relations sexuelles simulées avec JMS, le Messie est censé mettre l’adepte en contact avec le monde des esprits. Sauf que rien ne change en apparence. Il faut peut-être attendre un peu. Ce n’est peut-être pas immédiat. Est-ce le moment de renoncer à croire ? Pour certaines jeunes filles la dissonance cognitive conduit à une sortie brutale de cette situation schizophrénique. L’impression de trahison est aussi intense et insupportable que la sensation enivrante du moment de la conversion. Pour d’autres, l’essaim de fidèles qui s’exclament suffit à réduire la dissonance. Elles ne sont pas prêtes à renoncer. Pourtant, le choc est là, la dissonance latente et elle fera son chemin. Entre-temps cependant, comme l’avait déjà très bien analysé Louis Festinger, la volonté d’y croire encore fera de ces initiées des prosélytes d’exception portées par le désir et le besoin de voir dans le regard des nouveaux convertis la flamme qui s’en est déjà allée chez elles. Mais de la même façon qu’aucun grand athlète ne peut rester au top de sa performance sa vie durant, à un moment, l’adepte ne parvient plus à rester sur cette intensité croyante. Elle faiblit inévitablement, rien n’y fait. L’adhésion à un groupe, lorsqu’elle nécessite une telle performance du croire, ne dure qu’un temps, mais l’on s’y abîme.

Impossible victimisation

24Lorsqu’un·e adepte quitte une communauté croyante (et la croyance peut tout aussi bien être une idéologie) après une expérience douloureuse et un vif sentiment de trahison, son premier réflexe est de se penser victime. Il/elle a été manipulé·e. Si je m’oppose à l’utilisation de ce vocabulaire, ce n’est pas parce que je refuse de considérer qu’il y a des dérives, mais parce qu’il me semble extrêmement important que l’ex-adepte prenne conscience du processus qui l’a conduit·e jusqu’à participer, en connaissance, à la dérive. Pourquoi a-t-il/elle accepté d’aller aussi loin ? Pourquoi a-t-il/elle conduit ses condisciples aux mêmes excès ? Cela n’est pas le cas de tous. Nombreux sont ceux qui ne cherchent pas à croire à tout prix. Ceux-là ne se mettent pas dans la situation schizophrénique intenable qui conduit à la dérive. L’ex-adepte se doit d’interroger sa part de responsabilité dans cette volonté de ne rien lâcher du sentiment enivrant initial. Il/Elle a mis en place, sciemment, tout un ensemble de procédés pour s’assurer d’y rester accroché·e, y compris des actes prosélytes ; il/elle s’est imposée un challenge au-dessus du raisonnable, bref, il/elle a voulu être dans la performance, le défi, la concurrence, la surenchère, le désir d’être remarqué·e par celui qu’il/elle croyait exceptionnel, qui semblait détenir les clés de sa réussite et duquel il/elle aurait souhaité devenir le bras droit. Comprendre cette surenchère croyante, c’est peut-être aussi prendre conscience qu’elle fait partie du mode de vie de nos sociétés. S’obstiner sans repos, jusqu’au burn out, n’est-ce pas là, en effet, le contexte général dans lequel évoluent nos sociétés néolibérales et n’est-ce pas au fond ce qui rend possible de s’accrocher aux croyances les plus folles ? Les sociétés néolibérales dans lesquelles se répand ce type de NMR nous apprennent qu’il faut rêver grand, se dépasser, se challenger, prendre des risques. C’est au fond, ce que faisaient les initiées de l’Église de la Providence. Elles ont rêvé, se sont surpassées, se sont challengées, ont pris des risques et sont tombées. Les dérives des NMR existent bel et bien, mais elles ne sont rien d’autre que le miroir des dysfonctionnements de nos sociétés. Elles les pointent, et si nous ne cherchons pas à comprendre d’où elles viennent, elles ricocheront. L’Église de la Providence est morte de ses excès. Après avoir touché les universitaires, elle s’est intéressée aux lycéens. Ce que la société coréenne estimait jusque-là relever de la responsabilité des jeunes adultes est devenu intolérable concernant des adolescents. On ne peut qu’être d’accord. Il y a dans ce cas un abus sur mineur que la loi condamne. JMS a été arrêté. La dérive court toujours.

Notes

1 Concernant cette première partie, on pourra lire deux synthèses que j’ai rédigées et dont je m’inspire ici : « Sectes et cohésion sociale : la situation européenne », in Florence Faberon (éd.), Liberté religieuse et cohésion sociale : la diversité française, Presses Universitaires d’Aix-Marseille (PUAM), 2015, p. 105-116 ; et, « Les sectes », in Régine Azria et Danièle Hervieu-Léger (dir.), Dictionnaire des faits religieux, PUF, 2010, p. 1145-1151.

2 Définition du Petit Robert.

3 Colonomos Ariel, Églises en réseaux. Trajectoires politiques entre Europe et Amérique, Paris, Presses de Sciences Po, p. 45.

4 Idem, p. 46-47.

5 Walzer Michael, « Communauté, citoyenneté et jouissance des droits », Esprit, 1997, n°3-4, p. 122.

6 Levi-Strauss Claude, Anthropologie structurale deux, Plon, Paris, 1973, p. 415.

7 Mauss Marcel, 1934, « Les techniques du corps », Journal de psychologie, vol. XXXII, n°3-4. Conférence prononcée le 17 mai 1934 devant La Société de Psychologie en 1934, consultée en version numérique sur le site de l’UQAC.

8 De Certeau Michel, La faiblesse de croire, Paris, Editions du Seuil, « Essais », 1987, p. 35-36.

9 Idem, p. 30.

10 Cette seconde partie est inspirée de l’article suivant : Luca Nathalie, « L’entre-deux temps du croire », Nouvelle revue de psychosociologie, « Croyance et persuasion », n°16, nov. 2013, p. 17-35.

11 Bateson Gregory, Vers une écologie de l’esprit, tome 1, Paris, Le Seuil, « Essais », 1977.

12 Idem, p. 264.

Pour citer cet article

Nathalie Luca, « Des corps aux esprits », L'ethnographie, 3-4 | 2020, mis en ligne le 26 octobre 2020, consulté le 23 avril 2024. URL : https://revues.mshparisnord.fr/ethnographie/index.php?id=533

Nathalie Luca

Nathalie Luca est anthropologue. Elle dirige le Centre d’études en sciences sociales du religieux (CNRS-EHESS). D’abord spécialisée sur la Corée du Sud, elle s’est intéressée aux mouvements religieux transnationaux se développant en lien avec ce pays, avant de s’arrêter sur l’épineuse question des « sectes ». Ses travaux se sont ensuite orientés sur l’anthropologie du croire. Parmi ses publications, on retiendra ici trois ouvrages traitant des sectes : Le salut par le foot. Une ethnologue chez un Messie coréen, Labor et Fides, 1997, Individus et pouvoirs face aux sectes, Armand Colin, 2008, Les sectes, PUF, 2016 [2004].