L’expérience pédagogique entreprise au cours du XIXe siècle par Antonin Perbosc l’a placé parmi les inspirateurs des pédagogues de l’« éducation nouvelle », notamment Célestin Freinet, lui aussi instituteur dans le sud de la France. Antonin Perbosc (Antoine-Crépin 1860-1944) est né à Labarthe dans le Tarn-et-Garonne. Boursier du département à l’École Normale d’instituteurs de Montauban, il devient instituteur-adjoint à St-Nicolas-de-la-Grave et épouse Marie, institutrice, en 1882, année où il obtient un premier poste de titulaire à Arnac. Instituteur à Lacapelle-Livron puis à Laguépie, il arrive en 1893, à la suite d’une nomination contrainte liée au fait qu’il a auparavant donné des devoirs en patois à l’école – pratique interdite1 –, à Comberouger où il reste jusqu’en 1908. Il y enseigne avec sa femme, avant que les deux ne poursuivent leur travail à Lavilledieu-du-Temple jusqu’en 1912. En effet, l’« école se fait en français, et ignore la langue parlée par ses élèves, quand elle ne la combat pas2 ». En outre, l’occitan constitue alors le moyen d’expression des classes populaires du sud de la France à travers ses différents dialectes, et il entend le promouvoir. À ce titre, il fait partie des félibres3.
Ainsi, Antonin Perbosc promeut un certain nombre d’expériences pédagogiques nouvelles. Or, la « pédagogie innovante » et l’« éducation nouvelle », que ce soit au XIXe ou au XXe siècle, ont en commun de s’affranchir des normes et du cadre, attitudes qui entraînent la réprobation de la hiérarchie, comme en témoigne l’exemple de Perbosc. Cependant, au-delà des considérations générales sur les nouvelles formes de pédagogie et de celles, plus circonstancielles, sur la carrière de Perbosc, il peut être intéressant d’interroger le caractère novateur de ses travaux. À travers l’exemple d’Antonin Perbosc, nous verrons tout d’abord comment ces enseignements pensés comme renouvelés sont ancrés dans leur environnement. L’analyse des outils utilisés et des méthodes mises en place permettra ensuite de mieux percevoir la teneur de cette innovation. Enfin, la réflexion portera sur l’écriture et la transmission des écrits, au cœur même des projets pédagogiques.
Une école dans son environnement
Célestin Freinet, comme d’autres, s’inscrit dans la « descendance » d’Antonin Perbosc, pris comme exemple pour ses expériences pédagogiques. De fait, fort de sa connaissance du provençal, il cherche à le promouvoir à l’école et se fait fort, en cela, de renouveler sa pédagogie, au grand dam de l’administration scolaire. Il regrette alors les pratiques interdisant les patois. Dans un courrier destiné à Hélène Cabanes, institutrice à Abeilhan (Hérault) et membre du « groupe Antonin Perbosc », matrice du secteur pédagogique de l’Institut d’Études Occitanes (créé en 1945), Antonin Perbosc précise sa pensée :
Élevé moi-même dans la langue provençale qui a donc été ma langue maternelle4, j’ai toujours regretté, au fond de moi, d’avoir dû l’abandonner pour une deuxième langue que je manœuvre certes avec suffisamment de sûreté, mais qui n’a jamais pour moi la résonance intime de mon patois5.
Né dans l’Hérault et maître d’école avant de devenir professeur de lettres en école normale, Antonin Lavergne (1863-1941) a fait le récit dans « La Médaille » des craintes, dénonciations et tactiques des élèves. Une médaille confiée par le maître devait être remise à celui qui avait parlé patois afin qu’il finisse par être puni6. Perbosc cite le fait que celui qui détient ce « signe » se débarrasse du sou (à la place de la médaille) en le donnant à un autre élève qu’il aurait surpris prononçant un mot de patois. Freinet cite un inspecteur d’académie préférant considérer que l’élève ne sait rien plutôt que de tenir compte de sa connaissance de sa langue régionale. Freinet, dans la même lignée que Perbosc, ajoute que c’est bien parce qu’il s’agit du commencement de l’apprentissage qu’il intègre les langues maternelles dans les méthodes naturelles. Il souhaite que les journaux scolaires reflètent cette dimension pédagogique en accordant une place plus importante aux textes d’enfants écrits dans leur langue maternelle, en considérant que l’administration ne devrait pas blâmer cette initiative7.
S’il regrette les pratiques stigmatisant le patois, Perbosc évoque en revanche des pratiques pédagogiques plus positives selon lui. Il cite en 1914 le souvenir de plusieurs instituteurs dont la méthode mériterait d’être suivie, et notamment Georges d’Esparbès8, dont l’instituteur était davantage « professeur de vie qu’enseignant de livres9» :
Nous n’y apprenions guère qu’à grandir et à aimer vivre ; ainsi les choses à savoir venaient à nous sans qu’il fût besoin de courir à elles… Mais ce que nous savions, nous le savions bien…10 .
Le maître jardinait devant eux le matin et leur parlait de la terre :
Faut pas de neige en février, car elle brûle le blé, disait-il. – Ou bien : Le vent nettoie le froment. – Et encore : Mars venteux marie la fille du laboureur, voulant dire par là que c’était la moisson qui paierait la dot…11.
Esparbès enseignait ainsi à ses élèves l’histoire locale, les événements ainsi que les traditions. Il faisait référence à leur environnement direct, à la géographie locale, à l’histoire des familles, à leur terre et affirmait qu’on ne pouvait servir la France que si on aimait bien sa province. Perbosc rappelle même que :
Il y avait des jours où le maître nous emmenait aux champs et priait les campagnards de nous expliquer la moisson, la fauchée, le bottelage, les divers travaux de l’Épi… “Monsieur” laboura un jour devant les classes, son sillon fut net comme une règle…12.
C’est donc un modèle respectueux des connaissances techniques des élèves dans leur terroir qu’il souhaite inscrire dans le programme, afin d’ancrer ce savoir dans leur apprentissage et au plus près de leur environnement.
À vrai dire, cette manière de voir s’inscrit dans un souci constant au XIXe siècle de renouveler les pratiques pédagogiques.
Des méthodes actives promues de longue date
Certes, sur le long XIXe siècle13, une sorte de continuité des conceptions pédagogiques s’opère pour les écoles primaires. Chaque nouveau programme fait référence au précédent : en 1923, Paul Lapie cite, par exemple, les directives de 188714. Il s’écarte toutefois des directives de Ferdinand Buisson en adoptant une méthode plus progressive entre les cours élémentaire, moyen et supérieur. Ces cours utilisent la démarche intuitive (leçons de choses, expériences…) mais aussi la méthode active (jugée pourtant plus classique selon Lapie : « faisant un appel constant à l’effort de l’élève et l’associant au maître dans la recherche de la vérité15»).
Il est par ailleurs notable que, s’il a existé des pédagogues novateurs parmi les instituteurs laïcs, des religieux ont également été soucieux d’apporter de nouvelles solutions pour l’encadrement et l’enseignement à différentes époques afin de comprendre quel adulte pourrait devenir l’enfant dont ils avaient la responsabilité. Cette manière de penser se retrouve chez Don Bosco (1815-1888)16, Jean-Baptiste de la Salle (1651-1719), le fondateur de l’Institut des Frères des écoles chrétiennes, ou chez Nicolas Barré (1621-1686) qui écrivait qu’il fallait discerner le fruit que chacun pouvait porter afin de le conserver et le produire à maturité. Il ajoutait qu’il ne fallait pas « chercher de cerises sur un prunier »17.
Dans la pratique, la leçon de choses est donc souvent délaissée au profit de méthodes plus actives, et les instructions reviennent régulièrement sur ce point. Cependant, l’enseignement garde comme objectif la formation du futur adulte et non de l’enfant lui-même :
La pédagogie nouvelle, dont les tenants sont souvent en même temps des opposants déclarés du système social, fait confiance à l’élan vital, à la spontanéité enfantine, et se soucie du bonheur des élèves, la pédagogie positiviste se soucie de hausser l’enfant, par une pédagogie de l’effort dont la seule motivation est le désir de grandir, jusqu’au niveau de positivité adulte. D’où le primat de la langue écrite sur la langue parlée, du texte d’auteur sur le texte libre, de l’analyse rationnelle sur le tâtonnement expérimental. […] Les républicains donnent à l’école comme objectif l’adulte positif et non plus l’adulte croyant, ils ne lui donnent pas l’enfant18.
Pourtant, alors même que les méthodes actives semblent valorisées, certains de leurs défenseurs sont régulièrement mis à l’écart. Tel sera le cas de Freinet qui quitte l’enseignement public pour appliquer de manière plus libre des méthodes que les instructions officielles n’en préconisent pas moins. Tel fut le cas de Perbosc qui connut des difficultés – on l’a vu – avec l’institution mais dont les travaux furent par la suite relayés par les inspecteurs d’académie. Régulièrement, il y a donc une sorte de contradiction entre pratique et théorie pédagogiques.
Une nouvelle approche
Mais alors, que contiennent les apprentissages souhaités par Antonin Perbosc ? Si la pratique du patois a pu heurter, il est remarquable d’observer que les méthodes qu’il prône entrent en écho avec un fort attrait dans la deuxième moitié du XIXe siècle pour le folklore, les traditions locales et avec l’importance accordée aux territoires.
Outre ces leçons de choses, Perbosc imagine ainsi de nouvelles méthodes. Il demande à ses élèves de s’appuyer sur le folklore et les monographies locales. Sont ainsi recueillis des proverbes, formules et surnoms ; des jeux, des croyances, des traditions et des légendes, des contes et des récits populaires. Un autre type de collecte concerne les monographies locales, qu’il s’agisse d’histoire, de géographie, de météorologie et d’astronomie, d’hygiène et de médecine, d’histoire naturelle, de vie rurale, d’habitation et d’ameublement, d’alimentation, de délassements du travail (veillées, danses, fêtes), d’industrie et de commerce, de vie communale, du parler local, de monographies diverses. Tout ceci peut être en lien avec un musée du terroir. Cet attachement à la connaissance du folklore est ainsi particulièrement sensible dans l’expérience pédagogique que Perbosc met en œuvre, comme en témoigne sa collecte de proverbes et dictons du Pays d’Oc19.
Perbosc cite également l’ancien ministre de l’Instruction publique, Raymond Poincaré, et le philologue, Gaston Paris, pour avancer l’idée que la connaissance de sa province permet de mieux comprendre l’histoire du pays. En cela, il rappelle la mise en avant contemporaine de la notion de « petite patrie »20. L’œuvre entreprise par l’instituteur va donc dans le sens de la circulaire du ministère qui, de son côté, souhaite répondre à une adaptation des apprentissages, voyant dans la connaissance des anciennes provinces des raisons d’y être attachées et par là même d’aimer la patrie. Antonin Perbosc fonde dans cette optique la Société traditionniste (c’est-à-dire folkloriste) de Comberouger, avec l’instituteur et des élèves de l’école, nés entre 1888 et 190121.
Plus tard, la démarche de Perbosc se retrouve chez d’autres pédagogues comme Freinet : le potager, le journal mural et la coopérative scolaire, la coopération entre instituteurs, l’expression libre par l’imprimerie à l’école, la correspondance inter-scolaire, la boîte aux questions, la classe-promenade et le travail de groupe.
Ainsi, la classe promenade de Freinet ressemble aux recherches des élèves de Perbosc sur les métiers et autres observations de la vie rurale. Les visites auprès des différents artisans du village se multiplient et l’après-midi la classe et l’instituteur partent marcher autour du village pour des leçons de géographie, de calcul ou de botanique. Au potager, où le maître surveille, donne des consignes, marque le temps imparti pour cette activité Néanmoins, l’instituteur assure les mêmes pratiques que les élèves car il jardine avec eux. Le travail ne s’effectue donc pas seulement sur la production de la classe, mais avec elle, puisque l’instituteur s’implique, comme ses élèves, dans cette activité22. « Apprendre en faisant » lui est inspiré du philosophe John Dewey23 (1859-1962).
Freinet, comme Perbosc, développe le recueil de contes populaires faisant appel à la tradition orale. Antonin Perbosc a, en effet, publié les contes rapportés par ses élèves et traduits par eux. Il existe cependant une différence notable entre les deux hommes : Perbosc effectue un tri dans les récits rapportés contrairement à Freinet qui le refusait, ainsi qu’en témoigne l’absence de censure du rêve de meurtre de l’élève lors de l’affaire Saint-Paul.
La correspondance inter-scolaire est également un élément qui place Perbosc comme l’un des inspirateurs de Célestin Freinet24 : il fait correspondre ses élèves avec ceux des écoles d’Auvillar25. Quant à la boîte aux questions mise en place par ce dernier, elle rappelle les carnets remplis par les élèves chez eux – pratique développée chez Perbosc –, qui permettaient à où leurs familles d’apprendre la traduction en français de mots occitans mais aussi de prendre connaissance des questions qu’ils pouvaient poser au maître. Quant au travail de groupe développé par Freinet, il est bien au cœur de la démarche de la société traditionniste promue par Perbosc, les élèves plus âgés aidant les plus petits dans la transcription des textes. Enfin, Freinet eut recours à des bibliothèques scolaires, un projet qui tenait à cœur à Perbosc mais qui n’a pu aboutir en raison de son départ. Perbosc aurait souhaité que des livres du peuple26 y figurent. Dans les deux cas, il s’agit bien de faire une école pour le peuple27.
L’écriture et la transmission
Il s’agit donc de sauvegarder le folklore, littéralement le savoir du peuple, pour s’en servir comme « encyclopédie scientifique, littéraire et morale formée par les générations28». Le constat est, en effet, établi que les enfants connaissent très bien les contes de la littérature orale dont ils sont destinataires, que leur mémoire est efficace et que le recours à leur écriture immédiate permet de ne pas subir l’altération ultérieure des souvenirs.
Le renouvellement des pratiques scolaires souhaité passe donc par la volonté de faire de l’école un lieu de transmission des traditions. C’est à cette fin qu’est créée la Société traditionniste de Comberouger, avec comme objectif, d’après ses statuts, de recueillir dans la commune ce qui se rapporte à l’histoire et au traditionnisme29. Il s’agit de la première société groupant des écoliers, fondée le 15 janvier 1900. Jusqu’en 1908, elle a compté 51 membres dont 22 filles et 29 garçons, constituée de l’instituteur et des élèves de l’école, nés entre 1888 et 190130, et dont Marie Tournié est la présidente à 13 ans31. Perbosc a dressé un tableau indiquant les années de naissance des élèves (figurant dans le cahier), leur lieu de naissance (la plupart sont nés à Comberouger, certains dans les villages alentour), outil très utile pour la connaissance de cette société traditionniste, puis a ajouté leur adresse lors de la publication et leur profession. Hormis un étudiant à Montauban, ses anciens élèves sont devenus ménagères, cultivateurs, valets de ferme, couturières et repasseuse.
Une lettre de Marie Tournié du 25 mai 1900, présente dans le cahier de recueils de ces élèves, permet de préciser les attendus de la Société : on y retrouve une forme d’émulation entre les écoliers pour s’intéresser aux contes recueillis. L’élève demande à ses camarades de raconter les histoires entendues lors des veillées d’hiver. Elle-même commence la série des récits envoyés de Comberouger, en présentant celui que lui a raconté en patois sa voisine et qu’elle retranscrit en français, avant de conclure : « Vous me direz si mon conte vous a plu. Nous attendons maintenant la lettre de celle d’entre vous qui se fera conteuse à son tour32 ».
L’activité des élèves de Perbosc ne se limite toutefois pas au recueil de contes. Les élèves de Comberouger recueillent également les devinettes :
Qu’est-ce que c’est : un plein four de miches blanches ? – Les dents».
-« Qu’est-ce qui est ouvert pendant la nuit, fermé pendant le jour ? – Les sabots»
- « Qu’est-ce que c’est : quatre demoiselles dans un château qui n’a ni porte ni poterne ? – Les noix».
-« Qu’est-ce que c’est : sillons, tout sillons, et jamais la charrue n’y est passée ? – Le toit »
-« Qu’est-ce que c’est : quatre demoiselles qui se poursuivent, qui se poursuivent, et qui ne peuvent jamais s’atteindre ? –Les ailes du moulin à vent33.
En tout état de cause, dans la perspective de recueil des récits, la veillée joue un rôle central. Elle permet notamment la transmission des contes dans la France rurale. C’est ainsi que la voisine de Marie Tournié a raconté l’un d’eux, recueilli lors de l’une de ces veillées, et adressé à ses correspondantes d’Auvillar. Ces veillées se déroulaient de la Toussaint environ (fin des travaux d’automne) à Pâques (pour les semailles)34. Les voisins ou les amis se rassemblaient au minimum une ou deux fois par semaine. Un roulement s’opérait dans les familles. Lors des longues soirées d’hiver, le feu et les bougies devaient être économisés35. Ces veillées sont l’occasion de diverses activités. Les travaux d’aiguilles occupaient certains tandis que d’autres préparaient des confitures, ou décortiquaient les noix. Il pouvait y avoir de la musique ou divers amusements. On y apprenait les techniques traditionnelles. La culture orale s’y perpétuait sous forme de contes.
Or, la concurrence des écoles est très forte : les histoires y sont davantage tirées de livres d’école que des vieux contes traditionnels. Des maîtres luttent contre les veillées, en raison notamment de la présence d’histoires et de chansons grivoises qui pouvaient y être entendues. Des prêtres s’élèvent aussi contre ces dangers du fait de la mixité de ces réunions tardives et des danses qui pouvaient leur être associées36. Enfin, cette opposition concerne le contenu des histoires racontées au cours de ces soirées, véhiculant peurs et superstitions peu en accord avec la morale scolaire.
Aussi, il n’est pas neutre qu’Antonin Perbosc, qui souhaite que les contes continuent de se diffuser à travers les générations, accorde une place décisive à ces veillées, et ce d’autant que, à la fin du XIXe siècle, celles-ci déclinent, en grande partie sous l’effet des changements de récoltes et d’alimentation, modifient également leur raison d’être avant que la Première Guerre mondiale ne marque une nette rupture. Il souligne que cette expérience constitue le meilleur souvenir de sa vie d’instituteur, même si le contexte de la publication des contes en 1914 est dramatique : deux des élèves sont déjà morts et sept sont alors soldats37.
Bien des années après, les classes qui suivent la méthode Freinet ont commun avec les contes de la vallée du Lambon de commencer par la formule « il y avait une fois 38». Des écoles ont, plusieurs décennies plus tard également, continué le recueil de contes39. L’expérience de recueil des contes à Comberouger inspire par exemple Jean Hinard, instituteur à Loze, qui demande le même exercice à ses élèves en 1924 avec Les Contes de la vallée de la Bonnette. Perbosc, qu’il admire, le conseille40.
Conclusion
Plusieurs témoignages, particulièrement d’écrivains, permettent de saisir les approches pédagogiques au XIXe siècle. Ernest Renan a ainsi évoqué dans ses souvenirs de jeunesse l’éducation qu’il a reçue au petit séminaire (1838-1841) :
Ces dignes ecclésiastiques étaient les hommes les plus respectables du monde. Sans rien de ce qu’on appelle maintenant pédagogie, ils pratiquaient la première règle de l’éducation, qui est de ne pas trop faciliter des exercices dont le but est la difficulté vaincue. Ils cherchaient, par-dessus tout, à former d’honnêtes gens. Leurs leçons de bonté et de moralité, qui me semblaient la dictée même du cœur et de la vertu, étaient pour moi inséparables du dogme qu’ils enseignaient. […] La vie n’a de prix que par le dévouement à la vérité et au bien. […] je vous remercie d’avoir imprimé en moi comme une seconde nature ce principe, funeste à la réussite mondaine, mais fécond pour le bonheur, que le but d’une vie noble doit être une poursuite idéale et désintéressée41 .
Parmi ces enseignants marquants et novateurs, et même s’il n’est pas signalé par Renan, figure Antonin Perbosc, qui est souvent parti des centres d’intérêts des élèves en lien avec leur environnement. Perbosc a par ailleurs mis au point certains outils pour cet apprentissage, telles l’écriture et la publication de textes dont les élèves sont auteurs ou passeurs. Autant d’éléments qui peuvent être mis à l’actif d’Antonin Perbosc et qui peuvent être perçus comme des avancées pédagogiques, alors même qu’il s’appuie largement sur les traditions. Or, si ses manières de faire ont pu étonner à cette époque, elles ont connu une véritable postérité.