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Faire de l’ethnographie avec la psychanalyse. Les psychologies d’un point de vue empirique

José Francisco Miguel Henriques BAIRRÃO
septembre 2015Traduction de Maria Ignez Mena BARRETO

DOI : https://dx.doi.org/10.56698/cultureskairos.1180

Résumés   

Résumé

Le terme psychanalyse désigne en même temps une théorie psychologique, une technique thérapeutique et une méthode de recherche scientifique. La psychanalyse et l’anthropologie ont une longue histoire de controverses et de collaboration au long de laquelle des thèses psychologiques ont été accueillies ou vivement réfutées par les anthropologues. Ces débats n’ont que très rarement distingué avec rigueur la composante méthodologique des autres aspects de la théorie et, lorsqu’on l’a fait, on a peu pris en compte la contribution lacanienne. Cet article explore les retombées épistémologiques des théories psychanalytiques, radicalisées par Lacan, pour à partir de là envisager une contribution méthodologique possible pour la recherche en ethnographie.

Abstract

The locution psychoanalysis terms concomitantly a psychological theory, a therapeutic technique and a scientific research method. Psychoanalysis and Anthropology have a long tradition of controversy and collaboration or confrontation with one another, which, however, almost always involved psychological theses accepted or attacked by anthropologists. Seldom these debates have carefully separated the methodological component from the others and, when that is the case, rarely they have considered the Lacanian contribution. This article explores epistemological derivations of psychoanalytic theories radicalized by Lacan, for the purpose of expliciting its potential methodological contributions to the ethnographic research.

Resumo

O termo psicanálise denomina concomitantemente uma teoria psicológica, uma técnica terapêutica e um método de investigação científica. A psicanálise e a antropologia têm uma larga tradição de polêmicas e de colaboração ou enfrentamento entre si, as quais, no entanto, quase sempre envolveram teses psicológicas acatadas ou atacadas por antropólogos. Poucas vezes esses debates se desenvolveram separando criteriosamente o componente metodológico dos demais e, quando esse foi o caso, raramente se o fez levando em conta a contribuição lacaniana. Neste artigo exploram-se decorrências epistemológicas de teses psicanalíticas radicalizadas por Lacan, na perspectiva de uma explicitação das suas potenciais contribuições metodológicas em pesquisas de cunho etnográfico.

Index   

Index de mots-clés : ethnographie, théorie psychanalytique, épistémologie, méthodologie, écoute psychanalytique.
Index by keyword : Psychoanalytical Theory, Methodology, Ethnography, Psychoanalytical Listening, Epistemology.
Índice de palavras-chaves : teoria psicanalítica, epistemologia, metodologia, etnografia, escuta psicanalítica.

Texte intégral   

1D’un point de vue strictement épistémologique, l’on peut émettre l’hypothèse selon laquelle l’anthropologie et la psychanalyse partagent une proto-histoire commune, qui remonterait à un temps d’avant leurs polémiques historiques. C’est-à-dire depuis que Brentano (1874/2009) a assis les bases épistémologiques de la psychologie sur des principes théoriquement et méthodologiquement hostiles à une réduction du sujet et de l’action (humaine) à des données objectives (le comportement).

2Les remarques fécondes de ce philosophe (qui a été professeur de Freud) ont inspiré et légitimé la fondation de la psychanalyse sur une voie indépendante des psychologies qui cherchaient alors et continuent encore aujourd’hui de chercher à se justifier en mimant les procédés des sciences naturelles. Au fil du temps, ses contributions se sont déclinées en des présupposés méthodologiques dans lesquelles l’anthropologie et la psychanalyse, par des chemins et avec des résultats pas toujours identiques, sont supposées avoir accepté de se reconnaître, tel que : le refus de confondre rigueur avec probabilité de fréquence de données ; valorisation de l’étude systématique de cas exemplaires ; la prise en compte des langages en tant que moyen et champ d’investigation (condition méthodologique et composante indissociable des phénomènes examinés), aussi bien que la reconnaissance du fait que l’analyste ou l’ethnographe est un instrument incontournable de la recherche : sa participation et ses interactions sur le terrain ou dans la clinique ne peuvent pas être ignorées.

3Compte tenu du fait qu’elles intègrent une même « famille épistémologique » et qu’elles partagent un corps de postulats pas toujours dûment explicité, on n’est pas étonné si ces disciplines « jumelles siamoises » tantôt s’admirent et s’associent, tantôt s’affrontent, tissant une histoire riche d’échanges, de collaborations et d’interpellations fructueuses, mais aussi de malentendus notoires.

4En ce qui concerne le propos qui suit1, il suffit de souligner le rôle critique salutaire que joue l’anthropologie lorsqu’elle dénonce la réification de certaines idées psychologiques et certaines constructions métapsychologiques et psycho-pathologiques hypothétiques et transitoires au mépris du contexte justifiant leur utilité ou leur pertinence. Cette approche critique met en avant ce que la psychanalyse propose de moins consistant , des thèses datées historiquement, attribuant à son interlocutrice des assertions dogmatiques et trop générales à propos d’une supposée nature humaine et des lois du fonctionnement psychique. Assertions que les anthropologues refusent, bien que, souvent, ils les reçoivent sans bien les comprendre des mains de certains classiques de leur discipline, qui ont adopté une attitude plus amicale envers la psychanalyse et se sont permis d’incorporer certains de ses concepts à leurs analyses. Cette approche ignore notamment que le terme de psychanalyse est employé en trois sens qui s’entrelacent historiquement, mais qui sont indépendants : dans le sens d’une une théorie psychologique (qui inclus l’inconscient), d’un procédé thérapeutique dérivé de la précédente et dans le sens d’une méthode d’investigation scientifique (Freud, 1922/1987)

5Le fait que dans l’essai qui est ici entrepris les pas de ses prédécesseurs ne soient pas reconduits de la même façon ne diminue en rien la dette à leur égard. Ces auteurs sont nombreux et bien connus, il serait ennuyeux et inutile de les citer avec une quelconque prétention à l’exhaustivité. Leur esprit pionnier et leur courage intellectuelle sont une source d’inspiration et il n’est tout simplement pas possible de les relire sans profit. A l’exclusion des psychologues ou des psychanalystes qui se sont contenté de ramener l’anthropologie à la clinique et les anthropologues qui se sont servis de la psychanalyse comme d’un moyen rhétorique afin d’illustrer a contrario certaines de leurs thèses, parmi les travaux qui ont relevé des défis et se sont penchés sur des articulations méthodologiques interdisciplinaires méritent d’être cités ceux de Devereux (1970, 1972, 1980), à titre d’hommage, par la place de choix qu’ils occupent. Il serait également juste de citer ceux d’auteurs tels que Ewing (1987, 2002), Obeyesekere (1981, 1996), Favret-Saada (1977), Kracke (1987) et Geffray (2001).

6On est forcé d’admettre qu’une partie de cette littérature a tout de même généralisé certaines constructions théoriques avancées par la psychanalyse comme étant des attributs du psychisme supposés universels, sans tenir compte de leur caractère transitoire et de l’usage instrumentale (tant souligné par Freud) pour les besoins de la clinique psychanalytique (Bairrão, 2005). C’est également un fait avéré que la plupart de ces contributions méthodologiques en dialogue avec l’ethnographie ne distinguent pas toujours clairement la composante strictement méthodologique des énoncés psychologiques, énoncés en principe superflus pour les besoins d’une discussion strictement épistémologique. L’horizon de la psychanalyse réduite à une psychologie clinique nourrit ces discussions. Très certainement, ce n’est pas de ce bord que l’on pourrait attendre les meilleures contributions.

7Cet article n’a pas l’intention de reprendre ce débat. Des trois définitions de la psychanalyse, il s’atèle à celle qui a trait à la méthode psychanalytique pour examiner si et dans quelle mesure cette discipline pourrait contribuer à un renouvellement dans le champ de l’ethnographie, non seulement en promouvant un dialogue interdisciplinaire, mais, surtout, en ouvrant sur des nouvelles bases une réflexion sur la recherche de terrain.

L’illusion cognitive

8D’après Lacan, qui reprend l’idée à Freud, il existe un monde au-delà d’une construction psychique, mais il n’y aurait pas de voie d’accès cognitif à lui. La pensée ne reproduit qu’une activité qui se contente de reparcourir des voies de satisfaction. Lacan élargit l’impasse en tirant de cet échec un abandon radical des considérations épistémiques au profit d’une psychanalyse attelée au faire et non plus au savoir qui finit par aboutir à une manière d’éthique (Bairrão, 2004).

9La psychanalyse lacanienne naît de la renonciation au projet de construction d’une science de la personnalité, qui va jusqu’à la négation non seulement de la possibilité de l’établissement de la psychologie en tant que science positive, mais également de la construction de toute connaissance et, de ce fait, de la licéité des constructions théoriques de la discipline. Il est cependant indéniable que la discipline de penchant plutôt éthique que psychologique qui émerge de cette trajectoire, à sa manière, reprend, quoique précautionneusement, une idée de savoir et peut-être de connaissance, même si elle ne sera plus jamais formulé dans les termes assertifs et naïfs antérieurs à la découverte freudienne (Bairrão, 2003).

10En tout état de cause, la psychanalyse n’a pas d’autre alternative sinon celle de se comprendre de façon plus large que la dérive vers la conception de la personne moderne, individualiste et psychologisante ; et il est concevable de tenter de l’envisager en ce qu’elle peut contribuer à la recherche dans le champ social ou la prendre au sérieux au moins en la qualité d’interlocutrice de poids dans la recherche et la réflexion en sciences sociales.

11Si spécificité il y en a, celle de l’entrée de la psychanalyse dans la recherche en sciences sociales serait d’avoir avancé la notion de le sujet, une toute autre chose, avec un tout autre statut, bien plus qu’une hypothétique et ethnocentrique conception de la personnalité.

12Ce préalable étant posé, il s’agira tout d’abord de se demander, de façon exploratoire, si et dans quelle mesure une relecture lacanienne de la psychanalyse apporterait une contribution à la recherche ethnographique et, dans ce cas, quelle serait l’originalité et la spécificité de sa contribution pour le débat sur le statut de ses énoncés, compte tenu du caractère effectif de l’inconscient et de la particularité de la conception de l’altérité en psychanalyse.

13Afin d’examiner ce point, on se penchera sur quelques schémas et quelques graphes lacaniens, en dehors de toute diachronie, ceux-ci étant d’un usage courant chez l’auteur pour systématiser, condenser et d’une certaine façon dépasser l’ineffabilité relative de ce dont il s’agit, en vertu de la spécificité de la méthode psychanalytique, qui comprend dans sa formule l’inconscient et de façon corrélée un « calcul » de l’inconnu.

14Cela implique une certaine conception du langage et de la communication et il serait un tant soit peu grossier d’en tenir compte en tant que thèse et de l’ignorer dans cette étude. Il est indispensable de tenir à l’esprit que la terminologie lacanienne considère certains opérateurs irréductibles à des concepts. D’où le nomadisme, les termes nombreux, l’absence de définitions définitives. Sur chaque construction théorique pèsent davantage les intervalles, ce qui échappe au dire, ce qui justifie et motive les répétitions sans fin. La raison en est la possibilité d’accueillir le négatif, le non conceptualisable, par la compréhension judicieuse du fait que la lacune et l’inconnu sont inclus dans la démarche psychanalytique ; au sujet de ces « non concepts », on doit s’interroger moins sur ce qu’ils sont que sur ce à quoi ils servent, en nous appuyant sur des paliers non diachroniques de réitérations, en isolant des formulations identifiables entre des étapes distinctes de leur élaboration, avec une visée exploratoire et en tant qu’essai de systématisation préliminaire. L’attention se portera en particulier et de manière transversale sur le schéma L, le graphe du désir et la structure de l’énonciation (les quatre discours), par le truchement de comparaisons et de superpositions mutuellement éclairantes, avec un certain accent porté sur l’ainsi dénommé discours analytique, qui mieux et de manière plus spécifique pourrait élucider la méthode psychanalytique.

Un Autre

15Une parcelle significative de l’apport de la psychanalyse à la recherche en sciences sociales s’annonce déjà dans le schéma L (Lacan, 1978). Rappelons-le, très brièvement, qu’il illustre la délimitation et la superposition entre l’ego (le moi) et le sujet (je), corrélées de la distinction entre deux plans selon lesquels l’altérité est envisagée, plans qui dans l’expérience humaine ne peuvent jamais être compris de manière dissociée. Un des ces plans est celui du moi et des autres (intersubjectivité), dont l’étendue et la variabilité dépendra du panel de personnages, du type et du nombre d’interlocuteurs potentiels envisageables dans un encadrement culturel donné ; et le second, un Autre, inscrit dans la structure sous-jacente à ce panel et définissant les types d’agents et les catégories d’interpellation concevables dans ce contexte (généralement réduits ou du moins confondus, par la tradition lacanienne, avec « le langage » ou « le symbolique », alors qu’il s’agit à plus proprement parler d’une sorte de grammaire culturelle de l’altérité, si j’ose dire, immanente à la dynamique intersubjective.

16Ces deux plans s’articulent et s’entrecroisent sur deux axes : l’axe intersubjectif, le « tu » et l’image du moi, sous la médiation de l’autre ; et l’axe de l’énonciation, le plan du sujet, à proprement parler, irréductible à l’interface entre des individus empiriques et à la psychologie individuelle.

17 Le symbolique en tant qu’altérité générique s’articule à une représentation de soi médiatisée par un personnage qu’il façonne à son tour. Cette articulation signale qu’un événement apparemment actuel s’insère dans un réseau de relations sociales. Par le truchement de ce schéma, relativement simple, on peut d’ors et déjà esquisser quelques contributions et leçons que la méthode psychanalytique peut apporter à la recherche de terrain : l’interlocution empirique a lieu en même temps que l’inscription dans une structure. Cette insertion se maintient par la durée de l’acte énonciatif, qui ne se confond pas avec un énoncé actuel et esthétiquement tangible. C’est en tant que « tu » qu’il y a sujet. Ou du moins, c’est ainsi qu’il se fait tangible, déductible de ce que de lui l’on écoute sous la forme de messages de l’Autre qui le signifient, bien qu’il soit irréductible à quoi que ce soit, et particulièrement à un moi (il n’est pas un objet, même si celui-ci se conçoit comme une personne). Il ne dépend donc pas d’un concept du psychisme ou de la supposition d’une matérialisation de la subjectivité.

18De même, paradoxalement, du point de vue d’une temporalité linéaire, n’importe quel énoncé à proprement parler est logiquement antérieur à une inscription effective de son émetteur. C’est-à-dire que le sujet a lieu avant d’être et pour cette raison il est ontologiquement et cognitivement inaccessible.

19 Cela même qui logiquement vient après, une proposition, semble être diachroniquement antérieur et provenir d’un être sujet qui, à son tour, loin d’en être l’origine, en est le résultat.

20Ce statut « pré-ontologique » du sujet est ratifié en des moments ultérieurs de l’œuvre lacanienne. Il s’élargit et se laisse mieux percevoir dans le graphe du désir (Lacan, 1960/1966), sur lequel il est illustré que l’accouplement entre l’impulsion et le symbolique induit l’opacité de l’indicible et du silence dans chaque dit, en sus de propositions. Ce point devient encore plus crucial lors de l’acceptation de l’opacité intrinsèque à chaque proposition s’étend à une reconnaissance du « recul » de l’Autre en tant qu’« objet » non susceptible de représentation (ce n’est pas Dieu, ce n’est pas la langue, ce n’est pas la culture, ce n’est pas la structure ! … Ce n’est même pas du symbolique ; rien de l’ordre de l’« être » le dit complètement).

21Prenons maintenant la structure de l’acte énonciatif condensée dans la construction des ainsi dénommés quatre discours (Lacan, 1991). Il s’agit d’une articulation structurale de quatre opérateurs tour à tour interchangeables sur quatre positions fixes dans la structure. Ceux-là se déclinent en agent, autre, production, vérité. Bien qu’aucun mot ne puisse désigner exactement les opérateurs, par nécessité d’un choix utile, l’on considère ici une de leurs traductions plausibles et l’on les nomme sujet (S barré), étant (S1), symbolique (S2) et l’irreprésentable de soi (a). Dans le cas de l’articulation de ces quatre opérateurs et ces quatre positions dans l’ordre appelé par Lacan discours de l’analyste2, ce qui est réellement décisif, c’est que cet opaque à la représentation et inaccessible cognitivement est situé en tant qu’agent. Il convient de noter que l’on parle d’agent, et non pas de sujet, distinction que l’on doit au fait que l’action ne se supporte pas, au départ, d’un sujet constitué, celui-ci étant plutôt son effet que son origine.

22Au contraire, d’un point de vue psychanalytique, le sujet se situe Autre et en tant que « tu ». Eu égard de cette reconnaissance de l’activité énonciative, au lieu d’une connaissance, une récréation se parfait : les amarres de l’être changent et les destin s’altère (Lacan, 1957/1966), avec une portée clinique, et dans tous les domaines de ce qui peut et doit se refléter comme réalisation humaine.

23A la place de la vérité, sous-jacente au résidu de insignifiable supposé réel et agent effectivement, l’on suppose il y avoir la totalité pas totalisable du symbolique, y compris ce qui reste à dire, cerne du rémanent de non-dit qui est l’inconscient. De la sorte, de manière allusive, bien plus qu’une donnée psychologique empirique, potentiellement contestable par la science positive, Lacan porte l’inconscient à un statut de signalement d’une négativité au-delà des sens : le non existant parle.

24Par l’écoute de l’inconscient le sujet se constate énonçant, se parfaisant par un dire qui a son origine dans l’Autre, mais sans se réduire au dit, sous peine de se voir réduit à l’entité empirique ou conceptuelle. De cette manière, le sujet se soustrait à l’Autre, il n’y a pas de sujet sans un quelconque langage, mais aucun langage ne comprend le sujet (Bairrão, 2011). Il n’est pas une entité, psychique et de n’importe quelle autre espèce. En tant que fonction, il parcourt la structure comme activité ou coupure. C’est la raison pour laquelle on parle au sujet de côté, en s’adressant aux signifiants qui lui sont associés, car « en lui-même », il est indicible, irréductible.

25C’est grâce à cette négativité que l’on peut aller au-delà (ou, si l’on préfère, rester en deçà) d’une simple description. Une observation qui fait l’économie du sujet lacanien, de son éthique et de sa machine à défaire des ontologies réifiées, pourra éventuellement parler de manière critique de la relativité de sa perspective et dénoncer des points de vue prétendument neutres et impersonnels, mais elle ne rendra pas compte de l’effet de dire qui reconfigure un état de choses en un « étant » discursif.

26Pour autant, il est fondamental que l’Autre, de même, ne soit jamais réduit à une quelconque forme de signifiance positivée (c’est-à-dire qu’il reste irréductible à une ontologie). Autrement, l’autre sera définit comme « Dieu », « structure », « symbolique », « culture », « société » ou même « L’Autre », une idole pâle de lui-même. L’autre ne s’« observe » comme structure qu’imaginairement. En réalité, il succède en tant qu’événemance : il « est » intrinsèquement négativité constitutive du sujet. L’altérité est donc constitutive du sujet, qui est toujours autre par rapport à lui-même ; remarque cruciale qui, sur un plan méthodologique, justifie le fait que, du point de vue psychanalytique, le différent et l’étranger ne soient pas pensés comme extérieur ou ne pas concernant l’observateur.

Autre Temps

27Sur les bases de cette mise au point préalable, on portera au jour maintenant certaines des thèses lacaniennes qui passent parfois inaperçues ou sont simplement décrites sans que l’on en tire les conséquences qui s’imposent, mais dont on doit tenir compte si l’on se place sous l’angle de leurs implications méthodologiques.

281 : Le lieu de la sexualité en psychanalyse, ou mieux, sa théorie de la sexualité équivaut à une théorie de la (non) connaissance. L’impossibilité de l’objectivation de la connaissance va être signifié dans le cadre de la psychanalyse par le bateau de la non existence du rapport sexuel, qui à tous les effets traduit et résume d’un point de vue psychanalytique son épistémologie.

292 : Indépendamment d’une définition exacte de sa nature et irréductible à la paire chercheur/sujet (de recherche) il y a toujours un troisième participant inconnu mais repérable en ses faits et effets énonciatifs en chaque activité de recherche. Ce résidu manifeste son incidence dans la forme des événements. Un « état de choses » dans la réalité est un « étant discursif ». Symboliser, nommer, narrer, sont un agir, des événemances.

303 : L’inconscient lacanien, au-delà du manque dans le discours, est fondamentalement le réverbérant dans le cerne insignifiant du sujet d’où se dégagent des énonciations, des restes ou des traces positives d’une négativité irréductible. Celle-ci est autant un résidu d’irreprésentable qu’un déclencheur d’un nouvel essai de totalisation de la signifiance, qui échouera. Cet aspect est crucial pour comprendre une implication importante de l’effet de la recherche sociale sur la réalité humaine. La recherche la restitue, dans la mesure où avec la méthode psychanalytique l’on démasque, sous la représentation d’une donnée, une énonciation qui consolide un limbe d’hypothèses en objectivité instituée.

314 : En vérité, le sujet n’est pas un interviewé, un informateur et encore moins une conception de la personne. L’on le repère en la qualité de supposé à l’agir et il n’y a pas d’action extrinsèque à une articulation temporelle. C’est en tant qu’auditeur que le sujet « se perçoit » être, demeurant indicible (Bairrão, 2004). Être c’est entendre-sens (dans le jargon technique psychanalytique, « jouir »), l’être donc est « être-de-fiction », narrative, non émise par un autre empirique, mais supportée dans un Autre configurateur des matrices d’une « réalité » culturelle donnée.

325 : Le sujet n’est pas une entité psychologique, linguistique ou métaphysique. Pour le sujet, il est impossible d’être (Bairrão, 2004). Il y avoir du sujet sans que le sujet soit, voilà l’effet de l’altérité structurale en tant que négatif du sujet et le sujet en tant que négatif d’une structure en laquelle il s’inscrit de façon allusive, mais jamais (pro)positivement. Il embrasse et est au dehors de toute structure (énonciative). En soi il échappe à la portée de l’Autre. Radicalement inobjectivable, il n’arrive jamais à être dit. Son manque à être est paradoxalement constitutif. Il n’est pas théorisable, il n’est même pas énonciable, mais il est énonçant (la méthode psychanalytique consiste justement à lui prêter oreille).

336 : Empiriquement, le sujet n’est rien et peut se situer dans la dépendance de n’importe quel contexte culturel, toujours entre et en dehors des signifiants. Il se dérobe à être dit, en vertu du caractère discret de la chaîne symbolique. Cet entendement est directement issu de la conception lacanienne de l’inconscient psychanalytique, présenté en tant que non donné, mais néanmoins « négativement » opérant dans la méthode d’investigation psychanalytique.

347 : Parfaire, c’est agir, mais le sujet ne coïncide pas forcément avec la position psychologique et social d’agent. L’agence est-elle peut-être sujet, mais l’agent est toujours autre, parce qu’il ne peut se situer que dans et par l’Autre. Étant advenu sujet, il se situe non seulement par rapport à l’Autre, mais également dans l’Autre. Cette thèse subvertit non seulement le concept de personnalité et le modèle de la personne occidentale et l’aplatissement du sujet à l’individu empirique, mais encore plus radicalement elle resitue l’agence au-delà de l’humain et elle élargit le champ de la chasse au sujet à des sphères ignorées jusqu’alors. Du point de vue strictement méthodologique, elle permet de souligner que l’agence est une position dans la structure de l’énonciation qui admet l’inconnu comme performateur, au-delà du psychisme et du comportement de l’observé et du moi du chercheur (Godoy et Bairrão, 2014). La notion d’« agent » renvoie simplement à un tenant-lieu du sujet et celui-ci est indéfini jusqu’à un effet d’interprétation. Seulement par le truchement d’un événement de cet ordre – dont l’indétermination intrinsèque a induit Lacan à repenser la psychanalyse en des termes éthiques lato sensu – qu’il peut advenir un quelconque sujet, dans la dépendance d’autrui et de la signifiance, jamais en tant qu’entité psychologique.

358 : Le sujet cherche à « être ». Autrement dit, le caché de la détermination de l’être, c’est le sujet, en manque, désirant. Aucun sens ne le complète mais l’effort de nomination le reconstitue (en manque). L’opacité du symbolique ne totalise rien et, au contraire, se relie à la soustraction du sujet dans l’énoncé (la pulsion).

369 : Je manque à l’Autre. Que le « Je » ne soit pas, il est important pour que l’Autre puisse être. Ce qui ramène le sujet à un contexte d’accessibilité indirecte n’est pas son impossible objectivation ou conceptualisation symbolique, mais la répétition. La répétition fait le sujet advenir à la première personne, dans l’ici de l’événement, en acte (un point très important en recherche).

3710 : L’autre vient avant, car il institue le sujet toujours « en passe d’être », inféré du dire précédent ou supposé au dit. L’action révèle le sujet après coup. Il semble toujours il y avoir quelque chose avant le dit, mais cela se fait purement et simplement à chaque acte énonciatif et a posteriori.

3812 : Même dans l’hypothèse d’un apport de l’écoute psychanalytique à l’observation participante (Bairrão, 2005), quelque chose échappe toujours à l’énoncé scientifique positif, et c’est toujours ce qu’il y a de plus pertinent. La méthode psychanalytique ne peut pas ajouter grand chose en termes de savoir positif, mais elle ne manquera jamais de porter au jour ce négatif primaire, qui, en temps d’arrêt et de reprise pour « entendre sens », se présente comme « sens inconscient ». Cet effet critique de la connaissance se réfléchit non seulement sur les résultats de la recherche, mais également et surtout sur le discernement de la nature de la méthode et des énoncés psychanalytiques.

3913 : L’autre est irréductible à une structure combinatoire objective. Le thème, le champ, c’est déjà quelqu’un. Pour prêter oreille à l’Autre, non réduit à une entité empirique, son irréductible altérité doit néanmoins être le principal informateur, n’étant lui-même pas accessible directement par le biais de simples entretiens ou des histoires de vie d’êtres humains. Le vrai sujet, acte énonciatif en tant que tel, est hors de portée par le truchement de la simple consultation du moi, pour bien informé qu’il soit et pour meilleur informateur qu’il s’estime.

4014 : Il y a une coappartenance entre temps et sujet, un est l’envers de l’autre. On ne doit cependant pas confondre le temps chronologique de la parole avec l’Autre temps, sous peine d’aplatissement et de confusion entre le parler du chercheur et l’entendre l’Autre. Il y a de l’Autre-temps dans la durée même des choses, issu de la durée des énonciations instauratrices. Ce temps, inconscient, est parfois confondu avec de l’atemporalité. Oublier ce temps, c’est grave, cela affecte profondément l’entendement effectif de l’écoute participante en tant que procédé analytique articulé à la méthode ethnographique.

4115 : La psychanalyse aborde le sujet par deux voies : par l’activité pure, événement temporel ; et en tant que lacune structurale, manque à être. La notion de sujet ne ressemble en rien au moi psychologique, elle est de tout autre ordre, pouvant être pensée comme effet d’un dire. Le regard analytique doit donc se concentrer sur l’énonciation (verbal, corporelle, esthétique) et non pas sur n’importe quel sorte d’entité qui serait supposé « être » le sujet, de façon à ce que celui-ci puisse se reconnaître comme étant situé à côté de l’Autre. C’est pour cette raison que, dans la pratique, exceptée l’illusion d’optique d’un regard en survol qui annule dans une totalité spatiale l’événemance temporelle, l’ensemble de la signifiance (l’autre) s’inscrit en tant que temps.

Un procédé ethnopsychanalytique

42Le rapport entre le sujet et l’objet se manifeste par le truchement de la fantaisie. Le concept de fantaisie est, en psychanalyse, l’héritier de la notion de connaissance et d’un passage d’une étape d’immaturité passive à une coparticipation éveillée dans la récréation de la réalité. Une grande découverte de la psychanalyse est que la réalité est fantaisie, même si partagée. Pour cette raison toutes les constructions de « réalité objective », aussi bien celle dont part l’observateur ethnographique que celles qu’il ratifie à travers la rédaction d’ethnographies, doivent être reconsidérées en leur qualité de dires.

43Il faut passer de la description de la scène observée à l’analyse de son montage (discursif). C’est cela ce que l’écoute participante apporte de plus. Rester au niveau de l’observé, c’est figer l’énoncé en un état de choses et refouler l’énonciation (Godoy et Bairrão, 2015).

44Du point de vue méthodologique strict, la méthode psychanalytique permet de souligner que l’agence est une position dans la structure de l’énonciation qui admet l’inconnu en tant que perfomateur, au-delà du psychisme e du comportement de l’observé et du moi du chercheur.

45Ce n’est un hasard si la terminologie lacanienne tient certaine choses pour irréductibles à des concepts. La raison en est le désir d’accueillir le non conceptualisable, par l’entendement de ce que la lacune et l’inconnu doivent être compris dans le procédé psychanalytique.

46La méthode psychanalytique comprend l’inconscient, et par conséquent l’inconnu. Il semble qu’il y ait toujours quelque chose avant le dit, ainsi qu’il a été précisé précédemment, mais le sujet se met à être seulement après qu’il y ait eu lieu. Au départ, le sujet est inexistant. Ce n’est qu’après avoir effectivement transité par l’Autre qu’il devient existant. Cet ordre de surgissement ne peut pas être traité comme une proposition au sujet de faits empiriques.

47La méthode psychanalytique rend également possible la critique à la réduction de l’altérité à l’humain et à des individus empiriques (elle est la totalité du symbolique), ce qui permet de restituer l’agence indépendamment de l’humain et élargit l’écoute du sujet à des sphères non prises en compte auparavant.

48En contrepartie, la technique d’observation participante privilégie surtout le visuel et le verbal. Le regard du chercheur et les conversations orientent ce qui, de sa participation, sera observé. Ainsi, au regard de la psychanalyse, on rabaisse l’autre à des individus empiriques et, dans la pratique, l’altérité se retrouve résumée à l’intersubjectivité.

49Or, dans ce que l’on voit, ou que l’on ne voit pas, « il y a une composante que l’on ne peut pas éliminer, c’est le regard de celui qui voit » (Bairrão, 2005, p. 444). D’un point de vue psychanalytique, la meilleure garantie d’élimination du caractère arbitraire et non concerné de l’impersonnalité de l’observateur, aliéné de soi, a lieu sous les espèces de la voix. Il est donc indispensable de reconnaître des matrices discursives et des énoncés en l’absence physique de leurs supports biographiques, c’est-à-dire au-delà de la parole des collaborateurs empiriques.

50Dans le cadre d’une ethnoanalyse, un projet ou une esquisse est également nécessaire, par le truchement desquels le chercheur propose une énigme à être signifiée. On part d’une lacune du savoir, non savoir, que l’on a obtenue et que l’on a construite par le recensement du déjà étudié et le constat d’un manque dans un champ de connaissances. La différence est subtil, l’accent est mis sur le manque et non pas sur le savoir déjà constitué.

51En soi-même, entreprendre une révision, c’est déjà prêter oreille à l’Autre. Si elle est bien faite, elle conduira à une interrogation qui se formule à partir d’un champ donné. Le lieu de cette question était en attente d’un interlocuteur. Si la question est pertinente, un effet du champ qui a posé la question est l’instauration de « son » chercheur. La présence de celui-ci sur le terrain, reconfiguré en fonction d’une interrogation qui va le faire circuler autour d’une question, indépendamment de son niveau d’étude, qu’il s’agisse d’un devoir de licence, d’un master ou d’un doctorat, cette présence « cause » à son tour la formulation d’une question qui devrait de toutes façons être posée. Ceci non seulement déclenche le transfert, mais c’est déjà le début d’un parcours méthodique.

52Une question, donc, n’est pas n’importe quelle question. Elle se pose avec l’existence du chercheur (en l’occurrence, en termes lacaniens, avec quelque chose de l’irreprésentable de soi). Le chercheur se lance une énigme à être signifiée et s’investit dans l’étude. Ce qu’il dit, comment il le dit et aussi, au-delà de ça, le lieu d’où il le dit (qui renvoie à qui il « est ») ne peut pas être ignoré.

53Une question de recherche interpelle nécessairement le chercheur qui se la pose, qui y trouve une part manquante de « l’être autre » qui le constitue en tant que sujet désirant et un « être chercheur ». L’« être chercheur » et le « sujet champ » s’établissent dans un seul espace unidimensionnel et continu (moebien), à l’intérieur duquel la visée de la recherche et avec elle certains signifiants circulent dans le « champ Autre » et reviennent au « sujet chercheur » (Godoy et Bairrão, 2014). Les signifiants initiaux reviennent de ce circuit ponctués, recomposés et éventuellement accrus, en fonction des événements signifiants qui manifestent l’intervention du champ sur les associations du chercheur analysant et s’écoutent comme des interprétations.

54La question de recherche, formulée par « soi-même », passe par l’autre, se formule avec l’Autre, et on lui rend une réponse provisoire, qui est une transformation de la question de départ. Ce processus est réitératif et peut se multiplier côte à côte ou successivement.

55On ne peut pas confondre ces allées et venues, comprises comme des « paroles », avec l’effectivement dit, la resegmentation et la réarticulation signifiante du problème proposé, qui est l’effectivement dit à proprement parler.

56Chaque champ, autre et sujet, construit un sens pour la recherche et une place pour le chercheur. Il est indispensable de garder à l’esprit et clarifier la différence entre traduction du phénomène en signifiés et l’usage opérationnelle de la psychanalyse au ras du signifiant, qui permet de traiter des univers symboliques incluant le chercheur, matérialisés sous la forme des fantaisies communautaires subtiles. Fantaisies non pas dans le sens courant d’« illusion », mais au sens technique, psychanalytique, d’implication du sujet dans la réalité ; c’est-à-dire, des fantaisies comme des facettes de la vérité « subjective ».

57Une réalité inconnue est donnée inconsciemment comme articulation signifiante et la recherche déclenche sa révélation. On interprète dans le transfert et non pas le transfert, ce qui impliquerait une position en dehors de la structure. La recherche suppose un seul espace de signifiance entre le chercheur et le champ, à l’intérieur duquel a lieu le transfert, l’inconscient agit et les sens s’actualisent (Godoy et Bairrão, 2015). L’interprétation surgit comme un sens nouveau, énigme ou réponse au chercheur, mais avec un effet de coupure ou de maniement signifiant par le et dans le champ. Le champ n’est pas un champ-objet, mais un champ-sujet. Ce qui y arrive, pour ainsi dire, « ponctue » le flux des associations et situe les attentes du chercheur.

58C’est en venant après la recherche en tant que circuit signifiant entre le chercheur et le champ que le sujet (thème) s’énonce. Le sujet apparaît et le chercheur s’investit lorsqu’une réponse est comprise comme une énonciation de l’Autre, dépendante d’un temps narratif. L’analyse va parcourir ce temps, déployant sa logicité et situant un récit qui est l’articulation sujet-objet. On a traditionnellement pris cette articulation pour de la connaissance, connaissance dépassable par l’heuristique de l’écoute, dévoilée structurellement grâce à la topologie de la bouteille de Klein (Godoy et Bairrão, 2015).

59L’informateur n’est pas une entité animique particulière, que l’on peut cadrer avec une quelconque conception de la personne, définie dans le cadre d’une quelconque ethnopsychlogie. Sans doute existe-t-il, d’un point de vue culturel, des données, des types de moi différents, mais ceux-ci ne sont pas le sujet. L’envisager objectivement, sous l’angle des concepts tels que Autre, être, système, structure, c’est se placer sous le coup de la Religion.

60Le véritable informateur, c’est le système symbolique en opération, l’Autre, au-delà des consciences individuelles, irréductible aux moi des interlocuteurs sur le champ, compris comme des objets (psychiques), ce qui permet d’aborder les opérations d’un système symbolique à travers chaque personne prise individuellement, mais sans les exposer indûment et de façon superflue.

61Il n’est pas utile donc de tenir un journal de terrain « privé » de sa circulation sociale, indépendamment du fait que celle-ci soit donnée empiriquement ou pas. C’est déjà l’Autre qui, en association avec la plume, les associations et les observations du chercheur, s’inscrit et écrit ce qui est apparemment le plus subjectif et le plus particulier du journal de terrain.

62L’écriture est aussi une écoute et celle-ci réclame l’Autre, étant donné que le sens du dit dépend de lui. Lorsque l’on parle ou écrit, dans le silence (vide) de l’Autre, l’on entend dans la voix le sens proféré par l’Autre, qui parle par le truchement de « notre » voix. La sonorité de la voix est un vide (énigme) dans le vide de l’Autre, du point de vue de la structure. Tout se passe comme si elle demandait un sens à être décidé par ce qui de l’Autre s’entend en nous.

63Comme c’est dans l’écoute que le sens se parfait, l’auditeur (de la voix) n’a pas moyen de s’élider de la composition signifiante qui se traduit dans une révélation d’un-Autre supposé disant.

64Il n’est pas simple de discerner entre la parole proférée d’un individu empirique, qui peut être décrite sans que l’on la comprenne, ou pire, en la comprenant parfaitement, et l’énonciation d’un-Autre. Or, prendre l’autre pour une entité, le scindant en son « identité » sociale et ses témoignages, révèle une confusion presque aussi grave que le fait de prendre le sujet pour une chose : il y manque l’échelle de l’Autre, ce qui le situe et ce qu’il articule silencieusement (ce qui change tout).

65Cette méthode donne des pistes pour répondre à ce défi, car lorsque quelque chose « se montre à moi », elle « se montre aussi en moi ». La parole ne fait sens qu’au lieu de l’écoute (Bairrão, 2004). L’Autre n’est et ne dit que dans la mesure où l’écoute l’institue. Le « je » de l’énoncé est déjà inscrit à la troisième personne, car on parle toujours depuis la place de l’Autre. Le sujet est indéfini jusqu’à un effet d’interprétation. D’un point de vue empirique, il n’est rien que l’on puisse préciser en dépit d’un contexte culturel.

66Pour savoir si les associations (apparemment du chercheur, mais qui concrétisent une écoute de l’Autre) ne sont pas de simples énoncés arbitraires, il importe de vérifier si elle peuvent être des énoncés (de l’autre) dans ce système.

67Il n’est pas utile qu’un participant empirique les ait faites (dites). Dans le cadre d’un champ, le contenu d’un livre, un mythe, une inférence logique peuvent valoir comme dit, même sans avoir été proférés. Il importe, cependant, que ces associations soient dialogiquement et diachroniquement validées et sanctionnées sur le terrain. Il y aura toujours une correction et une rectification. L’évident ne s’énonce pas car il a déjà été dit, mais lorsqu’il est verbalisé, il peut être corrigé (pour cette raison, c’est le chercheur qui associe…).

68Le contexte de l’Autre ponctue et resignifie, en général, ou il désavoue et réfute éventuellement une hypothétique désinformation verbalisée par des interlocuteurs empiriques. Il les valide et les commente, également. Voilà pourquoi il importe de prêter attention à l’inespéré et aux détails, par delà les techniques.

69En effet, par delà les paroles concrètes et de l’observation de la vie sociale et ses régularités, les réponses (de l’Autre) sont agies ou montrées par des événements et non pas racontées, à proprement parler. Des événements apparemment aléatoires sont des métonymies ou des métaphores qui répondent à la demande-question de la recherche.

70Les impasses et les problèmes qui se sont posés au chercheur comme des paradoxes ou des questions, en réalité il les a entendus. Il leur a donné du corps énonciatif parce qu’en lui l’Autre s’est fait dire.

71 A chaque recherche de terrain, troisième par rapport à l’interlocution entre le chercheur et le terrain, l’Autre et le sujet « conversent » et « traversent » l’intersubjectivité imaginaire (voir le schéma L). Cette traversée se signale dans l’interaction empirique, dans des formulations telles que : « Tiens, j’ai toujours voulu savoir cela », « Bonne question », « Question intéressante… », « C’est vrai, je n’y avait jamais songé, mais cela fait sens… »

72La question, le projet et son développement, donc, qui se sont déjà formulés en dialogue avec l’Autre bibliographique, se prolongent en « discussion » avec l’Autre champ, dépassant les hiérarchies autoritaires et des barrières qui astreignent au silence.

73Les résultats se présentent comme un addendum, un revirement, un déplacement ou une coupure sur la forme de la question initial de la recherche, qui la reformule ou la module et qui peut être à son tour le point de départ de nouveaux questionnements. La recherche aboutit lorsque la question initiale a été passablement répondue, l’avancée s’arrête et l’élan s’épuise sous la forme d’un nouveaux « trou » ou énigme se portant candidat d’une nouvelle recherche. C’est-à-dire que la « collecte » se termine lorsque, non seulement on donne forme à un nouveau savoir, mais également lorsque l’inconnu se reconfigure.

74Très souvent, ce revirement n’est pas très subtil ni discret, il surgit comme une rupture instantanée et, bien que rarement au début de l’étude, presque toujours bien avant son échéance.

 L’écoute participante

75Le rôle du chercheur n’est pas celui d’attribuer du sens. La psychanalyse n’explique rien, elle abrite le discours de l’Autre qui, lui-même, interprète, bien qu’il le fasse avec les oreilles du chercheur.

76Ce processus ne peut se réduire à des signifiés ; il unit le chercheur et le champ dans une même structure topologique spatiale, mais de fait ne se produit que comme trajectoire temporelle. Voilà pourquoi la condition existentielle du sujet et de l’Autre est l’événement, l’action intrinsèquement temporelle.

77Le point crucial ne se voit pas du dehors, il a affaire aux effets temporels, tels que ceux que l’on présuppose dans une interaction dialogique, dans une conversation suivie au fil du temps, bien que, dans une large mesure, entamée en défaut de productions verbales.

78Cela ne mène à rien de spéculer sur l’altérité et le récit ethnographique si, dans la pratique, le chercheur ne se permet pas de prendre au sérieux, méthodologiquement et instrumentalement, l’altérité donneuse de sens interne à la manifestation de son champ dans les termes, littéralement, dans lesquels elle se propose.

79Dans une recherche ethnographique instruite par la psychanalyse (ce que nous avons appelle l’écoute participante), l’on admet que le phénomène non seulement se montre à l’observateur, mais il se montre en lui ; les effets subjectifs de sa participation sont des données intrinsèques à la manifestation de l’événement en cours.

80De la sorte, la participation du chercheur est consubstantielle aux événements dont il a témoigné, parce que ceux-là le présupposent nécessairement eu égard de l’énonciation. Le rapport transférentiel sur le terrain laisse d’être un problème à éviter et passe à être une ressource favorable et même indispensable à la recherche.

81L’écoute permet de dépasser les moi. Elle présuppose des interlocuteurs empiriques et quelque chose qui est énoncé par eux, mais qui communique au-delà de leurs moi et en dépit de leurs consciences. De manière plus radicale, on dirait : qu’il « s’«  entende ce qu’en « soi » soit dit.

82L’entrée du chercheur sur le terrain, simplement, le situe déjà en tant « audiant » : le sens, bien qu’inconscient, interpelle et s’adresse à quelqu’un et cette communication fait partie de son structure. C’est dans ce sens que Lacan affirme que l’analyste doit être compris dans le concept d’inconscient (Lacan, 1973). Voilà pourquoi l’inclusion et l’investissement du chercheur dans le processus d’écoute sont un prérequis méthodologique. C’est-à-dire que l’audiant est une position dans la structure qui peut être « incorporée » par le chercheur ou les participants empiriques, mais ne se confond pas avec eux.

83Le défi, sur un plan méthodologique, c’est de faire en sorte que la position structurale d’audiant se situe de façon à mettre en circulation et révéler ce sens.

84La validation du sens dépendra de « Sa » sanction. Cette sanction comprend la fonction d’un troisième et un effet de vérité, l’avènement d’une découverte ou d’une révélation qui, après son apparition, a l’air de sauter aux yeux et semble avoir été là depuis toujours, mais auparavant elle était inconsciente.

85Cette « révélation » n’est pas la propriété ni la prérogative des interlocuteurs empiriques, des chercheurs et participants, mais elle émerge d’un effet de sens promue par l’Autre, qui n’aurait pas eu lieu sans leurs participations, mais dont ils témoignent plutôt qu’ils ne la produisent.

86Écouter favorise l’interprétation, non pas en fonction d’une attribution de significations et d’une superposition d’explications aux paroles, aux actes, aux gestes, etc., mais en fonction d’une restitution du savoir inconscient de l’autre, de façon à ce que l’on prête oreille et que l’on récupère ce qui se dit véritablement dans la répétition du signifiant , sans le voiler avec les considérations du moi du chercheur et ceux de ses interlocuteurs.

87L’écoute présuppose également interpellation. Les possibilités d’écoute et d’interprétation impliquent une espèce d’altérité interpellante. Admettre que l’Autre, plus qu’un concept, est un vrai interpellant qui s’adresse à nous, cela revient, sur un plan méthodologique, à prêter oreille aux sens qu’il produit, sans vouloir le réduire à cette activité.

88La psychanalyse demande qu’une cohérence soit assurée entre la teneur de l’énoncé et l’investissement de l’énonçant. Des approches en survol ne feraient pas justice à la contribution que la psychanalyse pourrait apporter. Sont inadmissibles tout particulièrement les présuppositions qui rabattant la psychanalyse à une note en bas de page de l’histoire de la philosophie, ramenant à une question de sémantique des dilemmes et des questions qui ne peuvent pas être posés dans les mêmes termes que ceux en lesquels ils se configurent dans d’autres territoires.

89À l’opposé, on a tenté ici d’exposer des aspects de la méthode psychanalytique potentiellement pertinents pour son application, y compris aux recherches de terrain et à la démarche ethnographiques.

90La particularité de cette méthode n’est pas de proposer une connaissance en plus sur n’importe quel domaine, mais de révéler la forme de production de savoirs qu’institue un « étant » quelqu’un. Pour la première fois, peut-être, l’on propose l’inconnu comme agent d’une investigation.

91Ce qui est dit de façons les plus différentes s’adresse toujours à quelqu’un. C’est par rapport à celui-ci qu’un sens inconscient s’actualisera et sera agit dans le transfert. Le transfert et la place occupée par le chercheur dans le champ doivent être envisagés comme partie indispensable des procédés de cette méthode.

92Faire de la recherche dans le transfert revient à s’offrir en tant que quelqu’un à être signifié, à se reconnaître comme un prétexte à l’exercice narratif consubstantiel au phénomène social et discursif, car c’est à l’intérieur de cette relation que s’écoutent et se racontent les dits de ces phénomènes. Pour cela, il faut respecter le cours et la dynamique propre aux événements. La distinction entre locuteur et énonçant est indispensable et ceci ne sera pas la moindre des contributions lacaniennes à la recherche ethnographique. Entre les lignes d’une locution, d’un événement, d’un rituel, il faut repérer la voix de l’Autre parmi sa propre voix et celle des autres, car la méthode psychanalytique, à la rigueur, est une façon de porter à jour le dire de l’Autre. On ne vise pas à superposer une voix à la voix de l’Autre, mais à inférer comment le champ est disposé, en fonction de ses dits. C’est-à-dire qu’il est indispensable de prendre en compte et de savoir distinguer qui dit et qui, sur le plan du phénomène, exprime le dit, car sans savoir qui le dit on ne peut pas savoir ce qui est dit. Et dans ce que l’on écoute, il est fondamental de pouvoir saisir à qui cela est supposé avoir été dit.

93C’est exactement « à qui » s’adresse l’énonciation qui situe la pertinence du transfert. Freud (1912/1987) affirmait qu’elle se situe au-delà de la clinique psychanalytique, ce qui permet d’élargir l’écoute analytique à des contextes sociaux.

94Il ne serait jamais inutile d’insister sur le fait que l’autre (en l’occurrence, le champ) se révèle corrélativement à la lecture qu’il fait du chercheur interpellant. Le champ ne s’autoreprésentera pas objectivement, mais il racontera toujours au chercheur des histoires qui, à son sens, concernent ce dernier. Ces histoires, en le révélant dans son humanité, révèlent la généralité de la forme selon laquelle « Il » (l’Autre/le champ) l’interprète.

95Comme l’Autre, par la structure de la voix, se présente comme un quelqu’un, lorsqu’il s’adresse au sujet comme retour à une question de recherche, il se resitue devant ce que chez le chercheur s’est produit comme question de recherche. Ce que la méthode psychanalytique, par le truchement de l’écoute flottante, permet d’ajouter à un procédé ethnographique inclut une radicale ouverture au point de vue de l’Autre, car le seul moyen vrai d’étude d’une thématique, c’est de se permettre d’être participant et de prendre au sérieux ce qui se réfléchit (s’entend) chez le chercheur.

96La structure implique le chercheur, mais l’implique en apportant de la rigueur à la recherche, car cela non seulement situe les autres par rapport au moi, mais également interpelle tous eu égard à la voix : qu’est-ce qu’est dit ? qu’est-ce qui m’est dit ? qui le dit ?

97À ce sujet, il importe de souligner que le chercheur est solidaire et responsable de ce qu’il entend de ce que l’Autre dit. Ce que l’on entend de l’Autre, on le dit également (tant par l’assentiment de l’écoute qui donne consistance à une supposition d’énoncé que par leur transcription en rapports de recherche et en récits ethnographiques). Le transfert et l’interprétation demandent l’investissement éthique du chercheur en ce qu’il écoute, car l’écouté (l’entendu) de l’Autre est proféré par le sujet (ce qui implique le chercheur dans son écoute).

98Nos « autres » sont la moelle épinière de nous-mêmes et leur destin, bien qu’apparemment étranger, « traverse » nos existences. Ils nous cèdent leurs âmes et nous les faisons revivre de par notre dévouement (ethnographique). Et ceci parce que l’autre, nos autres, par la rémission de la structure au vide dans l’Autre, répercutent l’inconscient et maintiennent cette répercussion.

99La voix que nous leur prêtons est la leur, mais elle est notre voix, résonnant par les cordes « vocales » de l’Autre. L’entendre, c’est en même temps un assentiment et un commandement éthique. Elle nous implique. Lorsque nous la refoulons ou l’ignorons, à la façon d’une question, le champ l’agit.

100C’est la raison pour laquelle il ne suffit pas de faire des entrevues ou des observations, car tout interaction et tout événement mettront en scène ce qui ne pourra pas s’exprimer autrement.

101Comme le concept de sujet ne se confond pas avec celui de personne ou d’individu, l’Autre peut surgir dans la position de sujet de l’énonciation et le chercheur comme celui qui l’écoute.

102Après tout, en toute activité de recherche, l’Autre manifeste son incidence sous forme d’événements qui dépassent l’intentionnalité des interlocuteurs empiriques.

103Il ne s’agit plus d’interpréter des actes, des paroles, des gestes, en prenant pour base éventuellement des concepts de la théorie psychanalytique, ni même de s’attacher exclusivement aux signifiés compris par les interlocuteurs empiriques.

104Ceci doit néanmoins être envisagé dans les termes de la structure de la voix, c’est-à-dire cet Autre « rend » comme voix une part de soi qui fait écho à la question-but de la recherche résonnant dans le vide. Le phénomène s’entend en lui-même, dans les deux sens : tel qu’il se montre en lui-même et tel que, du moment où il affecte le chercheur, il le montre à lui-même.

105Ainsi, même ce qu’un ethnographe raconte au sujet de son « ethnographé », l’énoncé en quoi consiste son récit peut être entendu comme énonciation de l’Autre chez le chercheur. Entendre de cette façon, c’est comprendre ce qu’un-Autre, énonçant, qui d’un point de vue opérationnel peut être à n’importe quelle place, inscrit avec la « plume » qu’est le chercheur. On sanctionne ce que l’on voit, non pas là, dans l’Autre, mais ce qui de l’Autre s’entend ici, se « dépose » dans le champ du sujet chercheur comme voix.

106L’inaptitude à se permettre ce type de participation marque la différence entre un procédé attelé aux interprétations d’un moi chercheur et une écoute participante. Dans cette écoute le chercheur-analyste se permet d’être conduit par les intentions significatives (même si elles sont inconscientes) de ce à quoi le crédit a été accordé de se proposer comme un « quelqu’un » interlocuteur.

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Notes   

1  Cet article est en grande partie tributaire de la thèse de livre-docência (NdT : sorte d’Habilitation à Diriger des Recherches spécifique à l’académie brésilienne) de l’auteur (Bairrão, 2012), développée grâce à plusieurs soutiens à la recherche consécutifs de la Fundação de Amparo a Pesquisa do Estado de São Paulo (FAPESP). Une partie de sa teneur a été initialement communiquée au Vè Congrès International de Philosophie et Psychanalyse (septembre 2013) et son argument a acquis sa forme définitive au prétexte d’un cours donné en 2014 à l’Universidade Federal da Bahia d’après l’invitation de Maria Thereza Ávila Dantas Coelho, que je remercie ici pour l’opportunité et nos échanges. Cet article est dû à des années de recherche avec des cultes afro-brésiliens ainsi qu’à la convivialité et au dialogue académique mené, en qualité de collègue et directeur de recherche, avec les jeunes chercheurs membres du Laboratório de Etnopsicologia da Universidade de São Paulo, que je remercie pour tout ce que nous avons développé ensemble.

2  Le discours de l’analyste résume ce qu’il y a de plus caractéristique dans la méthode psychanalytique.

Citation   

José Francisco Miguel Henriques BAIRRÃO, «Faire de l’ethnographie avec la psychanalyse. Les psychologies d’un point de vue empirique», Cultures-Kairós [En ligne], paru dans Les numéros, mis à  jour le : 09/09/2015, URL : https://revues.mshparisnord.fr:443/cultureskairos/index.php?id=1180.

Auteur   

Quelques mots à propos de :  José Francisco Miguel Henriques BAIRRÃO

Professeur et coordinateur du Laboratoire d’Ethnopsychologie du Département de pyschologie de la Faculté de Philosophie, Sciences et Lettres de Ribeirão Preto de l’Universidade de São Paulo, au sein duquel il développe et dirige des recherches s’intéressant à la non séparation entre la recherche empirique et la réflexion épistémologique, et ouvertes aux arguments et contributions interdisciplinaires.

Quelques mots à propos de :  Maria Ignez Mena BARRETO

Maria Ignez Mena BARRETO, Universidade de São Paulo