Le temps des architectes-décorateurs : naissance et transformations de la profession de décorateur de cinéma

DOI : 10.56698/rhc.1069

Résumés

Selon une histoire des métiers du cinéma en construction, le métier de décorateur de film naît au moment où les artiste-peintres issus du théâtre sont supplantés par des hommes aux expériences diverses. Cet article présente les mécanismes qui transforment ce métier nouveau en une profession institutionnalisée, en analysant ses évolutions, de l'arrivée du parlant à l'apparition de la Nouvelle Vague, à la fin des années 1950. Par des mouvements, tantôt de convergence ou de divergence, le métier de décorateur se définit en interaction avec les autres métiers. Alors qu'ils cherchent à se distinguer des artistes-peintres décorateurs de théâtre, les décorateurs commencent à se désigner par l'expression d'architectes-décorateurs. Utilisée lors de la création du premier syndicat de décorateurs de cinéma, le syndicat des décorateurs-architectes français de film, cette expression est intimement liée à la naissance d'une identité professionnelle. À la fin de la seconde guerre mondiale, sont créées les premières structures d'encadrement de la profession. Pourtant, ce nouveau système institutionnel est remis en question dans les années 1950 et 1960 par les cinéastes de la Nouvelle Vague, forçant la profession à se réinventer.

According to a new history of film professions, the profession of decorator was born when the painters from theatre were supplanted by men with various experiences. This article presents the mechanisms which transformed this new profession into an institutionalized one, analyzing its evolutions, from silent films of the Années folles to the emergence of the Nouvelle Vague at the end of the 1950s. Through movements, sometimes of convergence or divergence, the profession of decorator was defined in interaction with other professions. While decorators seek to distinguish themselves from painters from theatre, they were beginning to refer to themselves by the expression of architectes-décorateurs. Used in the creation of the first union of film decorators, the syndicat des décorateurs-architectes français de film, this expression is closely linked to the birth of a professional identity. At the end of World War II, the first supervisory structures of the profession were created. However, this new institutional system was challenged in the 1950s and 1960s by Nouvelle Vague filmmakers, forcing the profession to reinvent itself.

Index

Mots-clés

décor, cinéma, architecture, histoire des professions, Lucien Aguettand (1901-1989), studio, syndicalisme

Keywords

set, cinema, architecture, history of professions, Lucien Aguettand (1901-1989), movie studio, unionism

Plan

Texte

Longtemps laissés dans l'ombre, les métiers du cinéma, depuis une dizaine d'années, font l'objet d'une attention nouvelle de la part des historiens. À la suite du travail fondateur de Priska Morrissey sur les opérateurs de prises de vues1, un numéro de la revue 1895 consacré aux métiers du cinéma en France a été publié en 2011. Les décorateurs n'ont pas échappé à ce long désintérêt et, malgré la fascination qu'exerce l'idée de décor de film et la découverte de son « envers », la plupart des décorateurs des premières décennies du cinéma sont restés dans l'angle mort de l'historiographie. Dans la lignée de l'article de Jean-Pierre Berthomé sur les décorateurs du cinéma muet2, il s'agit ici de donner un premier aperçu des évolutions du métier, depuis les débuts du parlant jusqu'à l'apparition de la Nouvelle Vague.

Jean-Pierre Berthomé démontre que le métier de décorateur de cinéma naît au moment où les artistes-peintres venus du théâtre sont écartés au profit d'hommes aux formations diverses. Après cette période d'émergence d'un métier nouveau, les années 1930 voient peu à peu ces personnalités, qui ont souvent franchi les portes du studio au gré des circonstances, se construire une identité commune. Un terme nouveau est employé pour qualifier le décorateur de films : celui d'« architecte-décorateur ». Il accompagne la création d'un groupe professionnel et est utilisé quand s'établit un système de réglementations encadrant l'accès aux professions du cinéma, dans les années 1940. L'étude de l'expression d'architecte-décorateur permet de comprendre les enjeux de la création d'une nouvelle profession.

Cette contribution est donc un essai d'histoire culturelle des professions, prenant appui sur la sociologie. Le concept de profession, dont la définition est sujette à débats parmi les sociologues, n'est pas entendu ici au sens strict d'un travail que l'on fournit et qui permet d'en vivre. Nous le comprenons selon les quatre sens que lui ont reconnus Claude Dubar et Pierre Tripier3. Ces différentes acceptations comptent parmi elles la notion de revenu, mais aussi le sens éthymologique de déclaration liée à une croyance, le procédé par lequel les membres de la profession se voient donner un nom, ou s'en attribuent un eux-mêmes et, enfin, l'idée d'une compétence reconnue. En suivant la logique des sociologues interactionnistes, il ne s'agit pas ici d'identifier les étapes successives d'un processus de « professionnalisation »4, mais plutôt d'analyser comment se définit une « aire de juridiction »5 des décorateurs, dans leur rapport avec les autres professions.

Le présent article s'appuie sur une thèse d'École des chartes portant sur Lucien Aguettand6. Formé dans les années 1920 au théâtre, il est l'auteur de plus d'une centaine de décors de films et dirige pendant une dizaine d'années le service décoration de la Société d'exploitation des établissements Pathé Cinéma. Membre durable de la Commission supérieure technique (CST), association de techniciens créée aux lendemains de la Libération de Paris, il est également l'un des premiers à enseigner le décor de cinéma à l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC). Le fonds Aguettand de la Cinémathèque française, constitué par le décorateur lui-même et donné dans les années 1980, regroupe de nombreux procès-verbaux de la CST et documents issus du Syndicat des techniciens de la production cinématographique7. Il contient aussi plusieurs textes d'articles rédigés par Aguettand ou par d'autres décorateurs. Le département des Arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France conserve également, au sein d'un second fonds donné par le décorateur, plusieurs textes relatifs aux associations professionnelles8. Ces documents d'archive nous font entendre la voix des décorateurs et permettent de renouveler une histoire restée, jusque là, très centrée sur une analyse formelle des décors.

Pour prendre le contrepied de ce travail biographique et varier les points de vue, il est nécessaire de recourir à des sources d'une autre provenance. Certains décorateurs ont publié un témoignage écrit, par le biais d'un récit biographique, comme Georges Wakhévitch dans L'envers des décors9, ou à travers un recueil de photographies commentées, comme Max et Jacques Douy10. Il existe aussi des témoignages oraux, qui ont fait l'objet d'une mise par écrit. Le numéro 76 de la revue Cinématographe est entièrement consacré au décor de cinéma en France et recense plusieurs interviews de décorateurs11. Enfin, des témoignages prenant la forme d'entretiens filmés avec des personnalités du cinéma, parmi lesquelles des chefs-décorateurs, ont été réalisés par Philippe Esnault pour l'association L'Image et la mémoire12. Ceux qui ont été visionnés sont, outre celui d'Aguettand, ceux de Hugues Laurent, Max Douy et Pierre Guffroy. À partir de ces sources, et grâce à une méthode de va-et-vient entre l'individuel et le collectif, se dessine une histoire culturelle des décorateurs de cinéma.

Les premiers efforts de structuration (1933-1944)

Au début des années 1930, le métier de décorateur s'exerce de manière très libre. Il n'existe pas d'école de formation qui lui est dédiée. De ce fait, les futurs décorateurs entrent au studio sans connaître le métier, et découvrent celui-ci en tant qu'apprenti ou assistant auprès d'un décorateur expérimenté, selon une logique d'atelier. Le recrutement se fait au fil des rencontres et des recommandations. C'est au retour de son service militaire, alors qu'il est aux abois, que Lucien Aguettand pénètre dans le monde du cinéma dont il était auparavant étranger. Grâce à une lettre de son ami et ancien employeur Louis Jouvet, il est présenté à Francis Jourdain, puis à Marcel L'Herbier, auprès de qui il crée ses premiers décors de film. Max Douy, quant à lui, est recommandé à Lucien Carré par son professeur de dessin13. Les décorateurs ainsi engagés signent majoritairement des contrats de courte durée, allant jusqu'à deux à trois mois. Il existe des contrats à l'année, comme celui signé par Lazare Meerson avec la Tobis14, mais ceux-ci sont peu fréquents et encore raréfiés par la faillite des grandes sociétés de production au milieu de la décennie.

Deux phénomènes contribuent à faire évoluer le métier en l'organisant. Le premier d'entre eux est un phénomène progressif. Depuis les années 1920, l'effectif des équipes de décoration est en constante augmentation. Des ouvriers issus du milieu de la construction, tels que les menuisiers, les staffeurs et plâtriers ou les sculpteurs, sont, pour la première fois, engagés pour participer à la l'élaboration des décors. De plus, l'arrivée du parlant en France, en accentuant le goût pour le décor réaliste, donne une importance accrue à la qualité technique du film. L'augmentation des équipes et l'exigence de perfection technique rendent nécessaire une spécialisation des tâches au sein des équipes de décoration. Ainsi, le choix de l'ameublement est confié à un ensemblier. Le chef-constructeur, ou premier assistant, il est chargé de superviser la construction. Quant au chef-décorateur, il se distingue comme celui qui coordonne techniciens, artisans et ouvriers spécialisés afin de mettre en œuvre le projet de décor. Alors que, durant la décennie précédente, il est fréquent qu'il intervienne directement dans l'exécution du décor, par exemple en peignant lui-même un pan de mur, il est désormais un concepteur plus qu'un exécutant. La définition de ses attributions se précise donc fortement.

S'additionant à la spécialisation des rôles, un mouvement d'unité entre les décorateurs participe à structurer le métier. Cette évolution, qui débouche sur la création des premières structures associatives rassemblant des décorateurs, est fortement liée au contexte économique et social dans lequel évoluent ces derniers. Alors que, de 1930 à 1932, le cinéma bénéficie des retombées positives du passage au parlant, l'année 1933 est nettement défavorable aux techniciens des studios15. La baisse de la production et l'arrivée des premiers réfugiés venus d'Allemagne et d'Europe centrale compliquent l'accès à l'emploi. À la suite de ce changement de circonstances, est créé le premier syndicat consacré aux décorateurs, le syndicat des décorateurs-architectes français de films16. Le président en est Robert-Jules Garnier. Cet ancien décorateur de théâtre, ayant travaillé pour Louis Feuillade dans les studios Gaumont, a su accompagner les évolutions formelles du décor. Personnalité importante pour le décor des années 1930, il est l'auteur d'un Cours de technique de décors appliquée au cinéma, premier texte connu enseignant la décoration cinématographique17.

En plus de ce mouvement interne au métier, les années 1930 voient se développer des organisations professionnelles regroupant des techniciens de différentes spécialités. Le Cercle technique du cinéma (CTC), qui en est le prototype, est créé en juin 1936 par un groupe de techniciens. Le fonds Aguettand de la BnF est une sources précieuse d'informations sur cet organisme encore méconnu des historiens18. Le but du cercle est de réunir les techniciens pour qu'ils mettent en commun leurs expériences et concourent ainsi à l'amélioration de la technique cinématographique. Des techniciens du film, passant outre les divergences entre studios, se réunissent en séances régulières. Le Cercle est le précurseur de la Commission supérieure technique (CST), instituée en 1944 par Jean Painlevé. La Section Décoration est animée par Aguettand et Georges Wakhévitch, décorateur formé auprès de Jean Perrier et de Lazare Meerson, également connu pour ses décors de théâtre. Cette ouverture à la communication, à la fois au sein de la spécialité du décor et avec les membres des autres professions, crée une unité nouvelle entre les décorateurs.

Décorateurs et architectes : à la recherche d'une identité

Les sociologues Didier Demazière et Charles Gadéa, en conclusion d'un ouvrage collectif sur les groupes professionnels, reconnaissent l'importance de l'acquisition d'une dénomination dans la création de ceux-ci19. Si le fait de s'accorder sur un nom est loin d'être le seul mécanisme qui produit la légitimité, il est un indice de spécialisation et « la marque minimale d'existence de groupes professionnels »20. Dès lors, l'utilisation de l'expression de « décorateur-architecte » par les fondateurs du premier syndicat peut étonner. Pourquoi choisir ce terme plutôt que le terme de chef-décorateur dont l'emploi se répand ? Comment expliquer cette référence à une autre profession, au moment même où le métier de décorateur de cinéma se détache de celui de décorateur de théâtre pour définir son propre système de valeur ?

La première occurrence de cette double dénomination semble remonter au film Le Vertige de Marcel L'Herbier (1926), dans lequel Robert Mallet-Stevens est crédité au générique en tant qu'« architecte-décorateur »21. L'usage du terme se réfère au fait que, chose alors originale, Mallet-Stevens est à la fois diplômé d'architecture, exerçant la profession dans une agence, et décorateur de films. Pourtant, le terme, tel qu'il se propage dans les années 1930, ne désigne pas simplement les décorateurs ayant exercé ou exerçant le métier d'architecte. Rares sont ceux qui, tels Jean Lafitte, quittent leur agence d'architecture pour poursuivre leur carrière au cinéma22. Ceux qui ont étudié l'architecture ont rarement fréquenté l'École spéciale d'architecture, mais plutôt la section d'architecture de l'École des arts décoratifs, dont la légitimité à former des architectes est contestée, et même niée en 1940, au moment de la création de l'ordre des architectes23. Les connaissances en architecture sont très souvent acquises de manière empirique. Ainsi, c'est en fréquentant le même Jean Lafitte, dont le cabinet jouxte les bureaux de dessins des studios de La Victorine, que Georges Wakhévitch apprend les techniques du dessin d'architecture24. Lucien Aguettand acquiert ses connaissances en étudiant la structure du théâtre des Champs-Élysées avec Auguste Perret, architecte du bâtiment, et en recueillant les enseignements de Mallet-Stevens, avec qui il travaille pour Le Vertige.

L'expression d'architecte-décorateur ne doit donc pas être prise littéralement. Cependant, elle reflète bel et bien une transformation dans la pratique du métier. Par bien des aspects, le travail du décorateur de cinéma, à partir du milieu des années 1920, se rapproche de celui de l'architecte. Au fur et à mesure que les budgets nécessaires à la construction des décors augmente, le décorateur acquiert un rôle de négociateur, qui doit défendre son projet auprès du metteur en scène et de la production. Comme l'architecte, il est l'« homme de la synthèse »25, qui doit assurer l'équilibre entre qualité technique et impératifs économiques. Pour réduire les coûts, il devient nécessaire de prévoir le plus précisément possible l'aspect futur des décors. Les plans et dessins préparatoires acquièrent donc une importance fondamentale. Il faut opérer les principaux plans, c'est-à-dire prévoir les dimensions et la position des dispositifs en fonction des angles de prises de vues26. La nécessité d'obtenir des plans détaillés est telle que certaines sociétés cinématographiques engagent des architectes pour les dessiner. Wakhévitch décrit, admiratif, l'importance des bureaux de dessins dans les studios de La Victorine :

Je m'aperçus que toute l'organisation de cette ruche [le studio] partait des bureaux de dessin dans lesquels on trouvait des architectes, tous véritables créateurs semblables aux artistes italiens et français de la Renaissance. L'idée du décor naissait d'une esquisse du décorateur-chef chargé du film. […] Approuvé par le metteur en scène, le décor était mis sous forme de plan-élévation avec coupes, études d'angles de prises de vues afin de ne pas construire ni trop ni pas assez !27

Ce système faisant travailler en commun architectes et décorateurs demeure assez rare en France, et, la plupart du temps, les décorateurs dessinent eux-mêmes leurs propres plans.

Utilisé par les décorateurs lors de la création du syndicat, puis repris au sein du CTC et de la CST, le terme d'architecte-décorateur est intimement lié à la naissance d'une identité professionnelle. Dans les années 1940, il accompagne la création de l'IDHEC, où sont donnés des cours d'histoire et de technique du décor. Les archives Aguettand contiennent des cours de Hugues Laurent, non datés, mais très certainement extraits de ceux qu'il donne à l'IDHEC à partir de 1946. Cet architecte-décorateur y fournit une analyse du décor français des années 1930.

… architectes et artistes bataillèrent pour suivre la technique nouvelle et finalement s'imposèrent ; les Périer [sic], les Mallet-Stevens, les Meerson donnèrent une impulsion et l'école française reprit force et vigueur. […]

Dans toutes ses compositions, l'école française est architecturale ; les extérieurs sont d'une ordonnance harmonieuse, les caractères et les proportions bien étudiés, les intérieurs sont de compositions nuancées, la recherche de la décoration est sobre, l'ameublement raisonné, les effets dans les oppositions de teintes sont généralement doux ; la vie existe dans le décor français sans la présence d'un personnage, simplement par le détail. Le décor français marque un fini de réalisation au fond duquel on sent que l'architecte décorateur a fait appel à tous les arts et à toutes les industries, recherchant sans cesse les moyens les meilleurs et les plus rapides, sans altérer la qualité.28

Être architecte-décorateur, c'est se réclamer d'une nouvelle génération, celle de Jean Perrier et de Lazare Meerson, deux hommes qui ont contribué à rationaliser le processus de construction des décors. C'est donc prendre acte du renouvellement générationnel qui s'est opéré au cours des années 1920, tout en manifestant la qualité de la production nationale.

Entre artiste et technicien : l'ambiguïté d'un statut

Le décorateur de cinéma, tout comme l'architecte, cumule des caractéristiques propres à l'artiste et au technicien. Très souvent, il est passé par une école des beaux-arts ou des arts décoratifs, lieux de construction d'une identité artistique29. Il participe à créer, en collaboration avec les autres membres de l'équipe technique, l'œuvre d'art qu'est le film. Son statut de travailleur, s'incrivant dans une chaîne de coopération, n'est, en soi, pas incompatible avec celui d'artiste30. Pourtant, le mot n'est pas employé par les décorateurs eux-mêmes pour se définir. Nombre d'entre eux mettent en garde leurs confrères contre une forme de laisser-aller dans leur originalité, de peur que leurs créations ne capte trop l'attention du spectateur. Le fait de se considérer comme artiste constituerait un danger pour la qualité du décor, dans la mesure où celui-ci doit demeurer le cadre de l'action et donc se faire discret.

Ainsi, les seuls décorateurs dont le travail a fait l'objet d'une exposition en qualité d'artiste sont ceux qui ont fait œuvre en dehors de la production du film, en se concentrant sur le dessin préparatoire lui-même. Alexandre Trauner, d'abord intéressé par la peinture, conçoit ses dessins comme des entité autonomes, qu'il colore « pour le plaisir »31. Il en va de même pour l'architecte-décorateur Georges Wakhévitch, réputé par ailleurs pour ses décors de théâtre, et qui fait l'objet de plusieurs expositions32. Ces dernières présentent ses études préliminaires pour le cinéma de la même manière que ses peintures de chevalet et ses maquettes de théâtre, sans donner à voir les images du film correspondantes. Si ces décorateurs sont reconnus comme artistes, c'est donc davantage pour leurs qualités de peintres qu'en tant que décorateurs de cinéma.

En réalité, la volonté des décorateurs de cinéma de se démarquer des hommes de théâtre et de se rapprocher des architectes trahit une prise de position du point de vue de leur statut. Au début du XXe siècle, le décorateur de théâtre est à la fois un artiste et un artisan. Il est rémunéré à la réalisation, c'est-à-dire au mètre carré de toile peinte33. Au moment des révolutions scéniques du XXe siècle et de l'avènement du rôle de scénographe, la question d'une rémunération en droits d'auteur pour les concepteurs de décors commence à être posée. Au contraire, les décorateurs de films, dès les années 1900, perçoivent leur salaire en fonction des horaires de travail, à la semaine ou au mois34. Ce modèle perdure par la suite, majoritairement sous la forme de contrats de courte durée. Les décorateurs de cinéma sont donc rémunérés comme des techniciens. Dans les années 1930, les tarifs minimums sont décidés par un accord entre les syndicats patronaux et ceux de techniciens. Cependant, ils peuvent varier en fonction de la renommée du décorateur. C'est sans doute en cela que réside la réelle proximité entre l'architecte et le décorateur de cinéma. Être « architecte-décorateur », c'est assumer cette double identité, celle d'un créateur rémunéré comme un technicien.

Un système de réglementation rigoureux

Au cours des années 1930, plusieurs décorateurs élèvent la voix pour réclamer une réglementation de leur métier. L'absence de formation dédiée aux futurs décorateurs d'une part, et, d'autre part, de système de contrôle à l'entrée dans le métier, constitueraient une menace pour la qualité technique des décors français. Paradoxalement, les périodes de crises politiques de l'Occupation et de la Libération s'avèrent favorables à l'instauration de telles mesures. Ainsi, peu avant l'instauration du Comité d'organisation de l'industrie cinématographique, organe de contrôle de la production cinématographique française, le régime de Vichy instaure une carte d'identité professionnelle (CIP), par une loi du 26 octobre 1940. Sa détention est nécessaire pour exercer les principales professions du cinéma. Il faut, pour en bénéficier, justifier de capacités professionnelles et présenter un certificat d'aryanité, ce qui exclut toute personne juive. Le 4 septembre 1943, dans un tout autre contexte, est créé l'Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC). Présidé par Marcel L'Herbier, cet établissement d'enseignement se donne pour mission de former des techniciens et des réalisateurs, mais aussi de transmettre une culture cinématographique par le biais de cours sur de larges thèmes historiques et esthétiques. Une section décoration, dès la création de l'institution, y est dévolue à la formation des futurs architectes-décorateurs.

L'affaire Aguettand-Capelier, dont les archives sont conservées à la Cinémathèque française, permet d'appréhender la rigueur de la réglementation ainsi mise en place35. De décembre 1943 à juillet 1944, un conflit oppose Lucien Aguettand aux membres du Syndicat des techniciens de la production cinématographique, dont l'architecte-décorateur est membre36. La dispute tourne autour du choix de l'assistant de Robert Hubert, architecte-décorateur pour le film Farandole d'André Zwobada. La personne initialement choisie comme assistant par Hubert se désiste et propose Auguste Capelier, qui était auparavant assistant-décorateur dans les studios de La Victorine. Aguettand, dénonçant le caractère excessif du salaire demandé par Capelier et son manque d'expérience, propose un autre candidat. Capelier proteste. Lors de l'assemblée générale de la section des architectes-décorateurs du 12 janvier 1944, les membres du syndicat reprochent à Aguettand d'avoir choisi un assistant sans carte professionnelle et de l'avoir choisi « pour des raisons d'économie » ce qui reviendrait à défendre les intérêts des producteurs face à ceux des décorateurs37. Après création d'une commission de discipline, l'intéressé est finalement exclu du conseil syndical.

La fin des architectes-décorateurs ou les métamorphoses d'une profession

À partir de la fin des années 1950, le système de réglementation d'accès aux professions techniques du cinéma fait l'objet d'une vive remise en question. Les cinéastes de la Nouvelle Vague dénoncent un cinéma dit de la « tradition de qualité »38 qui se complairait dans de vieux modèles esthétiques. Ils souhaitent se passer d'un système de formation qui restreindrait les possibilités d'expression. Un texte de Lucien Aguettand, daté de 1965 et qu'il intitule « La carrière du technicien », dénote un besoin de justifier son combat pour l'instauration, la reconnaissance et le maintien de la carte professionnelle :

[Les] cartes professionnelles firent couler beaucoup d'encre, certains y voyaient une fermeture de la profession, une sorte de corporatisme empêchant tout renouvellement et rajeunissement. Ses partisans indiquaient avec justesse que, dans l'intérêt même de la production, il était nécessaire que ceux qui exerçaient une responsabilité aient leur qualification confirmée afin que les aspirants aux diverses spécialités ne puissent s'introduire sans que leur compétence ait été visiblement reconnue. […]

Cette carte professionnelle est une sorte d'assurance. Elle peut être retirée aux intéressés s'ils font une faute grave ou s'ils sont coupables de malversations. Elle ne fut nullement un frein au renouvellement et rajeunissement des techniciens, la lecture des annuaires en apporte la preuve formelle.39

Dans le choix de ses mots, transparaît l'importance du facteur générationnel.

Les architectes-décorateurs qui, pour beaucoup, ont connu les heures de gloire du film français des années 1930 et 1940, portent un jugement sévère sur cette conception libérée du cinéma. Lors de son entretien avec Philippe Esnault, Max Douy ne cache pas le mépris qu'il a pour ceux qu'ils considère comme une « équipe de copains » qui, « parce qu'ils ont fait joujou avec une caméra super 8 » « se figurent qu'ils sont cinéastes »40. Plus mesuré, Léon Barsacq, dans son ouvrage de synthèse sur le décor de film, souligne les défauts techniques des films de la Nouvelle Vague, mais leur reconnaît, dans certains cas, un « enthousiasme » et une « fraîcheur de sentiments »41. Pierre Guffroy, qui a travaillé en tant qu'assistant-décorateur dans des films de Claude Autant-Lara et Julien Duvivier, avant de devenir chef-décorateur pour Jacques Doniol-Valcroze ou Jean-Luc Godard, explique qu'il était alors péjoratif de travailler avec ces derniers.

Mis à part le rejet de la formation académique, le principal objet de litige concerne l'utilisation du studio. Très tôt, les critiques des Cahiers du cinéma qui se sont lancés dans la réalisation expriment leur volonté de quitter les studios pour tourner en extérieurs réels. Pour les architectes-décorateurs, refuser le modèle du studio revient à remettre en question l'existence même de leur profession. Le travail en studio nécessite, effectivement, des connaissances techniques approfondies qui deviennent inutiles dans le cas de décors naturels42. Bien plus, la simple prise de vues en extérieurs balaye du métier de décorateur toute dimension architecturale et tout travail de construction.

Si les réalisateurs de la Nouvelle Vague polarisent les débats, l'idée de se détourner des studios existe déjà avant 1959. L'idée avait déjà été explorée quelques années plus tôt par le mouvement néo-réaliste italien et dans les films des américains Orson Welles et Billy Wilder. Une sous-commission d'étude est formée dès 1952 par la section des architectes-décorateurs de film du Syndicat des techniciens de la production cinématographique afin d'« examiner la situation de la production de films tournés en décors naturels »43. Sont membres de cette commission quatre architectes-décorateurs : Maurice Colasson, Eugène Delfau, Rino Modellini et Lucien Aguettand. Un texte portant la mention « premier projet », daté du 22 juillet 1952, montre qu'il s'agit déjà pour les décorateurs de chercher les raisons qui ont porté à « abandonner le tournage en studio »44. Les années 1950 et 1960 voient se succéder les commission de ce type. Le Comité technique des studios, groupe créé au sein de la CST en 1967, est pensé comme un espace d'échanges entre représentants des techniciens et représentants de la production. Décorateurs, directeurs de production et directeurs de studio y inventent des solutions permettant de réduire les coûts de construction des décors. Par exemple, il est question de constituer un stock de matériel standardisé modifiable et utilisable dans un grand nombre de décors différents. Le travail de plusieurs techniciens est requis pour imaginer des dispositifs fixes à panneaux mobiles et autres décors pré-construits45.

Malgré tout l'éventail de propositions envisagées, les crédits demandés au CNC ne sont pas obtenus et les différentes tentatives de la CST se soldent par un échec. Si la profession de décorateur ne disparaît pas, elle est forcée de se réinventer. La proportion d'extérieurs réels en comparaison des décors construits en studio augmente durablement. Le travail de prospection des lieux en fonction du scénario et de leur supervision pendant le tournage acquièrent donc une plus grande place dans le travail du décorateur, ce qui éloigne sa pratique de celle de l'architecte. La dénomination d'architecte-décorateur disparaît en même temps que le système des studios décline, et demeure donc définitivement associée aux décennies 1930 et 1940.

Cette esquisse des principales évolutions de la profession mériterait d'être enrichie de davantage d'études de cas approfondies. Cependant, elle permet de démontrer que la profession de décorateur de cinéma s'est formée en interdépendance avec les autres professions, dans le sens que donne à ce mot Andrew Abbott dans son ouvrage The System of Professions46. Ainsi, l'artiste-peintre décorateur de théâtre fait figure de repoussoir, tandis que l'architecte, par assimilation, sert le décorateur de cinéma dans sa quête de légitimité. À partir des années 1960, cette proximité entre le décorateur et l'architecte disparaît. La constitution d'une profession n'est donc pas le terme d'une évolution, mais les caractéristiques qui la définissent sont amenées à se tranformer au fil du temps. Dès lors, la fin des architectes-décorateurs n'est plus une menace, mais bien la définition, salvatrice, d'une nouvelle aire de compétences.

1 Priska Morrissey, Naissance d'une profession, invention d'un art : l'opérateur de prise de vues cinématographiques de fiction en France (1895-1926)

2 Jean-Pierre Berthomé, « Les décorateurs du cinéma muet en France », 1895, n° 65, 2011, pp. 90-111.

3 Claude Dubar, Pierre Tripier et Valérie Boussard, « Introduction générale » dans Sociologie des professions, Armand Colin, 2015, pp. 10-12.

4 Ibid., ch. 5, « La sociologie interactionniste des groupes professionnels », pp. 97-118.

5 La notion est créée par Andrew Abbott et exposée dans son ouvrage The System of Professions, London, The University of Chicago press, 1988, 435 p.

6 Louise Gousseau, Le décor et le métier. Lucien Aguettand-Blanc, architecte-décorateur de cinéma (1901-1969), th. d'École des Chartes, dir.

7 Cinémathèque, AGUETTAND1-176.

8 BnF, Arts du spectacle, COL-90.

9 Georges Wakhévitch, L’envers des décors, Paris, R. Laffont, 1977, 264 p.

10 Max et Jacques Douy, Décors de cinéma. Les studios français de Méliès à nos jours, Paris, Éditions du Collectionneur, 1993, 335 p.

11 Cinématographe, n° 76, « Le décor de film II », mars 1982.

12 Ces documents audiovisuels sont conservés sous forme numérisée au département de l'audiovisuel de la BnF. Les témoignages ont été recueillis de la

13 Max et Jacques Douy, op. cit., p. 328.

14 Morgan Lefeuvre, De l'avènement du parlant à la seconde guerre mondiale : histoire générale des studios de cinéma en France 1929-1939, th. de doct.

15 Id., « Grèves rouges et syndicats jaunes. Mouvement social et divisions syndicales dans les studios français (1936-1939) » dans L’Écran rouge.

16 Le syndicat rejoint la Fédération nationale des syndicats d'artisans français du film la même année. En témoigne un article de la Cinématographie

17 Robert-Jules Garnier, Cours de technique de décors appliquée au cinéma, publié dans « Documents (II) : Leçon de cinéma par Robert-Jules Garnier »

18 BnF, Arts du spectacle, 4-COL-90(493).

19 Sociologie des groupes professionnels. Acquis récents et nouveaux défis, dir. Didier Demazières et Charles Gadéa, La Découverte, 2009, pp. 435-451.

20 Ibid., p. 440.

21 Film visionné dans sa version conservée par le CNC.

22 Jean Lafitte est mentionné par Georges Wakhévitch dans L'envers des décors, op. cit., p. 62-63. Il est engagé par Jean Grémillon pour créer les

23 Ernst Ulrich Leben, Renaud d'Enfert et Rossella Froissart-Pezonne, Histoire de l’École nationale supérieure des arts décoratifs (1766-1941)

24 Georges Wakhévitch, op. cit., pp. 61-63.

25 Florent Champy, Sociologie de l’architecture, Paris, La Découverte, 2001, pp. 3-7.

26 Max Douy, interrogé par Philippe Esnault, BnF, Audiovisuel, VK-110301.

27 Georges Wakhévitch, op. cit., p. 61.

28 Cinémathèque, AGUETTAND72-B7, cours d'Hugues Laurent, p. 21.

29 Raymonde Moulin, L'artiste, l'institution et le marché, Flammarion, 1997, 437 p.

30 Selon Howard Becker, cette division du travail est même l'une des caractéristiques du milieu artistique. Voir Les mondes de l'art, Paris

31 Alexandre Trauner et Jean-Pierre Berthomé, Alexandre Trauner : décors de cinéma, Paris, Jade-Flammarion, 1988, p. 32.

32 Château de Pinterville, 1980 ; musée provençal du cinéma, 1980 ; château de Gaillon, 1984.

33 Iris Berbain, Du maître peintre décorateur de théâtre au scénographe : Émile Bertin (1878-1957), le dernier d'une tradition, th. de doct., dir.

34 Hugues Laurent, « Le décor de cinéma et les décorateurs », Bulletin de l’Afitec, n° 16, 1957, pp. 3-11.

35 Cinémathèque, AGUETTAND149-B8.

36 Le syndicat des techniciens de la production cinématographique est le nouveau nom du Syndicat général des artisans du film, fondé en 1937. Il est

37 Une lettre du 31 janvier 1944 fait connaître cette décision à Aguettand. Elle est signée par Eugène Carré, Raymond Gabutti, Max Douy, Claude Bouxin

38 Michel Marie, La Nouvelle Vague : une école artistique, Malakoff, Armand Colin, 2017, pp. 26-27.

39 Cinémathèque, AGUETTAND136-B8.

40 Max Douy, interrogé par Philippe Esnault, BnF, Audiovisuel, VK-110301.

41 Léon Barsacq, Le Décor de film : 1895-1969, Paris, H.Veyrier, 1985, p. 110.

42 Le terme de « décors naturels » est souvent utilisé par la CST, les décorateurs et les réalisateurs pour désigner les extérieurs réels, c'est à

43 Cinémathèque, AGUETTAND60-B6, « 1er projet. Syndicat des techniciens de la production cinématographique française ».

44 Ibid. À noter tout de même que le terme « abandonner » fut remplacé par « délaisser peu à peu » dans un autre texte du 15 août.

45 Aguettand réalise des croquis de ces éléments de « décor répertoire ». Cinémathèque, AGUETTAND55-B5.

46 Andrew Abbott, op. cit.

Bibliographie

L'Écran rouge. Syndicalisme et cinéma de Gabin à Belmondo, dir. Tangui Perron, Ivry-sur-Seine, Les Éditions de l'Atelier, 2018, 239 p.

Abbott, Andrew, The System of Professions, London, The University of Chicago press, 1988, 435 p.

Berthomé, Jean-Pierre, « Les décorateurs du cinéma muet en France », Mille huit cent quatre-vingt-quinze, n° 65, 2011, pp. 90‑111.

Lefeuvre, Morgan, De l’avènement du parlant à la seconde guerre mondiale : histoire générale des studios de cinéma en France 1929-1939, dir. Michel Marie, Paris 3, 2013, 822 p.

Morrissey, Priska, Naissance d'une profession, invention d'un art : l'opérateur de prises de vues cinématographiques de fiction en France (1895-1926), th. de doct., dir. Jean-Antoine Gili, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2008, 722 p.

Notes

1 Priska Morrissey, Naissance d'une profession, invention d'un art : l'opérateur de prise de vues cinématographiques de fiction en France (1895-1926), th. de doct., dir. Jean-Antoine Gili, Paris 1 Panthéon Sorbonne, 2008, 722 p.

2 Jean-Pierre Berthomé, « Les décorateurs du cinéma muet en France », 1895, n° 65, 2011, pp. 90-111.

3 Claude Dubar, Pierre Tripier et Valérie Boussard, « Introduction générale » dans Sociologie des professions, Armand Colin, 2015, pp. 10-12.

4 Ibid., ch. 5, « La sociologie interactionniste des groupes professionnels », pp. 97-118.

5 La notion est créée par Andrew Abbott et exposée dans son ouvrage The System of Professions, London, The University of Chicago press, 1988, 435 p.

6 Louise Gousseau, Le décor et le métier. Lucien Aguettand-Blanc, architecte-décorateur de cinéma (1901-1969), th. d'École des Chartes, dir. Christophe Gauthier et Pascale Goetschel, 2020, 342 p.

7 Cinémathèque, AGUETTAND1-176.

8 BnF, Arts du spectacle, COL-90.

9 Georges Wakhévitch, L’envers des décors, Paris, R. Laffont, 1977, 264 p.

10 Max et Jacques Douy, Décors de cinéma. Les studios français de Méliès à nos jours, Paris, Éditions du Collectionneur, 1993, 335 p.

11 Cinématographe, n° 76, « Le décor de film II », mars 1982.

12 Ces documents audiovisuels sont conservés sous forme numérisée au département de l'audiovisuel de la BnF. Les témoignages ont été recueillis de la fin des années 1970 aux années 2000.

13 Max et Jacques Douy, op. cit., p. 328.

14 Morgan Lefeuvre, De l'avènement du parlant à la seconde guerre mondiale : histoire générale des studios de cinéma en France 1929-1939, th. de doct., dir. Michel Marie, Paris 3 Sorbonne Nouvelle, 2013, pp. 426-428.

15 Id., « Grèves rouges et syndicats jaunes. Mouvement social et divisions syndicales dans les studios français (1936-1939) » dans L’Écran rouge. Syndicalisme et cinéma de Gabin à Belmondo, dir. Tangui Perron, Ivry-sur-Seine, Les Éditions de l’Atelier, 2018, pp. 43-44.

16 Le syndicat rejoint la Fédération nationale des syndicats d'artisans français du film la même année. En témoigne un article de la Cinématographie française daté du 14 octobre 1933.

17 Robert-Jules Garnier, Cours de technique de décors appliquée au cinéma, publié dans « Documents (II) : Leçon de cinéma par Robert-Jules Garnier », 1895, n° 65, 2011, pp. 112-121.

18 BnF, Arts du spectacle, 4-COL-90(493).

19 Sociologie des groupes professionnels. Acquis récents et nouveaux défis, dir. Didier Demazières et Charles Gadéa, La Découverte, 2009, pp. 435-451.

20 Ibid., p. 440.

21 Film visionné dans sa version conservée par le CNC.

22 Jean Lafitte est mentionné par Georges Wakhévitch dans L'envers des décors, op. cit., p. 62-63. Il est engagé par Jean Grémillon pour créer les décors de Daïnah la Métisse (1932), puis travaille pour Henri Decoin, Léon Poirier ou Jacques Séverac.

23 Ernst Ulrich Leben, Renaud d'Enfert et Rossella Froissart-Pezonne, Histoire de l’École nationale supérieure des arts décoratifs (1766-1941), Journal de l’ENSAD, Paris, École nationale supérieure des arts décoratifs, 200, pp. 183-184.

24 Georges Wakhévitch, op. cit., pp. 61-63.

25 Florent Champy, Sociologie de l’architecture, Paris, La Découverte, 2001, pp. 3-7.

26 Max Douy, interrogé par Philippe Esnault, BnF, Audiovisuel, VK-110301.

27 Georges Wakhévitch, op. cit., p. 61.

28 Cinémathèque, AGUETTAND72-B7, cours d'Hugues Laurent, p. 21.

29 Raymonde Moulin, L'artiste, l'institution et le marché, Flammarion, 1997, 437 p.

30 Selon Howard Becker, cette division du travail est même l'une des caractéristiques du milieu artistique. Voir Les mondes de l'art, Paris, Flammarion, 1988, pp. 32-39.

31 Alexandre Trauner et Jean-Pierre Berthomé, Alexandre Trauner : décors de cinéma, Paris, Jade-Flammarion, 1988, p. 32.

32 Château de Pinterville, 1980 ; musée provençal du cinéma, 1980 ; château de Gaillon, 1984.

33 Iris Berbain, Du maître peintre décorateur de théâtre au scénographe : Émile Bertin (1878-1957), le dernier d'une tradition, th. de doct., dir. Jean-Michel Leniaud, EPHE, 2016, p. 193.

34 Hugues Laurent, « Le décor de cinéma et les décorateurs », Bulletin de l’Afitec, n° 16, 1957, pp. 3-11.

35 Cinémathèque, AGUETTAND149-B8.

36 Le syndicat des techniciens de la production cinématographique est le nouveau nom du Syndicat général des artisans du film, fondé en 1937. Il est affilié à la CGT.

37 Une lettre du 31 janvier 1944 fait connaître cette décision à Aguettand. Elle est signée par Eugène Carré, Raymond Gabutti, Max Douy, Claude Bouxin, René Renoux et Jacques Colombier (Cinémathèque, AGUETTAND149-B8).

38 Michel Marie, La Nouvelle Vague : une école artistique, Malakoff, Armand Colin, 2017, pp. 26-27.

39 Cinémathèque, AGUETTAND136-B8.

40 Max Douy, interrogé par Philippe Esnault, BnF, Audiovisuel, VK-110301.

41 Léon Barsacq, Le Décor de film : 1895-1969, Paris, H.Veyrier, 1985, p. 110.

42 Le terme de « décors naturels » est souvent utilisé par la CST, les décorateurs et les réalisateurs pour désigner les extérieurs réels, c'est à dire qui ne font pas appel à un décor construit.

43 Cinémathèque, AGUETTAND60-B6, « 1er projet. Syndicat des techniciens de la production cinématographique française ».

44 Ibid. À noter tout de même que le terme « abandonner » fut remplacé par « délaisser peu à peu » dans un autre texte du 15 août.

45 Aguettand réalise des croquis de ces éléments de « décor répertoire ». Cinémathèque, AGUETTAND55-B5.

46 Andrew Abbott, op. cit.

Citer cet article

Référence électronique

Louise Gousseau, « Le temps des architectes-décorateurs : naissance et transformations de la profession de décorateur de cinéma », Revue d’histoire culturelle [En ligne],  | 2021, mis en ligne le 16 novembre 2021, consulté le 28 mars 2024. URL : http://revues.mshparisnord.fr/rhc/index.php?id=1069

Auteur

Louise Gousseau

Louise Gousseau est élève de l'école des Chartes, promotion 2020. Elle est également diplômée du master « Histoire des sociétés occidentales contemporaines (XIXe-XXIsiècles) » de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est l'autrice d'une thèse d'école, soutenue le 2 juin 2020, sous la co-direction de Christophe Gauthier et de Pascale Goetschel. Le décor et le métier. Lucien Aguettand-Blanc, architecte-décorateur de cinéma (1901-1969), th. d'École des Chartes, dir. Christophe Gauthier et Pascale Goetschel, 2020, 342 p. ; Le décor et ses fantômes. Lucien Aguettand-Blanc, architecte-décorateur de cinéma (1901-1948), mémoire de master, dir. Christophe Gauthier et Pascale Goetschel, Université Paris I Panthéon Sorbonne, 2019, 201 p.