feminist legal anthropology http://revues.mshparisnord.fr/chcp/index.php?id=693 Entrées d’index fr 0 Pluralité de justices et de réparations : les apports de l’anthropologie juridique à l’analyse des disparitions au Mexique http://revues.mshparisnord.fr/chcp/index.php?id=687 Dans cet article, l’auteure partage ses réflexions théoriques et méthodologiques à partir de trois expériences de recherche engagée ayant accompagné la lutte juridique et/ou politique de femmes indigènes et de familles de personnes disparues au Mexique. L’article rend compte de la manière dont, dans des contextes de violence extrême, ces femmes ont trouvé dans l’organisation collective un moyen de reconstruire le tissu social de leurs communautés et de se confronter aux perspectives hégémoniques sur la justice et la réparation.Forte de vingt-cinq années d’expérience en anthropologie juridique féministe dans des contextes de violences extrêmes à l’encontre des femmes, l’auteure centre sa réflexion sur la nécessité de conserver une perspective critique sur le droit et les droits, sans écarter pour autant les possibilités qu’offre la lutte juridique pour la défense de la vie. L’article documente les apprentissages méthodologiques de l’auteure issus d’échanges de savoirs avec des femmes qui luttent contre les violences extrêmes et avec des collectifs de familles de personnes disparues, confirmant la richesse épistémique qu’implique le fait de mener une recherche selon des méthodologies collaboratives qui se concentrent sur les besoins concrets des acteurs et actrices sociaux avec lesquels nous travaillons.En prenant comme angle d’approche la recherche collaborative réalisée dans trois contextes différents de violences extrêmes, l’auteure réfléchit à l’importance de pluraliser les conceptions de la justice et de la réparation à partir des connaissances et expériences de femmes qui luttent contre de multiples violences et pour la reconstruction du tissu social de leurs communautés.1) La première expérience rapportée concerne le travail de terrain réalisé dans des communautés touchées par la violence militaire et paramilitaire dans les États du Chiapas et du Guerrero, pour la préparation de rapports d’expertise anthropologique présentés devant les tribunaux nationaux et internationaux pour la défense des femmes indigènes. L’analyse de l’usage contre-insurrectionnel de la violence sexuelle et de son impact communautaire, permet à l’auteure de documenter les manières spécifiques de comprendre le préjudice et la justice à partir des épistémologies des personnes concernées.2) La deuxième expérience dont s’inspirent ces réflexions a été la recherche menée avec des familles de personnes disparues de l’organisation « Les Traceuses d’El Fuerte » (Las Rastreadoras d’El Fuerte) dans l’État du Sinaloa, au nord-ouest du Mexique. Cette organisation, comme beaucoup d’autres dans le pays, est principalement composée de mères et d’épouses de disparus qui, face à l’incapacité de l’État mexicain, se sont mises à chercher les restes humains de leurs proches dans des fosses clandestines. À partir de son expérience de recherche collaborative avec cette organisation, l’auteure documente la manière dont « Les Traceuses » se sont approprié les connaissances médico-légales obtenues dans les multiples espaces de confluence et de formation du mouvement des familles de disparus, et comment, en utilisant leurs savoirs locaux au sujet de la géographie de la violence, elles ont déstabilisé les hiérarchies épistémiques des sciences médico-légales, en légitimant leurs propres savoirs. Ces femmes ne cherchent pas uniquement les leurs, mais toutes les personnes disparues, au point que de nombreuses mères qui ont déjà retrouvé leur proche continuent de participer aux recherches. En considérant tous les corps qu’elles trouvent comme des personnes et non comme des restes humains, et en les adoptant comme les leurs, elles rompent avec la « privatisation des morts » et renforcent le sens de la communauté.3) La troisième expérience qui alimente les réflexions de cet article est le travail d’accompagnement d’un collectif de familles de personnes disparues dans l’État du Morelos nommé « Rentrer à la maison Morelos » (Regresando a Casa Morelos). Il s’agit d’une organisation composée de mères, sœurs et épouses de disparus, qui se sont réunies pour dénoncer l’usage criminel des fosses communes de l’État pour cacher les corps de personnes disparues. Les cas des fosses communes de Tetelcingo et Jojutla, où 201 corps ont été retrouvés enterrés de manière irrégulière, sans autopsie et, pour beaucoup d’entre eux, avec des signes de torture, ont une fois de plus mis en évidence la responsabilité de l’État dans la disparition de personnes. Cette expérience permet à l’auteure d’analyser le rôle de l’État dans la reproduction de la pédagogie de la terreur et les violences bureaucratiques auxquelles sont confrontées les familles de disparus.À partir de ces trois recherches collaboratives, l’auteure réfléchit aux déstabilisations épistémiques que produisent les femmes indigènes qui luttent contre les violences militaires et les femmes organisées qui cherchent leurs proches, en s’appropriant les savoirs médico-légaux. Les leçons tirées de ces trois expériences l'amènent à affirmer que la reconnaissance d’autres épistémologies, ainsi que la pluralisation des concepts de justice documentés par l’anthropologie juridique, apportent beaucoup à la recherche de formes plus créatives de compréhension de la réparation et de moyens de guérir les communautés blessées par la violence. “Plurality of Justices and Reparations: The Contributions of Legal Anthropology to the Analysis of Disappearances in Mexico”In this article the author shares her theoretical and methodological reflections from three activist research experiences along the legal and / or political struggle of indigenous women and relatives of disappeared persons in Mexico. The article documents how, in contexts of extreme violence, these women have found in their collective organization a means to rebuild the social fabric of their communities and confront the hegemonic perspectives around justice and reparations.Reviewing her 25-year-long experience of feminist legal anthropology in contexts of extreme violence against women, the author places at the center of her reflection the need to maintain a critical perspective on law and rights, without discarding the possibilities of the legal fight in defense of life. The article examines the methodological lessons of the author drawing on dialogues of knowledge with women who fight extreme violence and with groups of relatives of disappeared persons, claiming that there is high epistemic value to carry out research through collaborative methodologies that place at the centre the specific needs of the social actors with whom scholars work.Taking on as an analytical lens the collaborative research carried out in three different contexts of extreme violence, the author reflects on the importance of pluralizing the conceptions of justice and reparations, based on the knowledge and experiences of women who fight against multiple forms of violence and for the reconstruction of the social fabric of their communities.1) The first experience is that of the field investigation carried out in communities affected by military and paramilitary violence in the states of Chiapas and Guerrero – it was conducted to build anthropological expert opinions presented before national and international courts in the defence of indigenous women. The analysis of the counter-insurgent use of sexual violence and its community impact allows the author to document the specific ways of understanding harm and justice from the epistemologies of the affected people.2) The second experience is the investigation conducted with relatives of disappeared persons from the organization Las Rastreadoras de El Fuerte in the state of Sinaloa, in northwestern Mexico. This organization, like many of its counterparts in the country, is made up mainly of mothers and wives of the disappeared, who, given the incapacity of the Mexican State, have taken on the task of searching for the human remains of their relatives in clandestine graves. Based on her collaborative research experience with this organization, the author documents how Las Rastreadoras have appropriated the forensic knowledge gained in the multiple spaces of convergence and formation of the movement of relatives of the disappeared, by also mobilizing their local knowledge of the geography of violence, thus destabilizing the epistemic hierarchies of forensic sciences and legitimizing their own knowledge. These women are not only searching for their relatives, but for all missing persons, and many of the mothers who have already completed the search for their kin, keep participating in the search. By considering all the bodies they unearth as people and not mere human remains, and by adopting them as their own, they break up with the “privatization of the dead” and reinforce the sense of community.3) The third experience fueling the reflections of this article is the work as a companion for a group of relatives of disappeared persons in the state of Morelos called “Regresando a Casa Morelos”. It is an organization composed of mothers, sisters and wives of the disappeared, who have organized around the accusation of the criminal use of state mass graves to cover up for the bodies of disappeared persons. The cases of the mass graves of Tetelcingo and Jojutla, where 201 bodies have been found buried jaggedly, without autopsies and many of them with marks of torture, once again revealed the state’s responsibility in the disappearance of people. This experience allows the author to reflect on the role of the state in the reproduction of the “pedagogy of terror” and the bureaucratic violence faced by the families of the disappeared.These three collaborative investigations allow the author to reflect on the epistemic destabilizations produced by indigenous women who fight military violence and organized women who seek their relatives by appropriating forensic knowledge. The lessons learned from these three experiences allow the author to argue that the recognition of other epistemologies, as well as the pluralization of the concepts of justice, which legal anthropology has been documenting, can valuably contribute to the search for more creative ways of understanding the law and reparations, and to seek the healing of communities hit by violence. «Pluralidad de justicias y resarcimientos: los aportes de la antropología jurídica al análisis de las desapariciones en México»En este artículo la autora comparte sus reflexiones teóricas y metodológicas a partir de tres experiencias investigación activista acompañando la lucha legal y/o política mujeres indígenas y familiares de personas desaparecidas en México. El artículo documenta como en contextos de violencias extremas estas mujeres han encontrado en la organización colectiva una apuesta para reconstruir el tejido social de sus comunidades y confrontar las perspectivas hegemónicas en torno a la justicia y el resarcimiento.Recuperando su experiencia de 25 años trabajando desde la antropología jurídica feminista en contextos de violencias extremas hacia las mujeres, la autora pone en el centro de su reflexión la necesidad de mantener una perspectiva crítica ante el derecho y los derechos, sin desechar las posibilidades de la lucha jurídica en la defensa de la vida. El artículo documenta los aprendizajes metodológicos de la autora a partir de diálogos de saberes con mujeres que luchan en contra de las violencias extremas y con colectivos de familiares de personas desaparecidas, reivindicando la riqueza epistémica que implica hacer investigación desde metodologías colaborativas que ponen en el centro las necesidades concretas de los y las actoras sociales con quienes se trabaja. Tomando como ventana analítica la investigación colaborativa realizada en tres contextos distintos de violencias extremas, la autora reflexiona sobre la importancia de pluralizar las concepciones de justicia y resarcimiento, a partir de los conocimientos y experiencias de mujeres que luchan contra múltiples violencias y por la reconstrucción del tejido social de sus comunidades.La primera experiencia es la investigación de campo realizada en comunidades afectadas por la violencia militar y paramilitar en los estados de Chiapas y Guerrero, para la realización de peritajes antropológicos presentados ante cortes nacionales e internacionales en la defensa de mujeres indígenas. El análisis del uso contrainsurgente de la violencia sexual y su impacto comunitario, le permite a la autora documentar las formas específicas de entender el agravio y la justicia desde las epistemologías propias de las personas afectadas.La segunda experiencia de la que abrevan estas reflexiones ha sido la investigación con familiares de personas desaparecidas de la organización Las Rastreadoras de El Fuerte en el estado de Sinaloa, en el noroeste de México. Esta organización, como muchas otras en el país está constituida mayoritariamente por madres y esposas de desaparecidos y desaparecidas, que ante la incapacidad del Estado mexicano se han dado a la tarea de buscar los restos humanos de sus familiares en fosas clandestinas. A partir de su experiencia de investigación colaborativa con esta organización, la autora documenta como Las Rastreadoras se han apropiado los conocimientos forenses obtenidos en los múltiples espacios de confluencia y formación del movimiento de familiares de desaparecidos, y utilizando sus saberes locales en torno a la geografía de la violencia, han desestabilizado las jerarquías epistémicas de las ciencias forenses, legitimando sus propios saberes. Estas mujeres no sólo buscan a sus familiares, sino a todas las personas desaparecidas, incluso muchas de las madres que ya han encontrado continúan participando en las búsquedas. Al considerar a todos los cuerpos que encuentran como personas y no solo como restos humanos, y al adoptarlos como propios, rompen con la «privatización de los muertos» y refuerzan el sentido de comunidad.La tercera experiencia que alimenta las reflexiones de este artículo es el trabajo de acompañamiento a un colectivo de familiares de personas desaparecidas en el estado de Morelos llamado «Regresando a Casa Morelos». Se trata de una organización formada por madres, hermanas y esposas de desaparecidos, que se han articulado en torno a la denuncia del uso criminal de las fosas comunes estatales, para ocultar los cuerpos de personas desaparecidas. Los casos de las fosas comunes de Tetelcingo y Jojutla en donde se han encontrado 201 cuerpos enterrados de manera irregular, sin necropsias y muchos de ellos con señales de tortura, puso una vez más en evidencia la responsabilidad estatal en la desaparición de personas. Esta experiencia le permite a la autora reflexionar sobre el papel del Estado en la reproducción de la pedagogía del terror y las violencias burocráticas que enfrentas las familiares de desaparecidos. A partir de estas tres investigaciones colaborativas, la autora reflexiona sobre las desestabilizaciones epistémicas que producen las mujeres indígenas que luchan contra las violencias militares y las mujeres organizadas que buscan a sus familiares apropiándose los saberes forenses. Los aprendizajes de estas tres experiencias llevan a la autora a argumentar que el reconocimiento de otras epistemologías, así como la pluralización de los conceptos de justicias, que ha venido documentando la antropología jurídica, tienen mucho que aportar a la búsqueda de formas más creativas de entender el resarcimiento y buscar la sanación de comunidades lastimadas por la violencia. dim., 13 mars 2022 23:15:34 +0100 mer., 06 avril 2022 17:02:56 +0200 http://revues.mshparisnord.fr/chcp/index.php?id=687