Appels à contribution

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Call for Papers 

Appel à contributions pour le dossier thématique du n°8 : « Olympisme et cultures, cultures de l’olympisme. Appropriations, pratiques, représentations »

L’existence maintenant plus que centenaire des Jeux olympiques de l’ère moderne autorise l’appréhension de cet événement par l’étude des cultures – ici entendues comme autant d’imaginaires sociaux mais se déclinant aussi dans leurs pratiques – en lien avec l’olympisme. Le pluriel est de rigueur tant l’appropriation ou la contestation des Jeux olympiques par leurs acteurs et leurs contempteurs peuvent différer de l’idéal olympique tel qu’il fut défini par Pierre de Coubertin (voir sur ce point les travaux de Patrick Clastres).

La dimension culturelle de l’événement olympique est d’abord, dans l’esprit de son fondateur, liée à la référence antique et s’inscrit dans une conception éducative. La culture est pensée par Pierre de Coubertin comme une partie intégrante des Jeux qui comportent, jusqu’en 1948, des épreuves artistiques. Celles-ci expriment une forme de classicisme et apparaissent quelque peu réduites à ce que l’on nommait alors les Beaux-Arts (intitulé du ministère ou secrétariat d’État qui en avait la tutelle dans la France de la IIIe République) : architecture, littérature, peinture, sculpture…

Le rapport entre olympisme et culture dépasse toutefois largement ces exemples. Il révèle en effet des formes d’appropriation et d’interprétation de l’olympisme par des groupes sociaux variés, dans une optique parfois divergente. Les Jeux olympiques sont longtemps perçus comme un bastion de l’amateurisme, y compris dans une vision obsidionale par rapport au développement puis au triomphe du professionnalisme, qui finit d’ailleurs par les investir dans de multiples sports au tournant des années 2000. Cette vision est tout à la fois celle d’élites sociales traditionnelles, souvent liées à la noblesse, et qui voisinent au sein du Comité international olympique (CIO), et celle de familles politiques de gauche exaltant l’amateurisme, fût-il d’État comme dans les pays communistes. Les éditions successives des Jeux olympiques sont aussi l’occasion de découvrir des cultures nationales, de manière touristique pour les spectateurs qui se déplacent dans les pays hôtes mais aussi de façon très organisée lors des cérémonies d’ouverture qui expriment de façon croissante une intervention plus ou moins soignée du pouvoir politique. À titre d’exemple, l’édition de Londres en 2012 a été l’occasion de réaliser une fresque d’envergure sur l’histoire britannique, dont il convient naturellement d’interroger, comme pour chaque cérémonie de ce type, les choix via l’accent porté sur certains événements du passé ou au contraire les silences observés. La préparation de l’accueil des Jeux par une ville est aussi l’occasion de choix et de débats sur les infrastructures nécessaires qui mobilise régulièrement artistes et architectes. Le déroulement des JO enfin est occasion d’observation et de médiatisation par des intellectuels (comme l’illustrent les expériences vécues sur les gradins des stades et publiées par Charles Maurras ou Pier Paolo Pasolini).

Si les Jeux olympiques apparaissent donc bien comme de véritables événements culturels, il s’agira de comprendre ceux-ci mobilisent et contribuent à ancrer mais aussi à faire évoluer des cultures olympiques multiformes. C’est l’enjeu des articles que souhaite réunir ce numéro thématique de la Revue d’histoire culturelle, à partir de trois axes principaux, mais non exclusifs :

  • L’olympisme comme amateurisme : il s’agira d’étudier les regards portés sur l’olympisme comme valorisation de l’amateurisme à partir de points de vue variés en matière d’ancrage social et géographique, depuis le relatif consensus des élites réunies au sein du CIO durant la première moitié du XXe siècle jusqu’à l’époque la plus contemporaine à travers les mutations accompagnant la sportivisation des sociétés et le développement du professionnalisme qui bat en brèche les valeurs de l’amateurisme. Cette analyse peut être réalisée en lien avec les cultures politiques notamment la culture communiste (par exemple, que signifie l’olympisme dans les pays de l’Est ?).

  • Les Jeux olympiques comme moment de mobilisation culturelle : les contributions devront faire le point sur les débats et controverses suscités par l’organisation des Jeux olympiques (comme l’interrogation sur le devenir des vestiges fascistes au moment de l’édition de 1960 à Rome), sur la dimension architecturale de l’événement et son rôle dans la transformation des villes ou pourront porter sur le contenu des cérémonies d’ouverture, vecteur privilégié d’expression d’une lecture officielle de l’histoire nationale.

  • Les épreuves artistiques aux Jeux olympiques : l’existence d’épreuves artistiques aux Jeux olympiques jusqu’en 1948, souvent négligée par les historiens du sport comme par ceux des pratiques culturelles en général, peuvent faire l’objet de contributions portant sur ces productions culturelles envisagées par genre (architecture, littérature…), par auteur ou par édition.

Échéancier :

  • Soumission d’un résumé (2 500 signes maximum) et d’une brève notice bio-bibliograhique avant le 15 mars 2023 aux deux adresses suivantes : fabien.archambault@univ-paris1.fr ; fabien.conord@uca.fr

  • Notification aux auteurs courant avril 2023

  • Remise des articles complets (50 000 signes environ espaces compris) : 15 octobre 2023

  • Publication au printemps 2024

Appel à contributions pour le dossier thématique du n°7 : « L’Europe centrale et orientale dans les espaces de circulations culturelles » [terminé]

Coordination : Didier Francfort (Université de Lorraine), Antoine Nivière (Centre de Recherches sur les Cultures et les Littératures Européennes, Université de Lorraine).

La fin du Bloc soviétique a conduit à des redéfinitions successives des espaces centre- et est-européens. On a ainsi cessé de parler de « Pays de l’Est » pour parler de PECO (Pays d’Europe centrale et orientale), terme qu’on a d’ailleurs assez vite abandonné. Les travaux d’Antoine Marès ont largement contribué à imposer l’idée d’une Europe médianei. L’histoire culturelle peut contribuer à ces réflexions sur les recompositions des espaces. On a longtemps utilisé le concept d’aire culturelle pour définir des régions cohérentes, distinctes les unes des autres, à partir de critères linguistiques ou religieux. Ce concept est, à présent, considéré, en particulier depuis la XIe Rencontre européenne d’analyse des sociétés politiques (Paris, 17-18 octobre 2019), comme un « mal nécessaire »ii. Le dossier thématique cherche à rassembler des réflexions permettant de dépasser cette étape en partant non pas d’aires culturelles prédéfinies mais en construisant progressivement des espaces (et non des territoires) ouverts et fluctuants définis comme des espaces de circulations culturelles.

Nous proposons ainsi de rassembler des travaux portant sur les phénomènes de circulation culturelle impliquant une Europe centrale et orientale largement définie en contact avec d’autres aires parfois lointaines. Les échanges culturels ne concernent pas seulement la circulation des idées et des produits « labellisés » comme culturels mais aussi les itinéraires personnels, les migrations plus ou moins massives conduisant à l’adoption de pratiques alimentaires, de modes vestimentaires autant que de références littéraires, picturales ou musicales. Une approche d’histoire culturelle permet ainsi de comprendre la persistance de liens entre l’Europe centrale et orientale et les États-Unis, même en temps de Guerre froide. Ludovic Tournès a bien montré que l’américanisation ne se limite pas à une diffusion, à une exportation des produits culturels américains dans le mondeiii. Elle implique un mouvement inverse de construction d’une culture américaine à partir d’éléments exogènes parmi lesquels les éléments issus d’Europe centrale et orientale ont une importance particulière. Ainsi, des musiciens d’Europe centrale et orientale ont pu jouer un rôle important dans l’évolution du jazz américain. Mais les liens entre l’Europe centrale et orientale et les Etats-Unis ne sont qu’un cas. La culture yiddish en Argentine, la perception dans les pays du Bloc soviétique du cinéma musical indien des années 1950 (Raj Kapoor en particulier) apportent d’autres possibilités d’études de cas.

Deux exemples cinématographiques permettront de donner des idées pour des propositions de contribution. Jurek Becker (né à Łódź en 1937) a écrit le scénario de Jakob le menteur (« Jakob der Lügner »), film réalisé en 1975 par Frank Beyer. Il s’agit d’une coproduction est-allemande et tchécoslovaque, primée à Berlin-Ouest et nominée pour un oscar. Un remake en est réalisé en 1996 aux États-Unis par Peter Kassovitz (né à Budapest en 1938) avec Robin Williams. L’autre exemple cinématographique correspond également à la réalisation de deux adaptations successives d’un même roman, Solaris, de Stanisław Lem (né à Lviv, Lwów, Lemberg en 1921) par Andreï Tarkovski (1972) puis par Steven Soderbergh (2002).

Les échanges culturels entre l’Europe centrale et orientale et les États-Unis permettent de comprendre les phénomènes de redéfinition identitaire complexes par la culture (articulation des appartenances religieuses et des cultures nationales, par exemple). Mais le dossier thématique peut inclure d’autres cas de circulations culturelles significatives. La musique, la littérature, les arts visuels, le théâtre, le cinéma peuvent être sollicités, ainsi que l’architecture, ne serait-ce que parce que la « soviétisation » des paysages urbains est passée par la construction de bâtiments inspirés par les gratte-ciels américains. Le projet du dossier est en effet de désenclaver les études culturelles aréales et de considérer, comme le faisait Alcide De Gasperi à propos de l’Italie, que Varsovie, Helsinki ou Bucarest peuvent être des villes atlantiques.

L’évocation de la persistance des liens culturels entre l’Europe centrale et les États-Unis pendant la Guerre froide (du jazz au rock, du cinéma au roman…) n’est pas le seul sujet envisagé pour ce dossier thématique. Les propositions de contributions attendues pourront mettre en évidence d’autres cas dans lesquels les circulations culturelles ont contribué à des redéfinitions identitaires dans une Europe centrale et orientale largement définie de la Spree à l’Oural et de la Baltique à la mer Noire.

La chronologie du dossier est par ailleurs largement ouverte, en particulier, en amont, à l’étude des circulations et des échanges culturels entre l’Europe occidentale et l’Europe centrale et orientale au XVIIIe siècle, des voyages de Pierre le Grand en Hollande à la présence d’architectes italiens à Saint-Pétersbourg.

Sans être exhaustive, une liste des formes de circulation et des cas singuliers qui peuvent être étudiées dans le dossier thématique peut être provisoirement établie :

  • Le voyage : tournées d’artistes et de sportifs, réfugiés et expatriés.

  • L’adaptation ou la réinterprétation d’œuvres « importées » tant dans le domaine des cultures populaires que dans celui des cultures savantes.

  • La réception des objets culturels qui circulent à partir de l’Europe centrale et orientale ou vers elle.

  • L’instrumentalisation politique des circulations culturelles.

  • Les échecs de tentatives d’exportation de productions culturelles ou de modes.

Échéancier :

Appel à contributions pour le dossier thématique du n°6 : « Nouvelles approches de l’histoire culturelle italienne. Imaginaires, cultures politiques, cultures de masse » [terminé]

Note de fin

i Antoine Marès, « Construction, déconstruction et marginalisation de l'Europe centrale dans le discours français » in Paul Gradvohl, (sous la direction de), L’Europe médiane au XXe siècle, fractures, décompositions, recompositions, surcompositions, Prague : CEFRES, 2011, p. 195-214.

ii http://fasopo.org/sites/default/files/17_18102019.pdf [consulté le 8 juillet 2022] Cette réflexion reprend des termes posés préalablement par Michel Wieviorka.

https://wieviorka.hypotheses.org/347 [consulté le 8 juillet 2022]

iii Ludovic Tournès, Américanisation. Une histoire mondiale (XVIIIe-XXIe siècle), Paris, Fayard, 2021.