« Le smoking de madame » : mode et genre dans la France de l’entre-deux-guerres

“Le smoking de madame”: fashion and gender in interwar France

DOI : 10.56698/rhc.755

Résumés

La saison automne-hiver 1925-1926 voit naître une création de mode qui fait polémique dans la presse. Le smoking, costume jusque-là exclusivement réservé aux hommes, apparaît dans des versions féminines, proposées par des couturiers et tailleurs parisiens. Le « beau sexe » dispose désormais d’un smoking « corrigé » rien que pour lui. Adapté, ou plutôt inspiré par la version masculine, l’ensemble habillé devient un costume aux déclinaisons multiples. À une époque où l’idéal de féminité réside dans une allure androgyne de « garçonne » aux cheveux courts et à la silhouette tubulaire, cette tenue fait l’objet de critiques, de caricatures et de commentaires grivois représentatifs d’une rhétorique antiféministe. La peur de la virilisation de l’apparence féminine, renforcée par le port du smoking, suscite le fantasme de l’indifférenciation des sexes et la crainte d’un dépeuplement de la France provoqué par le refus de la maternité de la femme moderne.

The Fall-Winter 1925-1926 season saw the birth of a fashion creation that caused controversy in the press. The tuxedo, a suit until then exclusively reserved for men, appears in feminine versions, proposed by Parisian couturiers and tailors. The "fairer sex" now has a "corrected" tuxedo to call his own. Adapted, or rather inspired by the male version, the dressed set becomes a costume with multiple variations. At a time when the ideal of femininity resides in an androgynous allure with short hair and tubular silhouette, this outfit is subject to criticism, caricatures and naughty comments from an antifeminist rhetoric. The fear of the virilization of the female appearance, reinforced by the wearing of the tuxedo, arouses the fantasy of the lack of differentiation of the sexes and the fear of a depopulation of France caused by the refusal of maternity by the modern woman.

Index

Mots-clés

smoking, genre, vêtement et mode, garçonne, androgynie

Keywords

tuxedo, gender, clothes and fashion, flapper, androgyny

Plan

Texte

Quelques années avant que les images des femmes en smoking dans la boîte de nuit lesbienne le Monocle soient capturées par l’objectif de Brassaï, la haute couture – lieu d’excellence de la création féminine à la française – propose une adaptation de cette tenue tout droit sortie de l’univers vestimentaire masculin. Ce smoking, costume d’origine anglaise, naît à la fin du XIXe siècle et vient défier la souveraineté de l’habit noir comme tenue de soirée. Il entre dans la catégorie des habits composant des codes vestimentaires masculins très stricts, témoins d’une « grande renonciation »1 à la parure. La garde-robe de l’homme moderne naît dans le sillage de l’avènement des valeurs d’égalité et du rejet des apparences ostentatoires de l’Ancien Régime.

Sophistiqué, tout en demeurant sobre, dans son association entre le noir et le blanc, le smoking est le « vêtement fétiche de la mondanité modern style »2. Au sein de la bourgeoisie française, il est d’abord porté dans les villes balnéaires et les villes d’eaux, jusqu’à ce qu’il atteigne son apogée après la Grande Guerre parmi la population masculine qui l’adopte comme la tenue ad hoc exigée pour de nombreuses activités de la vie mondaine.

Sa version dédiée aux femmes connaîtra une vogue entre les années 1925 et 1927, période au cours de laquelle elle sort des magazines et rubriques de mode pour envahir les pages des quotidiens et hebdomadaires, et s’imposer dans le débat public. Dans ce contexte, une controverse émerge à propos de la mode androgyne qui atteint son apogée entre les années 1924 et 19263. En 1925, les cheveux courts « à la garçonne » sont adoptés par une femme sur trois4. La même année, la jupe voit son ourlet monter jusqu’au genou ; elle n’a jamais été aussi courte au cours de cette décennie5. Le smoking féminin apparaît-il comme une tenue transgressive ou bien ne fait-il que se conformer aux nouveaux canons de féminité de l’époque ? 

Au-delà de la presse de mode6 qui éclaire sur la réception de cette vogue, l’étude des quotidiens généralistes7 témoigne de la polémique que provoque dans la société cette création de haute couture. L’attention consacrée à l’évolution des mœurs et à la masculinisation de l’apparence féminine dans les caricatures8 de l’époque justifie l’ajout au corpus des revues satiriques Fantasio, Le Journal Amusant, Le Sourire, et La Vie Parisienne.

Après avoir observé, dans un premier temps, les multiples déclinaisons du costume et les efforts entrepris par les couturiers et tailleurs pour le féminiser, cet article s’intéressera à l’accueil ambivalent réservé au smoking féminin par la presse. Les nombreuses critiques des commentateurs voient dans l’apparition de cette tenue l’accomplissement de la « garçonnisation, [une] aggravation naturelle, fatale, d’une tendance déjà existante »9. Le smoking féminin refléterait alors l’affranchissement des frontières de genre tout en confirmant la nouvelle place des femmes dans la société française de l’après-guerre, éclairant de fait la crainte des identités sexuelles défiant la norme.

Féminisé à souhait 

En novembre 1925, le magazine Les Modes publie la photographie d’une femme mannequin « en smoking, tailleur d’après-midi10 ». Cette femme tient une cigarette, ses cheveux sont gominés, plus « à la garçon »11 qu’« à la garçonne ». Le modèle, proposé par la maison Beer, se rapproche du smoking masculin. Entre sa taille et le haut de son corps, le seul signe de féminité apparent est sa bouche dessinée avec un rouge à lèvres. En bas, c’est de sa jupe, ses bas de soie et chaussures à talons qu’émane sa féminité. C’est une femme divisée en deux : mi-masculine, mi-féminine. L’androgynie du smoking se démarque des toilettes proposées dans le même magazine qui expose des modèles de robes du soir brodées à taille basse.

Durant les Années folles12, les tenues de soirée sont exubérantes. Alors que la mode dévoile, le soir, les bras et le décolleté, elle permet aux femmes, pendant la journée, de s’habiller de façon plus androgyne, en robes-chemises et tailleurs. Presque une décennie après la fin de la Grande Guerre, le nouvel idéal de la féminité et l’image de la « femme moderne » sont désormais omniprésents dans les magazines de mode. La silhouette svelte comme un « I » est sculptée par les formes tubulaires de la nouvelle mode qui masque les galbes.

À partir de mars de 1925, plusieurs journaux devancent la presse spécialisée et mentionnent l’adoption du smoking au féminin : deux jeunes femmes le portent pour le Bal de la mode13; sur la Riviera deux femmes « avaient conservé tout de même un semblant de jupe au lieu du classique pantalon »14 ; une « mondaine réputée pour son élégance »15 lance la robe-smoking à l’occasion d’une répétition générale.

Le Temps attribue en 1925 à Ström16, tailleur de la rue Royale, la création de la dernière mode d’un « chic étourdissant […] qui fait déjà fureur à Paris »17. Pourtant, la filiation du costume n’est pas claire. La journaliste Hélène du Taillis demande : « Le smoking féminin a-t-il un père ou une mère ? »18. Camille Duguet, seule chroniqueuse de mode à s’être publiquement identifiée comme féministe, accorde à Anna la création : « En femme intelligente et avisée, Anna a senti d’où venait le vent. L’évolution de la femme et de ses sentiments ne lui a pas échappé »19. Sa formule pour habiller les amazones modernes en smoking associe « la grâce féminine à l’allure masculine », comme le précise la journaliste. Ses interprétations du costume dans l’univers vestimentaire féminin « s’accorde[nt] à merveille avec les cheveux courts et l’habitude que vous avez toutes prise de fumer la cigarette »20 ; elles figurent dans les pages d’Art, Goût et Beauté, de Vogue, de Jardin de Modes, ainsi que dans les rubriques de mode des quotidiens.

Anna demeure pourtant peu citée parmi les nombreux grands noms de la haute couture dans l’historiographie de la mode. Après avoir travaillé durant plusieurs années « chez un grand couturier de la rue de la Paix », elle reprend, en 1924, la maison Madeleine et Madeleine, située au 104 avenue des Champs-Élysées à Paris. Elle appartient à une génération marquée par l’importante présence de créatrices à la tête des maisons de couture parisiennes. À cette époque, le rôle des femmes devient fondamental pour la prospérité de cette industrie. Entre 1921 et 1931, la moitié des femmes actives exerce des métiers liés à l’industrie de la mode (textile et commerces).

La tendance de la saison est interprétée par les membres de la haute couture parisienne et est rapidement suivie par des magasins de confection qui donnent l’opportunité à leur clientèle de la classe moyenne de s’habiller à la mode. Dans le catalogue automne-hiver 1926-192721 de la maison High Life Tailor22 se trouvent deux modèles de smoking de l’après-midi, « Charleston » et « Smart », vendus trois cents francs23. Entre 1925 et 1927, vingt-six versions du smoking proposées par vingt maisons de couture, tailleurs et magasins figurent dans la presse. La formule classique en a sûrement constitué le point de départ, mais les professionnels du vêtement innovent dans leurs choix de formes, de couleurs et d’étoffes.

La version féminine du smoking est adaptée aux trois périodes de la journée où les femmes bourgeoises éprouvent le besoin de changer de tenue. La publicité de la maison Anna présente une illustration des trois déclinaisons de cette tenue24 : nous assistons à la création d’un smoking du matin, de l’après-midi et du soir. Le smoking pour femmes est plus sobre la journée et prend des allures plus somptueuses le soir. Ses interprétations s’écartent progressivement de la formule classique, avec l’apparition de certains éléments, tel le jabot en dentelle. Le premier impératif pour la création d’une version destinée aux femmes est l’ajout de la jupe, car le pantalon est encore une pièce exclusivement masculine en dehors de quelques exceptions, comme les activités balnéaires et sportives25. Il représente une limite que, malgré la mode d’inspiration androgyne, la plupart des femmes n’osent pas franchir. C’est la coupe de la veste, en col châle ou cranté, qui permet aux créateurs de qualifier le costume proposé de smoking.

Afin de mieux se conformer aux tendances de l’époque, cette tenue est embellie par l’éclat du lamé, comme dans la version « Lui et moi » proposée par Anna, mais aussi dans celle du moderniste Paul Poiret26. L’étoffe est utilisée aussi bien pour les vestes que pour les jupes. Les boutons sont en diamants, en cristaux, en perles et donnent à cette pièce le luxe auquel les femmes doivent se conformer pour cette fantaisie d’un soir. La cravate disparaît ainsi que la chemise à plastron. Les jupes plissées, très en vogue, s’harmonisent bien avec la féminisation du smoking. Hormis le lamé, le velours est lui aussi utilisé pour donner au costume une allure moins virile.

Le smoking du matin rompt avec le protocole vestimentaire, puisque le smoking masculin est une tenue conçue pour être exclusivement portée en soirée. Au milieu des années 1920, les costumes-tailleurs pour femmes ne sont plus une nouveauté et d’autres variantes du smoking sont créées et rivalisent avec les tailleurs pour le matin et l’après-midi. La jupe fantaisie à carreaux, quadrillée ou écossaise, devient populaire en association avec la veste. Le jeu consiste à ajouter ou à éliminer des composants de base du smoking afin de faire illusion sans trop masculiniser l’apparence générale.

Est-il toujours possible de parler de « smoking » après de telles transformations ? La différence entre le vêtement-écrit et le vêtement-image27 est frappante. Le premier, qui décrit par la parole la structure de cette pièce, insiste sur le caractère novateur de la tendance de la saison. Pourtant, en analysant le vêtement-image (les illustrations et les photos), on observe peu de similitudes avec le smoking masculin. En 1927, le smoking de la couturière Chéruit est par exemple métamorphosé en veste pailletée et jupe en tulle, sans pour autant perdre sa dénomination.

Le smoking féminin constitue-t-il une véritable innovation ou n’est-il qu’un nouveau vocable pour attirer l’attention de la presse et proposer des nouveautés aux consommatrices ? Selon la revue Les modes, « les maisons les plus sérieuses se sont emparées surtout de ce nom pour apporter quelque nouveauté à leur clientèle. […] Il n’a jamais été question de faire porter aux Parisiennes un smoking de drap ou de satin noir pour sortir le soir et donner à cette mode une allure masculine du plus mauvais goût »28. Le smoking féminin donne certes une allure masculine, mais il demeure une tenue genrée : à chaque « sexe » son smoking.

L’imparfaite imitation ?

Sitôt née, la mode du smoking féminin fait néanmoins polémique dans la presse. La position ambivalente de la presse spécialisée oscille entre le soutien apporté à l’industrie de la mode et une attitude conservatrice vis-à-vis de l’apparence féminine. Les journalistes fournissent des conseils à leurs lectrices afin qu’elles puissent adopter la nouvelle mode sans faire « mauvais genre »29. L’expression « allure masculine » est fréquemment associée aux adjectifs « féminine », « charmante », « raffinée », « séduisante » pour nuancer la ligne austère de cette toilette. Les rubriques insistent sur le fait que la création est « vue et corrigée »30 pour les dames qui veulent l’adopter. La dénomination « smoking » évoque alors une réminiscence, surtout pas une copie du vêtement masculin, point sensible sur lequel la presse de mode insiste. Il n’est pas question de faire porter aux femmes modernes une tenue semblable à celle des hommes : « les femmes d’aujourd’hui n’adoptent pas les modes masculines, elles les adaptent. Et ça n’est pas du tout la même chose »31, souligne la rubrique de mode du journal La Liberté.

Dans les quotidiens, les remarques sur le costume dépassent les rubriques réservées aux dames. L’idée d’une tenue qui aurait la capacité d’uniformiser l’apparence féminine et d’égaliser celle de l’homme est reçue comme une menace à l’égard de la souveraineté française dans le domaine de la mode féminine et la maîtrise du bon goût. Le journaliste Maurice Prax considère que le port de la tenue « provoquerait dans la couture une crise épouvantable »32 et proteste contre le « criminel smoking féminin, attentatoire à tous nos plaisirs et à toutes nos réjouissances ». D’autres commentateurs, à l’image du journaliste Charles Omessa, mobilisent l’argument économique, pour soutenir la nouvelle mode. Selon lui, le fait que la toilette féminine se simplifie et s’inspire de l’uniforme mondain masculin serait, en effet, « le premier effort louable qui ait été tenté par une femme contre les excès de la vie chère »33.

L’image de la Parisienne34 dans le monde serait aussi remise en question par l’austérité du smoking pour dames. Interviewée par Georges Martin pour Le Petit Journal sur la robe-smoking, cette « curieuse innovation », la comédienne Cécile Sorel déclare : « nous devons à la France de cultiver l’élégance et le luxe qui font le charme, le prestige et la prospérité de notre pays. […] À bas votre affreux smoking ! J’en fais une question patriotique »35. L’élégance à la française fait partie de la construction d’une identité nationale. La mode androgyne, paradoxalement promue par de nombreux créateurs et créatrices français, touche un point sensible de cet imaginaire.

La masculinisation de l’apparence féminine dérange. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la mode occupe une place importante dans le débat public. S’y expriment les anxiétés sociales à propos des effets de la guerre sur les relations de genre. La figure de La garçonne, nommée et immortalisée par le roman éponyme de Victor Margueritte paru en 1922, fait émerger les fantasmes de transgression et les angoisses autour des transformations en cours de la place des femmes au sein d’une société française traumatisée par le conflit qui a fait 1,4 million de morts. Le port des vêtements à l’allure masculine est perçu comme un langage visuel de la libération féminine. La volonté de sortir du confinement symbolique qu’impose le vêtement lui confère un sens politique36. Une émancipation « en trompe l’œil »37 ? Rappelons qu’alors le suffrage féminin – demande centrale de la lutte féministe en Europe depuis la fin du XIXe siècle – est encore loin d’être acquis. Les propositions de loi sont systématiquement rejetées en France, le plus souvent par le Sénat.

La vogue de cette tenue n’échappe pas à la presse satirique. La libération des mœurs et la nudité des femmes sont des thèmes récurrents dans les hebdomadaires. Par-delà une apparente légèreté de ton, leurs publications utilisent l’humour pour propager des idées misogynes et antiféministes sur la femme moderne. La popularité des journaux et magazines joue un rôle important après la guerre auprès de l’opinion publique et véhicule des représentations sexuées particulièrement stéréotypées des identités sociales38. Le corps féminin fait toujours l’objet de remarques normatives et critiques, qu’il soit trop habillé ou trop dévoilé. Le Journal amusant imagine, par exemple, une page d’un journal de mode dans un futur proche où le corps est soit dénudé par une tenue de plage trop révélatrice, soit virilisé par le port du smoking et du pyjama39.

Dans les caricatures, le smoking figure parmi les articles empruntés aux hommes par les femmes de l’après-guerre qui ont pris de nouvelles habitudes. Certaines d’entre elles fument, boivent de l’alcool, conduisent des voitures et s’habillent en se donnant une allure virile. La naissance de ce costume au féminin est associée à l’adoption d’attitudes jusque-là seulement autorisées pour les hommes. La mode suscite la peur d’un effacement des frontières des genres qui défie les rôles établis et alimente une soi-disant « crise de la masculinité »40. Le récit créé par les caricatures présente le port du smoking comme un privilège exclusivement masculin. « La “libérée” a pris les allures, le ton, le vocabulaire du sexe en face. La mode du smoking n’a trouvé chez elle aucune résistance »41, déclare Clément Vautel. Son appropriation semble anticiper les nouvelles barrières que franchiront les « femmes libérées », accusées d’aller trop loin.

Même costume, mêmes attitudes ? Les comportements suivront-ils la mode ? Si oui, cela confirmerait la peur des antiféministes qui voient dans cette tenue le symbole de l’émancipation féminine. C’est « le monde à l’envers » (figure 1), où les femmes s’habillent comme leurs filles, conduisent à grande vitesse et adoptent les vêtements masculins, comme la culotte et, bien sûr, le smoking. Sur la même planche, on trouve un dessin où un homme noir demande si la femme blanche est assez intelligente. On peut lire « les races dites inférieures éduquent les classes dites supérieures ». Il s’agit ici d’un clair exemple de « l’intersectionnalité des haines »42, où le sexisme et le racisme cheminent côte-à-côte dans le discours conservateur.

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Figure 1 : Henry Fournier, « Le monde à l’envers », Le Sourire, 20 mai 1926. Bibliothèque National de France

La Vie parisienne publie la caricature « L’habit ne fait pas le moine ou l’imparfaite imitation »43 selon laquelle, après l’appropriation du smoking, des pyjamas et des coiffures, les femmes s’attribueront aussi les politesses, les galanteries et les angoisses masculines. Le Journal amusant publie une caricature (figure 2), dans laquelle le chemin vers une égalité vestimentaire se mêle à la lutte pour les droits politiques. Le danger des progrès de l’émancipation sociale et politique des femmes hante alors les antiféministes qui se sentent menacés dans leur position établie.

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Figure 2 : « C’est si gentil les femmes », Le Journal Amusant, 31 octobre 1926. Bibliothèque Nationale de France

La peur d’une « renonciation » féminine provoquée par le port du smoking témoigne aussi de l’une des grandes hantises de l’après-guerre, à savoir celle du dépeuplement du pays. Clément Vautel, auteur du roman Madame ne veut pas d’enfant affirme : « La femme en smoking est peut-être une poule, mais il est à peu près certain qu’elle n’est pas une poule pondeuse. Son smoking masculin est un symbole, un programme, une déclaration des principes. Quand on fait l’homme, on se soucie peu de faire des enfants »44. Selon l’écrivain, le rejet des courbes associées à un corps maternel attesterait du mépris des femmes pour le rôle essentiel qu’elles doivent jouer au service de leur pays : produire des enfants pour la patrie, de futurs soldats et de futures mères de soldats, afin de garantir la sécurité et la prospérité de la nation. Les républicaines, les catholiques et même les féministes modérées partagent ces inquiétudes sur la « dépopulation », confirmée par les études démographiques. L’État intervient tôt du reste, la loi du 31 juillet 1920 punissant l’avortement et interdisant la vente de moyens contraceptifs, orientation appuyée par la propagande néo-malthusienne45. La tenue d’allure masculine éloigne les femmes de l’image de « l’éternel féminin » et de la mission que leur assigne la société. Avec humour, la journaliste Germaine Beaumont réfute l’argument nataliste : « ne nous affolons pas comme mon éminent confrère Clément Vautel qui voit dans le port du smoking un nouveau présage de dépopulation. Je connais des messieurs très bien qui revêtent leur “smoking” presque tous les soirs et qui sont des pères de famille très présentables »46.

Le smoking ne fait pas le moine

Outre la crainte des antiféministes sur la place nouvelle des Françaises dans la société, les femmes en smoking alimentent les discours redoutant l’inversion des genres. Alors que les magazines de mode annoncent la tendance de la saison, Le Sourire, à l’écoute des nouveautés, consacre sa couverture au smoking féminin (figure 3) dans son édition d’avril 1926. L’énorme point d’interrogation qui accompagne, à l’arrière-plan, la figure androgyne dans l’illustration exprime l’étonnement devant une nouvelle barrière franchie par les femmes et la confusion causée par l’ambiguïté du personnage. Une nouvelle image est forgée : « L’Ève de 1926, aux cheveux coupés, cigarette aux lèvres, monocle à l’œil, smoking à la taille »47.

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Figure 3 : Le Sourire, 15 avril 1926. Bibliothèque Nationale de France.

L’habillement et les vêtements jouent un rôle central dans la construction sociale de la différence entre les sexes48. Ils constituent comme un affichage de la différence par un « processus de communication non verbale, dont la manière de s’habiller est le plus visible comme le plus loquace des exemples »49. Selon Christine Bard, « la peur de cette masculinisation devient une obsession collective dans les années 1920, quand la confusion des sexes semble devenir réalité »50. L’adoption, par les femmes, de tenues d’origine masculine témoigne de ces changements. « Loin d’être clos sur lui-même, ce discours de mode emprunte à l’air du temps tout en le créant »51.

La nouvelle mode du costume noir aux lignes strictes qui habille les silhouettes filiformes est également source de confusions. « Charmant garçon… »52, avoue un personnage à un autre dans l’illustration publiée dans la revue Comœdia en 1926, alors qu’ils observent de dos cette figure mystérieuse qui, appuyée sur le canapé, est en train de fumer avec un phallique porte-cigarette. « Hum !… C’est ma femme… » révèle l’un des deux hommes à son ami. Dans ce scénario imaginaire d’une soirée intime, tous les trois portent le smoking.

La garçonne en smoking personnifie, dans les revues, la peur de l’inversion. Aux yeux des conservateurs, la virilisation féminine « annonce la fin de la complémentarité de genres, la dissolution du désir hétérosexuel, et donc la disparition de l’espèce humaine »53. L’adoption du smoking par les femmes ne déplaît pas forcément aux hommes, mais soulève des craintes par rapport aux identités sexuelles et semble conduire à « un dangereux uranisme »54. L’ambivalence générée par la nouvelle mode évoque l’homosexualité féminine.

Dès la fin du XIXe siècle, le style qui prédomine chez les lesbiennes dérivait du modèle du dandy, les tailleurs bien coupés de l’élite étaient expérimentés comme une libération et mettaient en valeur la revendication d’une existence hors des canons de la féminité. « Le jeu sur les apparences est au cœur des identités homosexuelles, car il permet d’exprimer à la fois une sensibilité personnelle et l’appartenance à un groupe »55, remarque l’historienne Florence Tamagne. Le smoking est adopté par le « troisième sexe » qui est bien présent dans le paysage des années 1920 et 1930 à Paris, à Berlin et à Londres, à l’image de l’écrivaine Radclyffe Hall qui porte le costume. La même année que la vogue du smoking en France, en Angleterre, la mode est au dinner-jacket for ladies. À Berlin, le costume est adopté par les lesbiennes qui fréquentent les nombreux établissements de loisir et de sociabilité d’une communauté qui se développe.

L’importante visibilité lesbienne pendant l’entre-deux-guerres constitue également un sujet dont s’empare la presse satirique56. Sur une illustration de La Vie parisienne publiée en 1926 figure un couple en smoking dont les personnages ont une coupe de cheveux similaire et sont habillés de la même façon, en smoking. Les deux partenaires, qui se reflètent comme dans un miroir, sont sur le point de s’embrasser. Sous la table leurs jambes révèlent une différence, une figure porte un pantalon et l’autre est en jupe. « Honni soit qui mal y pense »57 s’exclame la revue. S’agit-il d’un homme et d’une femme ? À première vue, le costume et les cheveux courts font penser à un couple d’hommes, mais plus attentivement, on imagine plutôt un couple de lesbiennes dont l’une porterait le smoking avec une jupe et l’autre pratiquerait le travestissement en adoptant le pantalon.

Fantasio, qui annonce que « la grande vogue sera cette saison aux smokings pour dames »58, mobilise aussi l’imaginaire des sociabilités lesbiennes. Cette légende accompagne un dessin où quatre femmes en smoking noir partagent un moment intime. Leurs jupes sont courtes et dans une atmosphère décontractée, les deux garçonnes sont assises, à l’arrière-plan, jambes écartées, comme des hommes. L’érotisme de l’acte consistant à partager du feu entre « les smokinettes »59 suggère une relation charnelle. La fumée en forme de cœur confère à la scène une allure romantique. L’auteur relativise toutefois cette crainte de voir les femmes adopter des comportements saphiques en ajoutant : « Celles qui porteront [la mode] seront un peu plus garçonnes, mais il restera toujours la “petite différence” ».

Malgré les reproches sur la virilisation des femmes, la garçonne en smoking demeure séduisante aux yeux des hommes qui s’habituent aux nouveaux canons de beauté des années 1920. « Qu’importe le flacon…si elle continue à aimer comme une femme »60, dit la caricature de la femme en smoking. En costume masculin, les femmes sont toujours l’objet des fantasmes masculins. Dans une caricature publiée en octobre 1926 par le magazine Le Sourire, les tailleurs prennent du plaisir à habiller deux jeunes femmes qui enfilent un smoking (masculin) sur leurs délicats dessous : « Avec la mode du smoking féminin, le métier de tailleur devient agréable »61.

Il n’y a pas un smoking féminin. Au-delà des nombreuses versions réalisées par la couture, le smoking des magazines de mode n’est pas tout à fait celui qui amuse les caricaturistes ni celui qui hante les fantasmes des antiféministes.

La création d’un smoking pour femmes marque le sommet de la mode androgyne. Elle défie les stricts codes vestimentaires des tenues de soirée qui renforcent la binarité entre les genres et mettent en évidence les conceptions de la masculinité et de la féminité. S’il n’est pas possible de mesurer le succès commercial de la mode du smoking féminin dans les maisons et magasins qui l’ont promue, la controverse qu’elle a générée dans la presse permet toutefois de souligner son importance, qui traduit si bien le trouble concernant le genre durant les Années folles.

Si au cours de cette vogue du milieu des années 1920, l’allure garçonnière était à la mode et la lesbienne était considérée comme élégante, durant la décennie suivante, « l’uniforme saphique » immortalisé par les photos de Brassai est pourtant jugé démodé62. En 1935, le smoking fait cependant un retour important dans les collections de couture : une nouvelle vague de « tailleurs de minuit » est présentée par les magazines de mode. Le costume s’adapte à la nouvelle silhouette de la décennie : la taille revient à sa place et les galbes du corps féminin sont à nouveau mis en valeur. Il faudra toutefois attendre 1966 pour voir apparaître en France la toute première version en pantalon du smoking féminin, dans la collection automne-hiver d’Yves Saint-Laurent.

1 John Carl Flügel, Le Rêveur nu : de la parure vestimentaire, Paris, Aubier, 1992, p. 102-104.

2 Farid Chenoune, Des modes et des hommes. Deux siècles d’élégance masculine, Flammarion, 1993, p. 111.

3 Mary Louise Roberts, Civilization without Sexes, Reconstructing Gender in Postwar France, 1917-1927,Chicago/Londres, University of Chicago Press

4 Steven Zdatny, « La mode à la garçonne, 1900-1925 : une histoire sociale des coupes de cheveux », Mouvement social, 1996/1, 174, p.32.

5 Christine Bard, Ce que soulève la jupe : Identités, transgressions, résistances, Paris, Éditions Autrement, 2010, p. 31.

6 L’étude de six magazines de presse spécialisée– Art Goût Beauté, Femina, Jardin des Modes, Le Grand Tailleur, Les Modes et Vogue – donne à voir l’

7 Le souci de choisir des publications d’orientations politiques distinctes a guidé la sélection de neuf journaux quotidiens : Excelsior, La Liberté

8 Florence Tamagne, « Caricatures homophobes et stéréotypes de genre en France et en Allemagne : la presse satirique, de 1900 au milieu des années

9 André Billy, « Paris, le… », Le Petit journal, 23 mars 1925.

10 Les Modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, novembre 1925, NP.

11 Fantasio, 15 octobre 1928. Formule utilisée pour décrire la coupe de cheveux des habituées de la boîte lesbienne Fétiche.

12 Voir Myriam Juan, Les Années folles, Paris, PUF, « Que sais-je », 2021.

13 Gilbert Charles, « Des robes, des poupées, des chapeaux et un pot de fleurs. » Figaro : journal non politique, 08 mars 1925, p. 1.

14 Madelyne, « La mode à la ville », Excelsior : journal illustré quotidien, 24 mars 1925, p. 5.

15 Charles Omessa, « La robe-smoking » La Liberté, 24 mars, 1925, p. 2.

16 Tout d’abord appelés O. Ström & Fils, les tailleurs d’origine scandinave sont les fournisseurs brevetés de S.M le Roi de Suède et de Norvège et cré

17 « Petites nouvelles », Le Temps, 21 mars 1925, NP.

18 Hélène du Taillis, « Le smoking féminin a-t-il un père ou une mère ? », L’Œuvre, 5 mars 1926, NP.

19 Camille Duguet, « Autour d’un smoking », Figaro : journal non politique, 29 janvier 1926, p. 2.

20 Rosine, « Propos Féminins », Figaro : journal non politique, 16 septembre 1925, p. 4

21 High Life Tailor, catalogue commercial, automne-hiver 1926-1927.

22 Maison de confection parisienne spécialisée d’abord dans la mode masculine, elle inaugure un rayon dédié aux femmes vers 1890.

23 En 1926, le salaire ouvrier moyen (salaire net annuel à plein temps) était de 7 003 francs (Thomas PIKETTY, Les Hauts revenus en France au XXe

24 Vogue, 1er juin 1926, p. XI.

25 Voir Christine Bard, Une histoire politique du pantalon, Seuil, Paris, 2010.

26 Colette D’Avrily, « La Mode et Les Modes », Les Modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, avril 1926, p.16.

27 Roland Barthes, Système de la mode, Paris, Éditions Allia, 2013 (1re éd. 1967), p. 59.

28 Colette D’Avrily, « La mode et Les Modes », Les modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, avril 1926, p. 16.

29 Voir Christine Bard et Nicole Pellegrin, « Introduction », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés, « Femmes travesties : un “mauvais genre” », sous la

30 « Le smoking de… madame », La Liberté, 27 janvier 1926, p. 5.

31 Ibid.

32 Maurice Prax, « Pour et contre », Le Petit Parisien, 9 avril 2915, NP.

33 Charles Omessa, « La robe-smoking », La Liberté, 24 mars 1925, NP.

34 Voir Emmanuelle Retaillaud, La Parisienne. Histoire d’un mythe. Du siècle des Lumières à nos jours, Paris, Le Seuil, 2020.

35 Georges Martin, « Pas encore née, la robe-smoking serait-elle déjà condamnée ? », Le Petit Journal, 22 mars 1925, p. 2

36 M. L. Roberts, Civilization without sexes, op. cit., p. 66.

37 Emmanuelle Retaillaud, « Années “folles”, “rugissantes” ou “dorées” ? Nommer les années vingt » Dominique Kalifa (dir.), Les noms d’époque : De « 

38 Voir Anne-Marie Lugan-Dardigna, Femmes-femmes sur papier glacé. La presse « féminine », fonction idéologique, La Découverte, 2019, 312 p.

39 « Nous avons trouvé une page d’un journal de mode de demain », Le Journal amusant : journal illustré, journal d’images, journal comique, critique

40 Francis Dupuis-Déri. « Le discours de la “crise de la masculinité” comme refus de l’égalité entre les sexes : histoire d’une rhétorique

41 Clément Vautel, « La dame qui a perdu son sexe », Cyrano : hebdomadaire satirique, 25 octobre 1925, p.5-6

42 Christine Bard, « L’antiféminisme dans l’hebdomadaire d’extrême droite Minute ou l’intersectionnalité des haines (1990-2015) » in Christine Bard

43 « Le monde à l’envers », La Vie parisienne, 2 mai 1925, p. 312-313.

44 Clément Vautel, « Mon film », Le journal, 20 mars 1925, p. 1.

45 C. Bard, Les femmes dans la société française au 20e siècle, op. cit., p.56.

46 Germaine Beaumont, « Smoking pour dames », Paris-midi : seul quotidien paraissant à midi, 22 mars 1925, p. 4.

47  « George Sand s’était fait couper les cheveux ! », Comoedia, 9 juillet 1926, NP.

48 Pascal Barbier, Lucie Bargel, Amélie Beaumont, Muriel Darmon et Lucile Dumont, « Vêtement », inJuliette Rennes (dir.), Encyclopédie critique du

49  Nicole Pellegrin, « Le vêtement comme fait social total », in Christophe Charle (dir.), Histoire sociale, histoire globale ? Paris, Fondation de

50 Christine Bard, Françoise Thébaud, « Les effets antiféministes de la Grande Guerre », in Christine Bard (dir.), Un siècle dantiféminisme, Paris

51 C. Bard, Les Garçonnes, op. cit, p. 10.

52 « Les femmes en smoking », Comœdia, 03 mars 1926, NP.

53 F. Dupuis-Déri, « Le discours de la “crise de la masculinité” comme refus de l’égalité entre les sexes : histoire d’une rhétorique antiféministe »

54 Willy, Le 3e sexe,réédition GKC - Question de genre, 2014, p. 216.

55 Florence Tamagne, « Mutations homosexuelles », in Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello, and Collectif, Histoire de la virilité :

56 Voir Florence Tamagne, Histoire de l’homosexualité en Europe. Berlin, Londres, Paris, 1919-1939, Paris, Seuil, 2000.

57 La Vie Parisienne : mœurs élégantes, choses du jour, fantaisies, voyages, théâtres, musique, modes, 6 novembre 1926, p. 940.

58 Dessin d’Albert Guillame, « Foll’modes. La smokinette », Fantasio, 1926, 1 mars 1926.

59 Ibid.

60 « Qu’importe le flacon… », Le Sourire, 16 février 1928, NP.

61 Aquarelle de Pem, Le Sourire, 14 octobre 1926, NP.

62 Maryse Choisy, Un mois chez les filles, Stock, 2015, p. 126-127.

Bibliographie

Bard Christine, Les Garçonnes. Modes et fantasmes des Années folles, Paris, Flammarion, 1998, 159 p.

Roberts Mary Louise, Civilization without Sexes Reconstructing Gender in Postwar France, 1917-1927, Chicago, Londres, University of Chicago Press, 1994, 352 p.

Stewart Mary Lynn, Dressing Modern Frenchwomen: Marketing Haute Couture, 1919–1939, Baltimore, John Hopkins University Press, 2008, 328 p.

Notes

1 John Carl Flügel, Le Rêveur nu : de la parure vestimentaire, Paris, Aubier, 1992, p. 102-104.

2 Farid Chenoune, Des modes et des hommes. Deux siècles d’élégance masculine, Flammarion, 1993, p. 111.

3 Mary Louise Roberts, Civilization without Sexes, Reconstructing Gender in Postwar France, 1917-1927, Chicago/Londres, University of Chicago Press, 1994, p.15.

4 Steven Zdatny, « La mode à la garçonne, 1900-1925 : une histoire sociale des coupes de cheveux », Mouvement social, 1996/1, 174, p.32.

5 Christine Bard, Ce que soulève la jupe : Identités, transgressions, résistances, Paris, Éditions Autrement, 2010, p. 31.

6 L’étude de six magazines de presse spécialisée Art Goût Beauté, Femina, Jardin des Modes, Le Grand Tailleur, Les Modes et Vogue – donne à voir l’ampleur de cette tendance. Si ces revues ont pour point commun de s’adresser à un lectorat féminin, elles se distinguent toutefois entre elles par leur prix et leur ligne éditoriale.

7 Le souci de choisir des publications d’orientations politiques distinctes a guidé la sélection de neuf journaux quotidiens : Excelsior, La Liberté, Le Figaro, Le Journal, Le Matin, Le Petit journal, Le Petit parisien, Le Temps et Paris-midi.

8 Florence Tamagne, « Caricatures homophobes et stéréotypes de genre en France et en Allemagne : la presse satirique, de 1900 au milieu des années 1930 », Le Temps des médias, vol. 1, n° 1, 2003, p. 42-53.

9 André Billy, « Paris, le… », Le Petit journal, 23 mars 1925.

10 Les Modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, novembre 1925, NP.

11 Fantasio, 15 octobre 1928. Formule utilisée pour décrire la coupe de cheveux des habituées de la boîte lesbienne Fétiche.

12 Voir Myriam Juan, Les Années folles, Paris, PUF, « Que sais-je », 2021.

13 Gilbert Charles, « Des robes, des poupées, des chapeaux et un pot de fleurs. » Figaro : journal non politique, 08 mars 1925, p. 1.

14 Madelyne, « La mode à la ville », Excelsior : journal illustré quotidien, 24 mars 1925, p. 5.

15 Charles Omessa, « La robe-smoking » La Liberté, 24 mars, 1925, p. 2.

16 Tout d’abord appelés O. Ström & Fils, les tailleurs d’origine scandinave sont les fournisseurs brevetés de S.M le Roi de Suède et de Norvège et créent des tenues destinées aux clubs d’automobilisme. Ce tailleur confectionne aussi à des prix plus accessibles que ceux de la haute couture des habits pour une clientèle féminine.

17 « Petites nouvelles », Le Temps, 21 mars 1925, NP.

18 Hélène du Taillis, « Le smoking féminin a-t-il un père ou une mère ? », L’Œuvre, 5 mars 1926, NP.

19 Camille Duguet, « Autour d’un smoking », Figaro : journal non politique, 29 janvier 1926, p. 2.

20 Rosine, « Propos Féminins », Figaro : journal non politique, 16 septembre 1925, p. 4

21 High Life Tailor, catalogue commercial, automne-hiver 1926-1927.

22 Maison de confection parisienne spécialisée d’abord dans la mode masculine, elle inaugure un rayon dédié aux femmes vers 1890.

23 En 1926, le salaire ouvrier moyen (salaire net annuel à plein temps) était de 7 003 francs (Thomas PIKETTY, Les Hauts revenus en France au XXe siècle : inégalités et redistribution, 1901-1998, Paris, Grasset, 2001, p. 679).

24 Vogue, 1er juin 1926, p. XI.

25 Voir Christine Bard, Une histoire politique du pantalon, Seuil, Paris, 2010.

26 Colette D’Avrily, « La Mode et Les Modes », Les Modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, avril 1926, p.16.

27 Roland Barthes, Système de la mode, Paris, Éditions Allia, 2013 (1re éd. 1967), p. 59.

28 Colette D’Avrily, « La mode et Les Modes », Les modes : revue mensuelle illustrée des Arts décoratifs appliqués à la femme, avril 1926, p. 16.

29 Voir Christine Bard et Nicole Pellegrin, « Introduction », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés, « Femmes travesties : un “mauvais genre” », sous la direction de Christine Bard et Nicole Pellegrin, n° 10, 1999, p. 7-20.

30 « Le smoking de… madame », La Liberté, 27 janvier 1926, p. 5.

31 Ibid.

32 Maurice Prax, « Pour et contre », Le Petit Parisien, 9 avril 2915, NP.

33 Charles Omessa, « La robe-smoking », La Liberté, 24 mars 1925, NP.

34 Voir Emmanuelle Retaillaud, La Parisienne. Histoire d’un mythe. Du siècle des Lumières à nos jours, Paris, Le Seuil, 2020.

35 Georges Martin, « Pas encore née, la robe-smoking serait-elle déjà condamnée ? », Le Petit Journal, 22 mars 1925, p. 2

36 M. L. Roberts, Civilization without sexes, op. cit., p. 66.

37 Emmanuelle Retaillaud, « Années “folles”, “rugissantes” ou “dorées” ? Nommer les années vingt » Dominique Kalifa (dir.), Les noms d’époque : De « Restauration » à « années de plomb », Gallimard, Paris, 2020, p. 244.

38 Voir Anne-Marie Lugan-Dardigna, Femmes-femmes sur papier glacé. La presse « féminine », fonction idéologique, La Découverte, 2019, 312 p.

39 « Nous avons trouvé une page d’un journal de mode de demain », Le Journal amusant : journal illustré, journal d’images, journal comique, critique, satirique, etc., 20 juin 1927, p. 6.

40 Francis Dupuis-Déri. « Le discours de la “crise de la masculinité” comme refus de l’égalité entre les sexes : histoire d’une rhétorique antiféministe », Cahiers du Genre, vol. 52, n° 1, 2012, p. 13.

41 Clément Vautel, « La dame qui a perdu son sexe », Cyrano : hebdomadaire satirique, 25 octobre 1925, p.5-6

42 Christine Bard, « L’antiféminisme dans l’hebdomadaire d’extrême droite Minute ou l’intersectionnalité des haines (1990-2015) » in Christine Bard, Mélissa Blais, Francis Dupuis-Déri (dir.), Antiféminismes et masculinismes d’hier et d’aujourd’hui, Presses Universitaires de France - PUF, “Hors collection”, 2019, p. 167

43 « Le monde à l’envers », La Vie parisienne, 2 mai 1925, p. 312-313.

44 Clément Vautel, « Mon film », Le journal, 20 mars 1925, p. 1.

45 C. Bard, Les femmes dans la société française au 20e siècle, op. cit., p.56.

46 Germaine Beaumont, « Smoking pour dames », Paris-midi : seul quotidien paraissant à midi, 22 mars 1925, p. 4.

47  « George Sand s’était fait couper les cheveux ! », Comoedia, 9 juillet 1926, NP.

48 Pascal Barbier, Lucie Bargel, Amélie Beaumont, Muriel Darmon et Lucile Dumont, « Vêtement », in Juliette Rennes (dir.), Encyclopédie critique du genre. Corps, sexualité, rapports sociaux, Paris, La Découverte, 2016, p. 659.

49  Nicole Pellegrin, « Le vêtement comme fait social total », in Christophe Charle (dir.), Histoire sociale, histoire globale ? Paris, Fondation de la Maison des sciences de l’homme, 1993, p. 82.

50 Christine Bard, Françoise Thébaud, « Les effets antiféministes de la Grande Guerre », in Christine Bard (dir.), Un siècle dantiféminisme, Paris, Fayard, 1999, p.161.

51 C. Bard, Les Garçonnes, op. cit, p. 10.

52 « Les femmes en smoking », Comœdia, 03 mars 1926, NP.

53 F. Dupuis-Déri, « Le discours de la “crise de la masculinité” comme refus de l’égalité entre les sexes : histoire d’une rhétorique antiféministe », art. cité.

54 Willy, Le 3e sexe, réédition GKC - Question de genre, 2014, p. 216.

55 Florence Tamagne, « Mutations homosexuelles », in Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello, and Collectif, Histoire de la virilité : Tome 3, La virilité en crise ? Le XXe-XXIe siècle, Paris, Seuil, 2011, p. 362.

56 Voir Florence Tamagne, Histoire de l’homosexualité en Europe. Berlin, Londres, Paris, 1919-1939, Paris, Seuil, 2000.

57 La Vie Parisienne : mœurs élégantes, choses du jour, fantaisies, voyages, théâtres, musique, modes, 6 novembre 1926, p. 940.

58 Dessin d’Albert Guillame, « Foll’modes. La smokinette », Fantasio, 1926, 1 mars 1926.

59 Ibid.

60 « Qu’importe le flacon… », Le Sourire, 16 février 1928, NP.

61 Aquarelle de Pem, Le Sourire, 14 octobre 1926, NP.

62 Maryse Choisy, Un mois chez les filles, Stock, 2015, p. 126-127.

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Bruna Holderbaum, « « Le smoking de madame » : mode et genre dans la France de l’entre-deux-guerres », Revue d’histoire culturelle [En ligne],  | 2021, mis en ligne le 14 novembre 2021, consulté le 29 mars 2024. URL : http://revues.mshparisnord.fr/rhc/index.php?id=755

Auteur

Bruna Holderbaum

Bruna Holderbaum est titulaire d’un master en Histoire des sociétés occidentales contemporaines (XIXe-XXIe siècle) de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où elle a soutenu un mémoire sur « Le Smoking au féminin (1925-1938) » en 2020 sous la direction de Pascale Goetschel. Actuellement en deuxième année de doctorat en histoire contemporaine à l’Université d’Angers, elle prépare une thèse sur « Une histoire transnationale du smoking : genre, sexualité et pouvoir » sous la direction de Christine Bard.