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« Sonorité » pour une « mélancolie de la résistance », Vox Balaenae, de G. Crumb, un précurseur
Antonia SoulezDOI : https://dx.doi.org/10.56698/filigrane.698
Texte intégral
1J’aborderai le sujet en me tournant prédilectivement vers cet écologiste spontané qu’est George Crumb, habité par l’animal et l’environnement, en m’appuyant sur « le son de la baleine » Vox balaenae dont il a fait œuvre en 1972, écrit pour trois acteurs-interprètes masqués, flûte, violoncelle et piano électriques à quoi s’ajoutent des crotales ou cymbalum antique, et d’une durée de presque 22 minutes. La disposition est une scène évolutive où le flûtiste est amené à se déplacer vers les crotales placées près du violoncelle. J’écoute et réécoute volontiers cette musique, c’est à dire la musique faite avec les sons, en imaginant toutes sortes de choses qui me viennent alors à l’esprit et sont autant de visions sonores qui m’envahissent doucement. J’ai l’état d’esprit que suscitent en moi des pièces de Debussy. Ainsi m’est venue l’idée d’en écrire d’abord un poème Vox Balaenae, paru dans Qualia, qualia sonores ici1. Car c’est ce qui se passe quand je me laisse envelopper par ce qui pour moi constitue un monde sonore, emplissant l’espace où je me trouve, comme immergée. Je deviens alors cette musique consentante à la voix de la baleine, entièrement sujette à son pouvoir d’impressionnement sur moi.
Je ne ferai pas ici de théorie. N’étant pas musicologue ni ne cherchant à philosopher sur Crumb, j’essaierai, presque impréparée, à transmettre l’effet d’association avec la dimension écologique que m’inspire cette œuvre, prenant la forme de l’essai dont Adorno nous parle dans un de ses écrits bien connus rassemblés dans Notes sur la littérature. Car, nous dit-il, « l’essai touche à la logique musicale », en contraste avec la « démarche discursive » quoique non subordonné à des contraintes d’univocité objective. C’est un peu mon parti, dans cet article. Ici la variation libre que je m’autorise consistera à me tenir en première personne, à mi-chemin entre la présentation rhapsodique de quelques traits marquants et le poème que j’ai écrit.
2Je rassemble donc, signalant à l’occasion mon expérience de musicienne à l’écoute, des moments inoubliables, en un faisceau d’impressions, traces de processus de qualités, ce que j’appelle « qualia ». Je ne songe pas ici à ce que, plus spécifiquement, la philosophie a charrié d’héritages et controverses, qu’il m’a plu de rappeler dans des écrits récents. Par exemple des développements autour de la question philosophico-scientifique des qualités secondes ravivées par la musique2. Ces traces que laisse après lui l’art savant, propre à Crumb, de combiner les sons harmoniques dont il explore les résonances en créant un instrumentarium absolument insolite me paraissent se rapporter en effet à ce qu’il est convenu d’appeler la nature, la nature animale, la nature dans toute son extension et sa variété, au delà de l’humain ou plutôt, comme je vais m’en expliquer, « en deçà ». Si je ne sais pas ce qu’est la nature, la musique de Crumb, qui en « monte » un certain usage, m’instruit mieux que tous les discours sur elle.
3Son appartenance au sol américain s’y prêtait en effet, car ce grand pays est celui de l’exploration de terrain où l’on bâtit aussi compte tenu du cadre. Frank Lloyd Wright en a conçu l’architecture faisant entrer l’extérieur dans l’intérieur des maisons, ouvrant l’intérieur sur la prairie, créant des vues en érigeant des parois en transparence, pour séparer mais faire voir la lumière qu’on n’arrête pas au passage des ouvertures. Les transcendantalistes n’ont pas fait mystère de cette interaction entre maison et paysages de forêt et d’étangs, ainsi Thoreau à Walden où celui-ci s’installa pour, écrit Robert Harrison, vivre l’éthos de l’Amérique. Charles Ives ne le sait que trop bien qui écrit sa sonate Conchord (1845) tout en écrivant, un Essay sur Emerson illustrant l’allegro, le premier mouvement de cette sonate.
On dira qu’on n’est pas loin d’une philosophie du sol – pas du sang – mais de la terre et des bois. Sans doute, y a-t-il un tel appel qui résonne encore à travers le « nous » du philosophe américain Stanley Cavell, ce « nous » qui fait défaut à la Raison rassembleuse, et que le philosophe cherche à ranimer par l’ « arrogation » (mot anglais pour « appel » avec dimension publique), ce « nous » ordinaire auquel Wittgenstein a redonné « voix » pour qu’il accède, ajoute Cavell, au statut d’un sujet collectif responsable, un sujet qui se tait trop souvent en ce siècle. Ainsi l’insolite n’est-il pas l’étrangeté de l’extra-ordinaire ni « l’inquiétante étrangeté » si à la mode, dont nous a parlé Freud et sur laquelle on ne cesse de broder encore, Stanley Cavell y compris. C’est que le lieu parle en premier et nous en lui : l’instrumentarium sera donc les instruments qu’on trouve, presque de fortune, plus populaires que savants, inattendus aussi, car la nature « bat » comme si elle avait un pouls, et la percussion elle se charge d’en faire entendre souffles, froissements et battements à l’aide d’instruments rudimentaires, un bric à brac d’objets pour des jeux de facture presque indigène, qu’on pourrait imaginer avoir été ramassés à l’occasion par terre ou un matin sur la grève après la tempête : scie, banjo, sitar, tabla, flûte à bec, guitare électrique, jouée avec un tube de métal glissant sur les cordes, archets sur verre en cristal, cloches, accessoires variés de percussion.
4Non, comme je le disais, la Conchord Sonata n’est pas si loin de Crumb dont la mémoire plonge ses racines dans une sorte de passé recomposé. Musiques d’approches de phrases effilochées par le temps, celles-ci proposent à l’état de lambeaux des réminiscences d’airs dont le rappel s’égrène en effigies sonores si lointaine qu’un air de Chopin par exemple semble revenir à nos oreilles tel une rengaine, ainsi dans Makrokosmos, qui fut commandé à Crumb par l’Université de Michigan (1972-73). Il s’agit au passage d’une évocation partielle tentée et aussitôt abandonnée, un bout de culture, de musique cultivée éminemment bourgeoise, dans une musique caverneuse, vocale, où le matériau des cordes du piano le dispute au cri rocailleux de la voix criant une prière à travers les entrailles du piano amplifié.
Emerge ici dans Vox Balaenae, première partie initiée par les vocalises de la baleine, en « parodie » également à la flûte, une phrase de R. Strauss « Also Sprach Zarathoustra », réutilisée à l’encontre du siècle dévastateur, en hommage à Nietzsche. L’ensemble comportant un bricolage en souvenir de Cage qui fut le maître de Crumb, se moque ici, des apprêts d’une musique romantique savante, livrée à l’oreille contemporaine comme un bout de pièce sans rapport dont on n’entend pas la phrase jusqu’au bout. Se moque-t-il vraiment ? Pas sûr. C’est aussi une douce évocation à peine audible qui se perd dans la nuit des temps comme si le temps de Chopin était très très reculé, une musique oubliée qui reviendrait soudain à nos oreilles. Mais à la tonalité d’un sacré perdu, ce qui manque ici n’est pas l’inimitable sourire impertinent, parodique et joyeux de l’inventeur du piano préparé, mais une oreille tendue vers l’ancien.
5L’univers de Crumb est poétique. Il fait penser à la manière dont Kurtag compose avec en tête les fragments de Kafka ou d’autres textes. Le texte bien sûr n’est pas servi par la musique. L’équilibre texte-musique ne sert pas la poésie pure, ou la musique pure, au détriment de l’autre art. Et l’image de Daniel Charles disant que l’Essay sur Emerson (cf plus haut et note) est le « verso » de l’allegro de Ives est parfaite. Cela veut dire qu’ils sont indissociables et que sans l’autre face, le recto ou le verso ne seraient pas. La proposition double ne donne aucun privilège et donc l’on est bien sorti de la controverse de la musique pure excluant le vocal et le récit, mais tout autant de l’idée de la voix pure, non instrumentale que le tableau de Raphaël « Santa Cecilia » (pour l’église San Giovanni in Monte, à Bologne) si souvent commenté met en évidence pour une certaine postérité seulement. Le retour de Crumb au récit par la voix du poème valant pour invocation biblique, s’inscrit autrement dans l’histoire accidentée du texte-musique.
6
Rien n’est en effet réellement « dépassé », le texte-musique témoignant de l’intrication profonde par les timbres de ces correspondances que le musicien a toujours recherchées entre la nature et nous, le microcosme et notre intériorité organique. Rien n’est « dépassé » en vertu du processus de déperdition qui, lui, vient jusqu’à nous, au lieu que nous allions, nous, vers ses sources. L’écologie est donc présente dans la « Voix de la baleine » sous des formes ressenties venues du grand Cétacée créé par Dieu dont la Bible nous parle, une nature de ce temps-là, livré par les écritures saintes, comme par la composition d’une « sonorité » définie par Makis Solomos comme une « synthèse de composants qui interagissent en complémentarité »3. L’élaboration d’agrégats combinant comme à travers un prisme (Jay Gottlieb) des sons harmoniques fait entendre le son de la sourde plainte de la Baleine tandis que l’onde vocalisée se propageant dans le milieu marin devient ce lamento qui avance au rythme lent d’un convoi, tel une bande sonore pour le fond des mers. Parmi les inspirations poétiques venues des poèmes de G. Lorca sur lesquels Crumb a prélevé des phonèmes, sensibles dans les Madrigals, le magnifique Ancient voices of children (1970), le compositeur, en quête, comme G. Scelsi, de formes rituelles, a aussi regardé vers l’Inde et l’Extrême-orient (in Lux aeterna 1971) puis la Chine à l’occasion d’un grand voyage exploratoire4.
7L’habitat de la baleine est environnemental comme l’est l’antre des cordes d’un piano grand ouvert, dont le clavier serait les fanons. Dans Makrokosmos (I, II, 1972-73) l’homme crie son chant dans les cordes, mêlant le timbre de la voix à celui des cordes. Même situation dans Vox Balaenae que je décris dans mon poème. C’est ce que Antoine Cazé appelle « machine fusionnelle »5, qu’il s’agisse de la mer, ou des entrailles du piano, semblable à une forge où l’on coulerait des métaux en timbres avec le corps du chanteur, l’instrumentiste étant lui-même incorporé à l’instrument. Pour mieux les faire entendre, le micro du piano dans Makrokosmos amplifie les sons émis de l’intérieur tandis que, dans le chant de la baleine, nous sommes nous-mêmes auditeurs appelés à pénétrer un milieu non-humain, un temple qui est tout sauf le « monde du silence ».
8Le lecteur trouvera cette comparaison bancale par ses contrastes. Je veux simplement dire que chaque pièce traite du rapport entre microcosme et macrocosme. Là se noue l’écologique à même la source. Vox Balaenae (1971), « Vox » désignant la voix, le son, le chant tout aussi bien, est plus écologique, s’étendant à l’univers du milieu de l’espèce cétacée, univers peut-être résonant aussi à travers Makrokosmos car l’antre des cordes du piano rappelle quelque chose de l’intérieur du piano amplifié. Dans les deux pièces, l’on discerne une visée biosémiotique qui me rappelle le travail antifonctionnaliste de l’architecte transsylvanien, émigré aux Etats-Unis en 1926, Friedrich Kiesler qui travailla un temps avec Breton et illustra « l’Ode à Charles-Fourier ». On me permettra ici une courte digression sur cet architecte singulier.
9Friedriech Kiesler, ce visionnaire dit constructiviste6 ne faisait en général que « projeter » en les dessinant, des espaces utopiques de scènes en particulier pour le théâtre, espaces si utopiques qu’il n’en construisait de fait que très peu. Il donnait à ces mondes des formes sphériques à l’intérieur desquelles il se plaçait lui-même, non sans une certaine ironie, en position foetale, entouré de filaments formant une sorte de nacelle utérine en suspension. Concepteur d’une « Space house », (1933), il a également imaginé de construire ce qu’il appelait le « système nerveux » de la maison, façon, à l’encontre du fonctionnalisme qu’il abhorrait, de mettre en valeur un équilibre bio-morphique entre « le naturel, le technologique et l’humain ». C’était, comme Crumb un peu plus tard, anticiper l’écologie dans le sens d’un co-réalisme anti-mécaniste. Si l’aspect sonore était peu présent, il mettait déjà au service de l’homme « biologique psychologique et socio-politique » une vision animée d’une sorte militante de futurisme, plus en phase avec des courants d’art comme celui de Varese qu’il rencontra d’ailleurs.
10Il y a cependant chez Crumb, à l’opposé d’un regard visionnaire sur le futur, une vision décentrée de sage tournée vers la mémoire des strates révolues de l’univers, en deçà de l’humain. Reste que le souci de penser l’habitat comme organisme dans le milieu de vie qui le nourrit rompt totalement avec le mythe de la fondation solide. Ce n’est plus les fondations, les murs , le toit qui font la maison, en son habiter, mais le milieu mouvant et liquide d’échelles naturelles, avec lequel contrastent en sons élevés presque dentelés dans l’azur, les accords sous-marins plus vibrants dans l’extrême grave que précis, dans lequel un vivant agit et réagit en interaction avec d’autres êtres. L’approximation recherchée que recommande Crumb tant concernant les indications métronomiques que pour le rendu du son accentue l’effet intéressant d’une distorsion des sons pour des anamorphoses sous mer semblables à la déformation d’un bâton vu dans l’eau. Un tremblé s’ensuit pour un son en quelque sorte flotté.
11En effet, pour revenir plus spécifiquement à Vox Balaenae de Crumb, l’habitat ici n’est pas humain, mais celui animal de l’espèce cétacée, un « cosmos » pour écologiste avant la lettre qui inclut l’humain, le dépasse puis le regarde de très très loin, du fond des âges. Crumb lui qui choisit de sonoriser un tel Umwelt entrelace sons des mouettes zébrant le ciel, et la lamentation de la baleine au long d’époques géologiques appelées Archéozoïde, Proterozoïde, Paleozoïde, Mesozoïde, Cenozoïde, à laquelle correspond pour chacune une variation dans cet ordre. Ainsi se trouve généré en expansion, à travers structures microtonales (sauf dans le « Nocturne de la mer »), ce que le pianiste Andrew Russo qui l'interprète appelle un « processus de pensée organique », si étendu en deçà de l’humain, qu’il semble offrir en perspective un regard animal sur nous qui sommes venus après mais sommes dorénavant responsables du grand dommage causé à la nature.
C’est en effet dans les mêmes années 1970 qu’un mouvement de défense des espèces marines clamant leur protection, en particulier en faveur des baleines, commence à témoigner des effets de la dévastation qui s’emparent de l’environnement. Ainsi notre voix couvre-t-elle celle de la baleine que Crumb ranime à sa façon. L’art s’avère ici indirectement politique.
12C’est ce renversement de perspective, de l’animal vers nous plus petits, susceptibles d’être comme Jonas, avalés un jour par lui, que la voix vocalise d’un œil infiniment distant, et regardeur. Toujours, dans le miroir d’une sidération se réfléchit, sans intention dirigée, l’Ur-text d’une partition primale. Qu’il en soit ainsi, comme dans toute cadence, se dit donc dans la Cadenza de la flûte électrique doublée d’un chant, dont les vocalises pour « le début des temps » n’ont rien à voir avec un quelconque enregistrement des sons de la baleine effectué par des spécialistes : « Paradoxalement, ce sont des musiciens qui se sont le plus intéressés aux relations de l’animal à son environnement vécu et qui en ont le mieux appréhendé l’extrême complexité » note, dans sa préface au Milieu animal et milieu humain de Jakob von Uexküll7, Dominique Lestel en pensant en particulier à François-Bernard Mâche, élève de Messiaen. Ce qu’entend le compositeur contraste, écrit-il encore, avec les sonagrammes des éthologues.
13Quoique, dans Vox Balaenae, le ton de militance ne soit nullement de mise si ce n’est, venu du passé, sur le mode de l’appel survivant émis par l’animal, un œil témoin qui assigne au silence justement toute prophétie futuriste émise par l’homme, trois hommes évoluent sur la scène éclairée d’un bleu profond, qui sont à demi-masqués, signifiant par là l’effacement de la part d’intervention humaine, vaine car perdue d’avance, « Tonlos », par notes muettes. La musique de Crumb semble déployer la « sonorité » au sens indiqué dans une note plus haut, d’une « mélancolie de la résistance ».8
Poème Vox Balaenae
14En roulis profond de graves, vrombit l’âme d’une corde basse
Extrême, à l’aigü, se moque quelqu’impertinent cake-walk,
Virevoltant, puis s’effraie, à la cadence d’une nuée, une volée d’étourneaux,
jusqu’à la pacifique neuvième, géodésique alanguie
d’un bord à l’autre du clavier, arquant l’audible
15Et, au début du temps, Dieu créa les grandes baleines
pour soulever de terre, dit la Bible
en mer, l’immensité, engrosser
l’aquarium à sa démesure
16Et sabrer, à la harpe, par séries, les harmoniques
criblant la vie, aspergeant l’eau-mère
d’un chromatisme in-notable
à travers strings arpégés, en transe
une source d’orgue pour tremolos
17Ce sont vocalises soufflées à travers bois, à même l’orifice
De l’animal à bosse, bleu d’avoir bondi à l’horizon des mers, effrangeant
Le silence, par un cri né plus bas que les courants.
A la quinte d’un air de plainte de ré à la bémol, une sourde récurrence,
Remonte dès lors, par le timbre humain d’une clameur de chair
Flûtée, une doublure de voix, voilure d’ombre portée d’un son,
d’écho d’abord, recouvert ensuite d’une insolente pelisse
diffusant à secondes déployées, plaquées en tous sens, des rythmes
d’un sacre dans les Appalaches
18Rendue à sa voix –même, hors musique cette fois, me cerne
le grand œil, globe méditant d’un monde circonscrit, profond,
Juge du dedans,
la baleine, miroir du siècle, ayant tout vu tout retenu, témoigne endeuillée
De ce que d’une mémoire orbitale elle a absorbé de notre terre, considérée depuis
les débuts du temps,
l’histoire,
Physis née océane d’abord, la voilà qui fait entendre
en barbelés les murmures d’un centenaire
La bête échoue placide et transfigurée, là où s’envasent
par torsades les varechs empoisonnant ce temple qu’elle fut d’abord,
trop grand pour nous,
19puis à l’équilibre s’organise quelque part, pour tout requiem, l’offrande
fanons d’un étendard en lamé
quoique, s’arquant à nouveau d’un dôme, muni
des trophées de son espèce.
Elle demeure un palace
où s’exposent au grand jour seulement
les atours d’une gorge tapissée,
on visite ses flancs qui rougeoient, ondoient, avec le drapé mouvant
à l’orient damassé d’étoffes, un intérieur plissé d’autels rupestres.
De la nef sous-marine, opulente
qui s’offre au visiteur, émanerait, je le dis, une double essence de timbre,
tout à la fois humaine et animale.
C’est mon trouble
Gémit un appel imprimant à ses émissions,
un air venu de loin depuis les débuts du temps, envers
exposé
d’une sagesse oubliée des écritures
Notes
1 Recueil publié en 2014, chez Delatour-France dans la collection Quatuor (dir. Jean-Marc Chouvel), avec six petits tableaux de mon amie peintre Jacqueline Kiang.
2 Qui oppose « qualia » et objet sonores propre au 20è siècle Cf. « Une philosophie pour les qualia sonores », ch. 13, p 341 sqq. In mon Au fil du motif, autour de Wittgenstein et la musique, Delatour-France, 2012, cette étude est le dernier texte du volume.
3 Loin d’être vague, le mot « sonorité » ici a un sens plutôt technique. In SOLOMOS, Makis (2013) : De la musique au son, Presses universitaires de Rennes, p 331 (note 100).
4 Plus tard, années 1980, il est conduit en effet après A. Goehr à visiter la Chine pour faire connaître la musique contemporaine d’après-guerre.
5 « L’esthétique mécaniste dans la musique américaine » in Les musiques savantes américaines, questions d’esthétique, dossier constitué par Antoine Cazé, n° 117, 3e trimestre, 2008 de la Revue française d’études américaines.
6 Sur Fr. Kiesler, voir notre volume collectif L’architecte et le philosophe, publié chez Mardaga, 1995, dir. Antonia Soulez.
7 Orig. allemand publié à titre posthume en 1956. Traduction française due à Charles-Martin Fréville, chez Payot-Rivages, 2010
8 D’après le roman de Laszlo Krasnahorkai La mélancolie de la résistance il faut aller voir Les Harmonies Werckmeister du cinéaste hongrois Bela Tarr : de 2 heures 20 minutes, il peut être vu en DVD 2000 dans la « blaq out » collection, avec sous-titres en français. Jacques Rancière a écrit un petit livre Le temps d’après, Capricci, Actualité critique 2011, sur ce film auquel je renvoie le lecteur. Une émission de France-Culture peut être consultée à laquelle il a participé. La baleine qu’on devine moribonde, exposée dans une roulotte de fête foraine dans une capitale hongroise non précisée, m’a paru illustrer dans le film la baleine dont Crumb fait entendre la plainte.