Dans la vacances du lieu
Christophe FrionnetDOI : https://dx.doi.org/10.56698/filigrane.379
Texte intégral
Dédicace
A Isabel Trocellier.
1Je regarde ce lieu
2il s’étale
3paisible en son antre
4ne le
5bousculons pas au-delà de lui-même
6au risque
7– certes minime
8de le voir se rétrécir
9ou s’épancher
10se rétracter
11ou se consoler solide
12et pur
13comme un éclat de vieille chose rose
14rose et vif comme la chair qui le remplit
15son silence ne désemplit pas
16qui le constitue tout entier
17que j’évapore entre mes doigts gourds d’ennui
18pour compter les minutes fécondes
19là, au milieu du temps
20perdu dans un océan de
21stupeur blanche
22se retrouver
23se ressaisir
24pareil et froid
25avant que le crépuscule ne s’étale aussi
26que le déluge n’efface toute trace
27de pensée
28se recueillir
29c’est s’imaginer là
30au-delà de l’image
31dans la vexation du corps de chair
32ce n’est pas entraver le monde
33c’est le porter
34l’examiner convenablement
35pour mieux le répandre aux quatre vents
36rayonnement de pacotille pour les uns
37pour les autres, feu de joie
38rien ne transparaît de la peine infinie du créateur
39engoncé dans ce silence obtus
40qui l’habite insaisissable
41ne dédaignons pas l’écorce embaumée
42de cette vacance fragile
43ou pudique
44– quand la saison le veut
45le souffle s’épanouit
46en un geste souverain
47le geste qui traverse le lieu
48le lieu qui traverse le monde
49comme une zébrure claire et sensée
50je palpe à cet instant
51l’arrogant éclair de ce lieu
52intime en son antre
53expressif en son cri
54là où la vie s’évertue à résonner
55lucide.
5630 mai 2005.